France, 1907 : Ce mot énigmatique sert à désigner ces associations amicales d’anciennes et d’anciens élèves d’écoles primaires qui n’étaient que 50 en 1889 et qui sont aujourd’hui plus de 4000.
A (petites)
À d’autres, dénicheur de merles !
France, 1907 : « Essayez de duper d’autres personnes ; quant à moi, je vous connais, vous ne m’attraperez plus. » Vieux dicton.
Un jeune paysan se confessait d’avoir endommagé la haie d’un voisin pour s’emparer d’un nid de merles.
— Avez-vous au moins pris les petits ? lui demanda le curé. — Non, je les ai laissés dans le nid, ils étaient trop jeunes encore. J’irai les prendre samedi prochain.
Le curé lui donna l’absolution en l’engageant à ne plus trouer les haies. Le samedi arrive, le villageois court à son nid, mais le trouva vide… Bon, se dit-il, le curé m’a prévenu. — Quelque temps après, il revint en confesse. Cette fois ce n’était plus une haie qu’il avait endommagée.
— Oh ! oh ! dit le curé, quel âge a-t-elle ? — Seize ans. — Jolie ? — La plus jolie du village. — La plus jolie ! Oh ! oh ! J’en connais beaucoup de jolies. Comment s’appelle-t-elle ? Où demeure-t-elle ? — Comment elle se nomme ? Où elle demeure ? s’écrie le paysan indigné. À d’autres, dénicheur de merles !
Et il sortit aussitôt du confessionnal.
Abajoues
Delvau, 1866 : s. f. pl. La face, — dans l’argot du peuple.
Il n’est pas de mots que les hommes n’aient inventés pour se prouver le mutuel mépris dans lequel ils se tiennent. Un des premiers de ce dictionnaire est une injure, puisque jusqu’ici l’abajoue signifiait soit le sac que certains animaux ont dans la bouche, soit la partie latérale d’une tête de veau ou d’un groin de cochon. Nous sommes loin de l’os sublime dédit. Mais nous en verrons bien d’autres.
France, 1907 : La face, dans l’argot du peuple qui compare volontiers son semblable à un cochon.
Abat-joues
Rigaud, 1881 : Les joues de ce second visage qu’il n’est pas bienséant de montrer en public.
Abatteur de bois, abatteur de bois remuant, de femmes ou de quilles
France, 1907 : Se disait autrefois pour désigner un homme valeureux en amour.
Bien que je sois poussé du désir de paraître,
Ne me souhaitez pas que la faveur des rois
Me fasse quelque jour grand veneur ou grand maître :
C’est assez que je sois grand abatteur de bois.
(Le cabinet satyrique)
Ce Jacques était un grand abatteur de bois remuant.
(Béroalde de Verville)
Il lui présenta cent mille choses que ces abatteurs de femmes savent tout courant et par cœur.
(Les Cent Nouvelles nouvelles)
Je me connais en gens ; vous êtes, je le vois, grand abatteur de quilles.
(Régnier)
Abattis (les)
M.D., 1844 : Les bras.
Abbaye de cinq pierres
Virmaître, 1894 : Les cinq dalles de granit placées devant la Roquette, sur lesquelles on monte l’échafaud. Lacenaire dédia ces strophes à ces cinq dalles :
Oh ! je vous connais bien, dalles qui faites place
Aux quatre pieds de l’échafaud.
Dalles de pierres blanches ou ne reste plus trace
Du sang versé par le bourreau.
Abbaye des s’offre à tous
La Rue, 1894 : Lupanar.
Abbaye des s’offre-à-tous
Delvau, 1866 : s. f. Maison conventuelle où sont enfermées volontairement de jolies filles qui ne pourraient jouer le rôle de vestales que dans l’opéra de Spontini.
Cette expression, qui sort du Romancero, est toujours employée par le peuple.
France, 1907 : Couvent pour les jeunes personnes dénuées d’argent autant que de préjugés.
Abbesse
Delvau, 1864 : Grosse dame qui tient un pensionnat de petites dames à qui on n’enseigne que les œuvres d’Ovide et de Gentil-Bernard : autrement dit Maîtresse de bordel, — le bordel étant une sorte de maison conventuelle habitée par d’aimables nonnains vouées, toutes au dieu de Lampsaque.
Lorsque tu vas rentrer, ton abbesse en courroux
Te recevra bien mal et te foutra des coups.
