Hayard, 1907 : Accouchement.
Aboulement
Accouplement (l’)
Delvau, 1864 : L’acte copulatif, qui accouple souvent un jeune homme avec une vieille femme, un vieillard avec une jeune fille, un libertin avec une presque pucelle, une bête avec un homme d’esprit.
À tout prix je voulus la renvoyer chez elle ;
Mais elle résista, — ce fut mon châtiment,
Et jusqu’au rayon bleu de l’aurore nouvelle,
J’ai dû subir l’horreur de notre accouplement.
(Henri Murger)
Allemand
d’Hautel, 1808 : Une querelle d’Allemand. Noise, zizanie, querelle injuste et mal fondée, suscitée, sans aucun sujet, et sous le seul prétexte de se débarrasser de quelqu’un qui est à charge.
Amicablement
Delvau, 1866 : adv. Avec plaisir, affectueusement, de bonne amitié, — dans l’argot du peuple, dont les bourgeois auraient tort de rire. Je ne conseille à personne de cesser de prononcer amicalement ; mais je trouve qu’en prononçant amicablement, les ouvriers serrent de plus près l’étymologie, qui est amicabilis, amicable. Amicabilem operam dare, dit Plaute, qui me rend un service d’ami en venant ainsi à la rescousse.
Angoulème
Rigaud, 1881 : Bouche, du vieux mot goule, gueule. — Se caresser l’angoulème, faire bonne chère.
Virmaître, 1894 : La bouche (Argot des voleurs). V. Affamée.
Angoulême
Raban et Saint-Hilaire, 1829 / Bras-de-Fer, 1829 : Bouche.
Delvau, 1866 : s. f. La bouche — dans l’argot des voleurs, qui ont emprunté ce mot à l’argot du peuple, par corruption du verbe français engouler, avaler, et non, comme le voudrait M. Francisque Michel, par une allusion plus ou moins ingénieuse et plus ou moins fondée à la réputation de goinfrerie de la capitale de l’Angoumois.
La Rue, 1894 : Bouche.
France, 1907 : La bouche, argot des voleurs ; imitation du vieux mot français engouler, mettre en goule, dont nous avons fait gueule, goulu, goulafre, gueuleton. Se caresser l’angoulême, manger et boire.
Angoulême (l’)
anon., 1827 / Halbert, 1849 : La bouche.
Battre sa flème
Delvau, 1864 : Courir le guilledou, aller dans les quartiers où la femme donne le plus.
Eh bien ! puisque je suis en train de battre ma flème, je vais connaître cette maison.
(Lemercier de Neuville)
Delvau, 1866 : v. n. Flâner, — dans l’argot des voyous.
Battre sa flemme
Rigaud, 1881 : Flâner. La variante est : Battre la semelle.
France, 1907 : Se livrer à la paresse.
Bellemeresque
France, 1907 : Qui a rapport à la belle-mère. Cet adjectif, mis en circulation par Edmond Lepelletier, mérite de faire son chemin.
Ce gendre, qui pousse peut-être trop loin l’amour de sa belle-maman, vient d’enseigner à ses collègues la manière de traiter la terrible gent bellemeresque.
Voir Caisson.
Bille, billemont, billon
Larchey, 1865 : Espèces monnayées. — Billemont et billon sont des diminutifs de bille qui, comme balle, fait allusion à la forme ronde de la monnaie. V. Attache, Flacul.
L’argent au Temple est de la braise, ou de la thune, ou de la bille.
(Mornand)
Nous attendions la sorgue, voulant poisser des bogues, pour faire du billon.
Billement
Ansiaume, 1821 : Faux billets.
Il a des billemonts en rompant dans son lucque pour laigue de Caen.
Billemon
Halbert, 1849 : Billet.
Delvau, 1866 : s. m. Billet, — dans l’argot des voleurs.
France, 1907 : Billet de banque, argot des voleurs.
Billemuche
Rigaud, 1881 : Billet.
Brouillement
d’Hautel, 1808 : Mauvaise intelligence ; mélange, désordre, confusion.
Calembredaines
d’Hautel, 1808 : Bourdes, contes en l’air, discours frivoles et saugrenus.
Camouflement
Vidocq, 1837 : s. m. — Déguisement.
Delvau, 1866 : s. m. Déguisement, — parce que c’est à tromper que sert la camoufle de l’instruction et de l’éducation.
Rigaud, 1881 : Déguisement. — Se camoufler, se déguiser, — dans le jargon des voleurs. Vient de l’italien camuffare, se cacher la tête.
Casser des emblèmes
La Rue, 1894 : Conter des mensonges.
Charlemagne
Larchey, 1865 : Poignard d’infanterie. — Allusion ironique à l’épée du grand monarque.
