Delvau, 1866 : Avoir le geste prompt et le soufflet facile. Signifie aussi Avoir des allures de bourgeois, et même de grand seigneur. On dit dans le même sens : Ne pas se moucher du coude.
France, 1907 : Expression populaire employée à l’égard de quelqu’un qui a de la fortune, des rentes, qui se donne du genre, ou qui a simplement une bonne éducation. « Il ne se mouche pas du pied », dit-on.
Elle viendrait de ce qu’autrefois l’un des tours les plus familiers aux paillasses et aux pitres était de se passer rapidement le pied sous le nez. Les polissons et les voyous s’amusaient à imiter ce tour grotesque et ridicule, le contraire des bonnes manières et de la gravité.
On emploie aussi cette expression pour désigner un homme instruit et habile, et c’est dans ce sens qu’on trouve au premier acte de Tartuffe :
Certes, Monsieur, Tartuffe, à bien prendre la chose,
N’est pas ou homme, non, qui se mouche du pied.
Les Grecs disaient : se moucher du coude, allusion à un mouvement bien connu des pauvres gens qui, n’ayant pas de mouchoir, se servent de leur avant-bras pour s’essuyer le nez. « Je suis fils d’un homme qui se mouchait du coude », répondit Antisthènes le cynique à quelqu’un qui le questionnait sur sa famille.
Dans son Dictionnaire des Curieux, Ch. Ferrand donne une autre explication de cette expression : « Le verbe réfléchi se moucher n’a rien à voir dans cette locution… Le texte primitif était : ne pas s’émoucher du pied.
« Émoucher veut dire encore chasser les mouches, abigere muscas.
« Émouchette, émouchoir désignent des objets, des instruments qui servent à chasser les mouches, et émoucheur désigne une personne dont la fonction consiste à empêcher les mouches d’approcher d’une autre personne…
« Du temps de Rabelais, on disait émoucheteur. À Rome, il y avait des émoucheurs de profession, ou plutôt des esclaves uniquement chargés de chasser les mouches des maisons… Soit parce que les mouches sont chez nous moins importunes et moins nombreuses qu’à Rome, soit parce que nous sommes moins sybarites, chacun se charge de faire soi-même la police sur son visage. Donc, l’homme s’émouche avec la main… toutes les bêtes, même celles pourvues d’un appendice, s’émouchent avec le pied. Voilà pourquoi nos pères disaient ne pas s’émoucher du pied, en parlant d’un homme qui n’était pas une bête.
— Deux ans, rien que deux ans et vous serez convaincues l’une et l’autre, que si je ne me mouche pas du pied, ainsi que vous me l’avez quelquefois reproché, je n’ai pas besoin de mes pouces ni d’aucun de mes doigts pour m’essuyer les narines.
(Léon Cladel, Juive errante)