(Louis Protat)
Fustier, 1889 : Maîtresse d’une maison de tolérance. On dit plus communément : Madame.
La Rue, 1894 : Maîtresse d’une maison de tolérance.
Virmaître, 1894 : Maîtresse d’une maison de tolérance. Allusion aux filles qui sont cloîtrées comme dans un couvent (Argot du peuple).
Rossignol, 1901 : Tenancière d’une maison à gros numéro où les pensionnaires sont cloitrées et reçoivent la visite d’hommes, le plus possible.
France, 1907 : Matrone d’une maison de tolérance qu’on désignait aussi sous le nom de couvent. On dit également mère abbesse, ce que les gens polis appellent comme elles dames de maisons.
Les dames de maisons ne sont, de fait, que des prostituées qui en réunissent d’autres ; si elles n’appartiennent pas à la classe des prostituées lorsqu’elles demandent leur livret, la demande de ce livret équivaut à un véritable enregistrement parmi les prostituées. Si elles allèguent que, pour tenir des prostituées, elles ne se prostituent pas elles-mêmes, quelle garantie peut donner de cette allégation l’état auquel elles se vouent ? Il y a faculté implicite pour elles de tirer parti de leur personne, comme elles le font des femmes qu’elles régissent, sans qu’elles puissent donner aucune garantie du contraire. Tous les peuples civilisés ont, d’un commun accord, placé les prostituées en dehors de la loi commune. Mais quelle est la plus coupable de celle qui se prostitue pour ne pas mourir de faim, ou de celle qui, par calcul, par avarice, prostitue les autres, et emploie pour cela les moyens les plus iniques, les plus immoraux, les plus infâmes, ceux enfin qui répugnent le plus aux règles de ce sentiment intérieur que la nature place dans le cœur de tous les hommes ? Que l’on consulte à cet égard l’opinion du public, et l’on verra que s’il y a une différence entre une dame de maisons et ses tristes victimes dans le mépris qu’il leur porte, l’avantage ne se trouve pas du côté de la première. Or, en cela, comme dans beaucoup d’autres choses, le jugement du public doit être notre règle ; j’ai sondé à ce sujet l’opinion de ceux qui ont étudié ce qui regarde la prostitution et j’ai trouvé dans tous mépris profond pour les dames de maisons, et mépris adouci par la commisération pour les prostituées.
(Parent-Duchâtelet, De la prostitution dans la ville de Paris)
On disait au siècle dernier Appareilleuse (Voir Maquerelle).
Ils furent de là prendre des courtisanes chez une appareilleuse.
(La France galante)
Abcès
Delvau, 1866 : s. m. Homme au visage boursouflé, au nez à bubelettes, sur lequel il semble qu’on n’oserait pas donner un coup de poing, — de peur d’une éruption purulente.
On a dit cela de Mirabeau, et on le dit tous les jours des gens dont le visage ressemble comme le sien à une tumeur.
France, 1907 : Argot du peuple. Homme ou femme au visage boursouflé et pustuleux. On donnait ce nom à Mirabeau.
Abloquiseuse de verdouces
Clémens, 1840 : Marchande de pommes.
Abreuvoir à mouches
d’Hautel, 1808 : Plaie large et profonde, faite au visage avec le tranchant d’un sabre, ou quelquefois même avec un instrument contondant.
L’abreuvoir à mouches provient fort souvent des blessures que les enfans de Bacchus se font, soit en se battant à coups de poings, soit en donnant du nez contre terre.
Vidocq, 1837 : s. f. — Grande plaie d’où coule le sang ; ce terme est passé dans la langue populaire ; je le trouve dans le Vocabulaire de Vailly, édition de 1831.
Accentuer ses gestes
Delvau, 1866 : v. a. Donner un soufflet ou un coup de poing, — ce qui est une manière de se prononcer suivant les règles de l’accent tonique.
Accessoires
Delvau, 1866 : s. m. pl. Matériel servant à meubler la scène ; tous les objets dont l’usage est nécessaire à l’action d’une pièce de théâtre, depuis la berline jusqu’à la croix de ma mère. Les acteurs emploient volontiers ce mot dans un sens péjoratif et comme point de comparaison. Ainsi, du vin d’accessoires, un poulet d’accessoires, etc., sont du mauvais vin, un poulet artificiel, etc.
Virmaître, 1894 : Objets de théâtre. Dans le peuple, on donne à ce mot un tout autre sens : accessoires, les testicules (Argot du peuple). N.