Delvau, 1866 : s. m. Sabre-poignard, — dans l’argot des troupiers.
Rigaud, 1881 / Merlin, 1888 : Sabre-baïonnette.
France, 1907 : Sabre-poignard.
Charlemagne (faire)
Larchey, 1865 : Se retirer du jeu sans plus de façon qu’un roi, et sans laisser au perdant la faculté de prendre sa revanche.
Si je gagne par impossible, je ferai Charlemagne sans pudeur.
(About)
Rigaud, 1881 : Quitter une partie de cartes au moment où l’on vient de réaliser un bénéfice.
La comtesse fait Charlemagne à la bouillotte.
(Victor Ducange, Léonide ou la vieille de Suresnes, 1830)
Si je gagne par impossible, je ferai Charlemagne-sans pudeur, et je ne me reprocherai point d’emporter dans ma poche le pain d’une famille.
(Ed. About, Trente et quarante)
Les étymologistes ont voulu faire remonter l’origine du mot jusqu’à l’empereur Charlemagne, parce que cet empereur a quitté la vie en laissant de grands biens. Comme tous les noms propres familiers aux joueurs, le nom de Charlemagne a été, sans doute, celui d’un joueur appelé Charles. On a dit : faire comme Charles, faire Charles et ensuite faire Charlemagne. On appelle bien, dans les cercles de Paris, la dame de pique : « la veuve Chapelle », du nom d’un joueur. On a bien donné au second coup de la main au baccarat en banque, le nom de « coup Giraud », nom d’un officier ministériel, d’un notaire. Les joueurs ne connaissent rien que le jeu, rien que les joueurs et leurs procédés. La vie pour eux est toute autour du tapis vert. S’ils ont appris quelque chose, ils l’ont bientôt oublié, et ils professent le plus grand mépris pour tout ce qui ne se rattache pas directement au jeu. Ils se moquent bien de l’empereur Charlemagne et de tous les autres empereurs ! En fait de-monarque, ils ne connaissent que les monarques de carton.
Virmaître, 1894 : Se mettre au jeu avec peu d’argent, gagner une certaine somme et se retirer de la partie sans donner de revanche (Argot des joueurs).
France, 1907 : Se retirer du jeu, lorsqu’on est en gain, suivant un ancien privilège des rois. « Ce terme, dit Lorédan Larchey, contient en même temps un jeu de mots sur le roi de carreau, le seul dont le nom soit français. »
Mais rien ne doit étonner en cette terre des fééries. Tout y arrive, les gains les plus fantastiques, comme les désastres les plus complets.
Les prudents, entre les favorisés, partent pour ne plus revenir. Sans nulle vergogne, on peut faire charlemagne. Mais, ces sages, combien sont-ils ?
(Hector France, Monaco et la Côte d’azur)
Chercher une querelle d’Allemand
France, 1907 : Vouloir quereller quelqu’un sans raison et sans motif sérieux. Chercher une querelle d’Allemand ou une querelle d’ivrogne, c’est tout un. Les Allemands sont grands buveurs, ils le furent de tous temps, car Tacite leur en faisait le reproche : « Ce n’est pas une honte parmi eux, dit-il, de passer les jours et les nuits à boire : mais les querelles sout fréquentes chez eux comme parmi tous les ivrognes, et se terminent le plus souvent à coups d’épées. »
Clémentine
Rigaud, 1881 : Petite calotte de velours ou de drap qui ne couvre que le sommet de la tête.
Criblage, criblement
France, 1907 : Appel, cri.
Criblement
Ansiaume, 1821 : Aboi d’un chien.
Il y a des cabots en rompant, entends-tu leurs criblements ?
Diablement
d’Hautel, 1808 : Terme d’exagération qui signifie excessivement ; dans le plus haut degré.
Cet ouvrage est diablement dur. Pour, est excessivement pénible.
Donner un redoublement de fièvre
Delvau, 1866 : v. a. Révéler un nouveau méfait à la charge d’un accusé, — dans le même argot [des voleurs].
France, 1907 : Charger un accusé d’un nouveau délit.
Ébranlement
France, 1907 : Crainte, émotion, trouble.
Éléments
Rigaud, 1881 : Cartes préparées en vue d’une passe ; mot à mot : éléments de gain, — dans l’argot des grecs. Dans le monde des joueurs le mot : « éléments » désigne des ponteurs capables d’alimenter une partie. Faisons-nous un petit bac ? — Il n’y a pas d’éléments.
France, 1907 : Argent ; argot des grecs.
Emballement
France, 1907 : Emportement, entraînement subit et irraisonné.
Quelque emballement de femme curieuse qui s’aveugle et s’illusionne, un de ces coups de cœur ardents, irréfléchis qui sont souvent la dernière figure des cotillons de l’hiver et ont la durée d’un feu de paille.