Accointances (avoir des)
Delvau, 1864 : Commercer charnellement avec un homme lorsqu’on est femme, avec une femme lorsqu’on est homme.
Je supposai qu’elle avait eu des accointances avec le baron ou avec son laquais.
(A. Lireux)
De quelque valet l’accointance
Serait-ce bien votre désir ?
(Théophile)
C’est qu’à l’ombre des crucifix,
Souvent faites filles ou fils,
En accointant les belles-mères.
(G. Coquillart)
Il faut que quelqu’un se soit accointé que notre ménage a ainsi renforcé.
(Les Cent Nouvelles nouvelles)
Accomplir son désir
Delvau, 1864 : Faire l’acte copulatif, qui est et sera l’éternelle desiderium de l’humanité — mâle et femelle.
Il disait à ses gens de la tenir par les bras, tandis que Robin accompliroit son désir.
(Ch. Sorel)
Accordailles
d’Hautel, 1808 : Cérémonies dont on fait précéder ordinairement la signature d’un contrat.
On dit, pour révoquer en doute une union projetée, que Les accordailles ne sont point encore signées. Il est du bon ton de dire Les accords.
Virmaître, 1894 : Synonyme de fiançailles ; il y a toutefois une légère nuance : elles se font généralement sans le secours du maire ; les conjoints ne sont pas liés par l’écharpe municipale (Argot du peuple). N.
Accorder ses faveurs
Delvau, 1864 : Se dit d’une femme qui ouvre son cœur, ses bras et ses cuisses à un homme pour qu’il use et abuse de cette ouverture.
Ne sera-ce qu’une déclaration de sentiment ? Faudrait-il lui accorder les faveurs ?
(La Popelinière)
Accordeur de flûtes
La Rue, 1894 : Juge de paix.
Virmaître, 1894 : Juge de paix (Argot du peuple). V. Baton.
Accouplées
Virmaître, 1894 : Expression qui désigne dans un monde spécial les habituées du Rat Mort, de la Souris ou du Hanneton, deux femmes qui s’aiment avec une ardente passion et en conséquence détestent les hommes (Argot des filles). V. Gougnottes. N.
Achetoir ou achetoires
France, 1907 : Argent ; argot des voleurs.
Achetoires
Delvau, 1866 : s. m. pl. Argent, — dans le même argot [des filles].
Maurice Alhoy trouvait le mot trivial. Il est au contraire charmant et bien construit. Montaigne n’a-t-il pas écrit : « Je n’ai pas de gardoire » ? Garder, gardoire ; acheter, achetoires.
Virmaître, 1894 : Monnaie. Cette expression est très usitée dans le peuple. Le père ne travaille pas, tout est au mont-de-piété, pas de feu dans le poêle, l’enfant pleure :
— Maman, maman, j’ai froid, j’ai faim.
— Mon pauvre petit, je n’ai pas d’achetoires (Argot du peuple).
Acrès !
Hayard, 1907 : Méfiance ! Chut ! Gare !
Ad patres
d’Hautel, 1808 : Expression latine qui signifie Vers ses pères.
II y a longtemps qu’il est ad patres. Pour dire il est mort depuis long-temps.
Envoyer quelqu’un ad patres. L’envoyer promener ; l’envoyer paître.
Adresse
d’Hautel, 1808 : Un bureau d’adresse. Investigateur, entremetteur qui se fait une occupation de recueillir toutes les anecdotes du quartier, et auquel on s’adresse pour avoir des renseignemens sur tout ce qui s’y passe.
Adresser
d’Hautel, 1808 : Il vaut mieux s’adresser à Dieu qu’à ses saints. Pour dire qu’on obtient plus facilement une faveur en s’adressant directement au maître qu’à ses subdélégués.
Affaire esbrouffée
Clémens, 1840 : Vol manqué.
Affaires
Delvau, 1866 : s. f. pl. Se dit de l’indisposition menstruelle des femmes. Argot des bourgeois.
Affaires (avoir ses)
Delvau, 1864 : Avoir ses menstrues, qui sont toute une affaire, en effet.
Ce n’est pas le jour des affaires
Qu’il parait le plus affairé.
(Eugène Vachette)
Rigaud, 1881 : Avoir ses menstrues.
Affaires (manquer ses)
Rigaud, 1881 : Perdre son temps avec un amant de cœur et négliger les amants sérieux, — dans le jargon des filles galantes.