(Colombine, Gil Blas)
Emblème
Larchey, 1865 : Mensonge, conte fait à plaisir. — Terme ironique inventé sans doute par un ennemi de l’allégorie mythologique dont le peuple comprend mal les finesses. —
Voyez quel emblème ! Sa nièce d’Angoulême Nous met tous à même.
(Decourcelle, 1832)
Emblêmir : Tromper (Vidocq).
Delvau, 1866 : s. m. Tromperie, — dans l’argot des voleurs.
France, 1907 : Tromperie. Une peinture allégorique était appelée autrefois emblémature.
Emblême
Vidocq, 1837 : s. f. — Tromperie.
(Le Jargon, ou Langage de l’Argot moderne)
Emblémer
Delvau, 1866 : v. n. Tromper.
Rigaud, 1881 : Tromper.
La Rue, 1894 : Tromper. Des emblèmes ! des mensonges !
France, 1907 : Tromper.
Emblêmer
Vidocq, 1837 : v. a. — Tromper.
(Le Jargon, ou Langage de l’Argot moderne)
Emblèmes (des)
France, 1907 : Expression d’incrédulité, synonyme de : Des dattes ! Casser des emblèmes, mentir.
Emblèmes (des) !
Delvau, 1866 : Se dit, — dans l’argot des faubouriens, — pour se moquer de quelqu’un qui se vante, qui ment, ou qui ennuie.
Rigaud, 1881 : Des mensonges !
Emblémir
France, 1907 : Tromper, mentir.
Engueulement
Larchey, 1865 : Bordée d’injures.
Vadé est le Démosthènes de l’engueulement.
(Catéch. poissard, 1844)
Delvau, 1866 : s. m. Injure de parole, — dans l’argot du peuple. Injure de plume, — dans l’argot des gens de lettres.
Rigaud, 1881 : Avalanche d’injures. Langage particulier aux dames des halles du temps jadis. Les bals masqués sont des écoles d’engueulement.
France, 1907 : Même sens que engueulade et engueulage.
Néanmoins, un rien l’arrête le long du chemin : parfois il regarde en badaud, soit des journaux ouverts à l’éventaire des librairies, soit une boutique nouvelle, soit un embarras de voitures provoquant un engueulement de cochers.
(Paul Pourot, Les Ventres)
Ensemblement
d’Hautel, 1808 : L’un avec l’autre ensemblement. Pour dire aller quelque part, faire quelque chose mutuellement avec quelqu’un
Entablement
Delvau, 1866 : s. m. Épaules, — dans l’argot des faubouriens.
France, 1907 : Épaules.
Entifflement
Vidocq, 1837 : s. m. — Mariage.
Entrolement
France, 1907 : Vol.
Estrangouillade, estrangouillement
France, 1907 : Acte d’étrangler.
— Tu as exploité jusqu’à plus soif les pauvres diables ; le moment est venu de dégorger une petiote part de ce que tu leur as barboté… Les conditions suivaient l’estrangouillement des deux morceaux de salé, si le papa ne carmait pas.
(Almanach du Père Peinard, 1894)
Faire Charlemagne
Delvau, 1866 : Se retirer du jeu après y avoir gagné, sans vouloir donner de revanche, — dans l’argot des joueurs, qui savent ou ne savent pas leur histoire de France. « Charlemagne (dit Génin en ses Récréations philologiques) garda jusqu’à la fin toutes ses conquêtes, et quitta le jeu de la vie sans avoir rien rendu du fruit de ses victoires ; » le joueur qui se retire les mains pleines fait comme Charlemagne : il fait Charlemagne :
Se non è vero… Je ne demande pas mieux d’en croire Génin, mais jusqu’ici il m’avait semblé que Charlemagne n’avait pas autant fait Charlemagne que le dit le spirituel et regrettable érudit, et qu’il y avait, vers les dernières pages de son histoire, une certaine défaite de Roncevaux qui en avait été le Waterloo. Et puis… Mais le chevalier de Cailly avait raison !
France, 1907 : À l’explication donnée au mot Charlemagne il faut ajouter celle-ci :
C’est une allusion à Charlemagne qui sut garder toutes ses conquêtes et qui quitta le jeu des batailles sans en avoir perdu une seule. Voici pourquoi on dit du joueur qui se retire les mains pleines : Il a fait charlemagne, comme, si l’on disait : Il a fait comme Charlemagne on bien encore il a fait le Charlemagne.
(Didier Loubens)
Finalement
d’Hautel, 1808 : Finalement enfin. Expression qui se dit à une personne dont la conversation impatiente, dont les histoires ne finissent pas, et pour la faire venir au résultat.