Affourchée sur ses ancres
Virmaître, 1894 : Fille publique qui renâcle sur le turbin pour faire tortorer son souteneur. Cette expression ancienne est fréquemment employée, car l’image est frappante. Affourchée, immobile comme le vaisseau amarré dans le port. Sur ses ancres, sur ses jambes. La fille ne trimarde pas (Argot des souteneurs).
Affourcher sur ses ancres (s’)
Delvau, 1866 : v. réfl. Prendre du repos ; se retirer du service. Argot des marins.
France, 1907 : Se retirer du service ou se reposer, dans l’argot des marins.
Affres
Delvau, 1866 : s. m. pl. Reproches, — dans l’argot du peuple. L’expression se trouve dans Restif de la Bretonne.
Rigaud, 1881 : Reproches, blâme.
La Rue, 1894 / France, 1907 : Reproches.
Affronteux (chemin des)
France, 1907 : Argot des paysans.
C’est le chemin qui détourne de la rue principale à l’entrée des villages et les côtoie à l’extérieur. On suppose que les gens qui craignaient de recevoir quelque affront mérité le prennent pour éviter d’être vus.
(G. Sand, La Mare au Diable)
Affûter (ses crochets, ses crocs, ses meules, ses tabourets)
Hayard, 1907 : Manger.
Affuter des pincettes (s’)
Virmaître, 1894 : Courir, se sauver à grande vitesse (Argot des voleurs).
Affûter ses meules
Rigaud, 1881 : Bien manger, bien jouer des mâchoires. Les meules sont les dents qui servent à broyer les aliments. Chez les misérables, elles broient trop souvent dans le vide. La variante est : Graisser ses meules.
Affûter ses pincettes
Delvau, 1866 : Courir, ou seulement marcher. Argot des faubouriens.
Hayard, 1907 : Danser.
Agnès
Delvau, 1864 : Jeune fille embarrassée de son pucelage ; fausse ingénue qui affecte de croire que les enfants se font par l’oreille, bien que son petit cousin lui ait appris par quel autre endroit ils s’improvisent.
Je n’aime pas ces Agnès-là, je leur préfère des garces franchement déclarées.
(Lireux)
Agobilles
Rigaud, 1881 : Outils, — dans le jargon des voleurs.
La Rue, 1894 : Les outils des voleurs.
Virmaître, 1894 : Outils employés par les malfaiteurs pour voler. Ce mot est très ancien (Argot des voleurs).
Aguinettes
France, 1907 : Étrennes, dérivé du breton.
Après le repas, on est rentré au salon pour la distribution des aguinettes (étrennes), du vieux langage breton. Toutes les boîtes étaient surmontées d’une branche de la plante parasitique et druidique, du gui (d’où aguinettes).
Aides (aller à la cour des)
Rigaud, 1881 : Une femme va à la cour des aides, lorsqu’elle donne un ou plusieurs collaborateurs à son mari. L’expression date du dix-huitième siècle.
Aiguille à tricoter les côtes
France, 1907 : Épée ou fleuret.
Ailes de pigeon (faire les)
France, 1907 : Danser en battant les jambes et rapprochant les talons.
Aimer bien ses parents
France, 1907 : Être un imbécile, dans l’argot de la canaille.
Dans un article du Gaulois, dit Lorédan Larchey, sur le Paris-Féroce, M. Louis Le Bourg dit en parlant des malfaiteurs de Montmartre : « Une locution enfin donnera, mieux que tous les tableaux, le niveau de l’état moral. On dit d’un être idiot : Il aime bien ses parents. »
Aimer comme ses petits boyaux
Rigaud, 1881 : Ressentir une vive affection.
France, 1907 : Le ventre étant la divinité de la plupart des êtres humains, ainsi que l’a constaté Hugo,
Le ventre est dieu, le ventre est roi.
cette expression s’est trouvée naturellement pour définir le superlatif de l’affection.
Aimer quelqu’un comme ses petits boyaux
Delvau, 1866 : v. a. l’aimer extrêmement. — Argot du peuple. On dit aussi Aimer quelqu’un comme la prunelle de ses yeux.
Aînesse
d’Hautel, 1808 : Le droit d’aînesse. On fait un calembourg de cette expression en élidant l’i du dernier mot ; et l’on dit en riant à une fille sotte et ignorante, qui se glorifie d’être l’aînée, qu’elle a le droit d’ânesse.
Alarmistes
Virmaître, 1894 : Chien de garde. L’animal donne l’alarme à ses maîtres. En 1848, les alarmistes étaient des bourgeois qui répandaient chaque jour des mauvaises nouvelles (Argot des voleurs).
Alènes
Delvau, 1866 : s. f. pl. Outils de voleur, en général, — sans doute à cause de leur forme subulée.
France, 1907 : Outil de voleurs.
Aller à la cour des aides
Delvau, 1866 : Se dit d’une femme qui trompe son mari en faveur d’un ou de plusieurs amants. L’expression date de l’Histoire comique de Francion.
La Rue, 1894 : Tromper son mari.
France, 1907 : Ressource d’une femme qui, n’étant point satisfaite des devoirs que lui rend ou ne lui rend pas son mari, emprunte l’aide de personnes moins circonspectes.
Aller à la messe des trépassés, y porter pain et vin
France, 1907 : Aller à la messe après avoir bien bu et bien mangé.
Aller à ses affaires
Delvau, 1866 : Ce que les Hébreux appellent hesich raglaw, les Anglais to shite, les Espagnols cagar, les Flamands schyten, les Italiens cacare, et les Grecs χέζειν.
Autrefois, chez le roi, on appelait chaise d’affaires, la chaise percée, et brevet d’affaires le privilège d’entrer dans le lieu où le roi est sur sa chaise d’affaires.
France, 1907 : où le roi ne va qu’à pied. « C’est, à mots couverts, disait Scarron, le lieu où l’on va se décharger du superflu de la mangeaille. »
Aller aux mûres sans crochet
France, 1907 : Ne rien entreprendre sans être muni de ce qui est nécessaire pour faciliter le succès. Allusion à la façon dont il faut cueillir les mûres. Le mûrier étant un arbre qui étend ses rameaux flexibles loin de son tronc, pour atteindre les fruits, il faut attirer à soi les branches ; par conséquent, ceux qui n’ont pas eu la précaution de se munir d’un crochet ne peuvent faire qu’une maigre récolte.
On dit dans le même sens : S’embarquer sans biscuit.
Aller chez Faldès
Fustier, 1889 : Partager.
La Rue, 1894 : Partager le produit d’un vol.
Aller comme une corneille qui abat des noix
France, 1907 : Se trémousser étourdiment, aller à l’aventure, mettre tout le corps en mouvement comme le ferait une corneille, de la tête et de la queue.
On dit aussi dans le même sens : Aller et venir comme un pois en pot.
Aller en Flandres sans couteau
France, 1907 : Vieux dicton hors d’usage, allusion à l’habitude en Flandre et dans toute l’Allemagne de toujours porter avec soi un étui renfermant un couteau et une fourchette, les voyageurs ne trouvant ni l’un ni l’autre dans les auberges. Aller en Flandres sans couteau avait donc à peu près la même signification que S’embarquer sans biscuit. Dans la collection des proverbes Flamengs et François du XVIe siècle on trouve ce dicton :
Qui va en Flandres sans couteau
Il perd de beure maint morseau.
Dans ses Dialogues du nouveau langage françois italianisé, Henry Estienne dit : « Il vaudroit mieux aller en Flandres sans couteau (ce que toutesfois l’ancien proverbe ne conseille pas) qu’aller à la cour sans estre garni d’impudence. »
Aller que d’une fesse (n’)
Delvau, 1866 : Se dit — dans le même argot [du peuple] — de quelqu’un qui n’est pas très bien portant, ou de quelque affaire qui ne marche pas à souhait de celui qui l’a entreprise.
C’est l’ancienne expression, plus noble : N’aller que d’une aile.
France, 1907 : Se dit de quelqu’un qui n’est pas bien portant ou dont les affaires ne marchent pas à souhait.
Aller se faire couper les cheveux
Delvau, 1864 : Aller au bordel. — L’expression date de l’établissement des bains de mer de Trouville, fréquentés par la meilleure société parisienne. Trouville est pour ainsi dire un faubourg du Havre, mais un faubourg sans bordels. Les messieurs sans dames qui ont des besoins de cœur s’échappent, vont au Havre et reviennent l’oreille basse, la queue entre les jambes, comme honteux de leurs mauvais coups. D’où venez-vous ? leur demandent les dames. — J’ai été me faire couper les cheveux, répond chaque coupable. — Les dames trouvaient — trouvillaient, dirait Commerson — qu’ils allaient bien souvent se faire arranger — la chevelure.
Aller sur la haquenée des cordeliers
France, 1907 : Aller à pied. Les cordeliers, faisant partie des ordres mendiants, ne chevauchaient guère.
Aller voir défiler les dragons
Delvau, 1866 : Dîner par cœur, c’est-à-dire ne pas dîner du tout, — dans l’argot du peuple, qui se rappelle le temps où, ne pouvant repaître son ventre, il allait repaître ses yeux, sous la République, des hussards de la guillotine, et sous l’Empire des dragons de l’Impératrice. Qui admire, dîne !
Virmaître, 1894 : Ne pas manger. Être de la revue signifie la même chose (Argot du peuple).
Hayard, 1907 : Se passer de manger.
France, 1907 : Se passer de dîner ; expression qui vient sans doute de l’habitude qu’on les pauvres gens qui n’ont pas de quoi dîner d’errer par les rues et d’assister au défilé des soldats, aux parades militaires qui avaient lieu précisément à l’heure où l’on dîne.
Les Anglais disent : To dine with Duke Humphrey, dîner avec le duc Humphrey, à cause de l’aventure arrivée à un gentleman qui, ayant été visiter avec plusieurs de ses amis le tombeau du duc Humphrey de Glocester, y fut enfermé par plaisanterie ou par mégarde et y resta pendant que le reste de la compagnie dînait dans une hôtellerie voisine. Quand on lui ouvrit le caveau, on dit qu’il avait dîné avec le duc Humphrey et le proverbe resta.
Alliances
Delvau, 1866 : s. f. pl. Poucettes avec lesquelles les gendarmes joignent les mains des malfaiteurs pour gêner leurs mouvements.
Virmaître, 1894 : Poucettes. Les gendarmes mettent poucettes aux prisonniers pour les conduire de brigade en brigade. (Argot des voleurs) V. Cabriolet.
France, 1907 : Poucettes.
Alliances (les)
Hayard, 1907 : Les poucettes.
Allonger (se les)
La Rue, 1894 : Courir vivement.
Allonger les radis
France, 1907 : Payer. Allonger la ficelle, augmenter une punition, en argot militaire.
Allumage (professeur d’)
Virmaître, 1894 : Grec qui apprend à ses élèves le moyen à employer pour allumer les joueurs naïfs. Il y avait anciennement au boulevard du Temple, un café où se rencontraient les grecs, il était connu sous le nom de café d’allumage (Argot des grecs). V. Suiffart.
Allumer des clairs
La Rue, 1894 : Regarder avec attention.
Allumer les cierges
La Rue, 1894 : Faire le guet (guetter les agents).
Allumer ses clairs
Delvau, 1866 : Regarder avec attention.
Allumes
Rigaud, 1881 : Morceaux de bois sec, dans le jargon des boulangers.
Allumettes
Rigaud, 1881 : Jambes longues et maigres. Prends garde, tes allumettes vont prendre feu.
France, 1907 : Jambes. Allusion à la maigreur des toutes jeunes filles qui grandissent.
Madame Cardinal,
Devant l’air virginal
Qu’ont encor ses gamines,
Prie : « Ô Dieu qui les fis,
Fait-nous tirer profits
De leurs gentilles mines.
Je ne manquerai pas
D’aider leurs premiers pas,
Afin que tu permettes
Qu’elles puissent, devant
Le grand public, souvent
Jouer des allumettes. »
(Blédort, Chansons de faubourg)
Amandes de pain d’épice
Delvau, 1866 : s. f. pl. Dents noires et rares. Argot des faubouriens. L’expression a été employée par le duc de Grammont-Caderousse qui, le soir de la Ire représentation du Cotillon, au Vaudeville, avait cassé trois dents à un quidam.
Rigaud, 1881 : Grandes dents d’anglaise. Pour que rien ne se perde dans la langue métaphorique de l’argot, on appelle, par contre, « dents d’anglaise » les amandes de pain d’épice.
France, 1907 : Dents noires et sales.
Ambes
Delvau, 1866 : s. f. pl. Les jambes — dans l’argot des voleurs, qui serrent de près une étymologie : αμφω en grec, ambo en latin, d’où ambes dans l’ancien langage français, — trois mots qui ont la même signification, deux : les jambes vont par paire.
Rigaud, 1881 : Jambes. — Suppression de la première lettre.
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