Flémard
Rigaud, 1881 : Paresseux, mou, lâche. — Flémer, paresser ; dérivés de flemme, mot du patois d’Auvergne acclimaté à Paris.
Ce flémard ne viendra pas aujourd’hui, parce qu’il a peur de moi ; c’est un lâche !
(L. Cladel, Ompdrailles)
Boutmy, 1883 : adj. Atteint de cette maladie qu’on appelle la flème. Le flémard se distingue du paresseux en ce qu’il n’est atteint du vice de ce dernier que par intermittences.
Flêmard
Merlin, 1888 : Paresseux.
Flêmard, flemmard
France, 1907 : Fainéant, paresseux qui fait son possible pour éviter tout travail et passe ses loisirs couché sur le dos.
Prise en tas, derrière les guichets cadenassés, les registres et les dossiers, la masse des employés de bureau ne devient plus qu’une jolie collection de flemmards, entachés de routine, figés d’entêtement, ayant tous cette devise : « Rien faire et laisser dire. »
(Mentor, Le Journal)
Flème
Larchey, 1865 : Paresse invincible. Un jour de flème est un jour où il est impossible de travailler.
Lundi, la flemm’ m’accroche !
(A. Cahen, Chansons)
En argot, battre sa flème veut dire flâner.
Boutmy, 1883 : s. f. Sans doute altération du mot flegme. Paresse passagère. Avoir la flème, c’est ne travailler qu’à contre-cœur. Cet état est fréquent dans tous les ateliers le lendemain des fêtes carillonnées ou non. Le mot — et surtout la chose — ne sont pas particuliers aux typographes.
Rossignol, 1901 : Ne pas avoir de courage au travail.
J’ai la flème, je ne vais pas à l’atelier.
Flême
Delvau, 1866 : s. f. Lassitude d’esprit et de corps, — dans l’argot des faubouriens, qui, sans s’en douter, emploient là un des plus vieux mots de notre langue. Qu’est-ce en effet que la flême, si ce n’est une exagération du flegme, sa conséquence même, comme la rêverie celle d’un tempérament lymphatique ? Or, dès le XIIe siècle, flegme s’écrivait flemme. Avoir la flême. Être plus en train de flâner que de travailler. Jour de flême. Où l’on déserte l’atelier pour le cabaret.
Merlin, 1888 : Paresse, ennui. — C’est aussi la sonnerie annonçant le repos pendant la journée, en été.
Flème, flemme
France, 1907 : Paresse nonchalance ; dérivé de flegme, qui s’écrivait autrefois flemme. Battre sa flemme, tirer sa flemme.
Bien souvent la flemme, la flemme,
Bien souvent la flemme me prend.
(Refrain d’atelier)
Rien n’est sacré pour un tapeur,
Pourvu qu’il tire sa flemme ;
Les refus ne lui font pas peur,
Ni les coups de bott’ de même.
(Héros-Cellarius)
Grâce sans doute aux approches du renouveau, Alphonsine Giresse traversait une période de flemme, de noce et de vadrouille, qui menaçait de s’éterniser. Elle arrivait au bureau à des heures déclarées « impossibles » par la doyenne…
(Albert Cim, Demoiselles à marier)
Vidocq prit la parole.
— En voilà des fainéants ! s’écria-t-il, si vous avez tous la flemme, je vais y aller, moi, chez votre négociante. Je ne vous demande qu’une chose, c’est de me donner son adresse.
(Marc Mario et Louis Launay)
Flémer
Boutmy, 1883 : v. intr. Ne pas travailler ; flâner.
France, 1907 : Avoir la flemme.
Flemme
Rigaud, 1881 : Paresse. — Paresseux.
Tas de flemmes ! va ! pas même l’courage d’s’déranger pour venir boire un coup !
(Grévin)
La Rue, 1894 : Paresse, flânerie.
Virmaître, 1894 : Maladie que la plupart des ouvriers ont les lundis. On dit : battre une flemme (Argot du peuple).
Bien souvent la flemme, la flemme.
Bien souvent la flemme me prend.
En hiver comme en été,
Elle ne m’a jamais quitté.
Hayard, 1907 : Fainéant.
Gambillement
Ansiaume, 1821 : Danse.
Je préfère une rouillarde de Bordeaux à tous vos gambillements.
Garidelle (lém.)
France, 1907 : Rouge-gorge.
Gentleman
Delvau, 1866 : s. m. Homme d’une correction de langage et de manières à nulle autre pareille, — dans l’argot des gandins. On dit aussi Parfait Gentleman, mais c’est un pléonasme, puisqu’un Gentleman qui ne serait pas parfait ne serait pas gentleman.
France, 1907 : Homme bien élevé ; anglicisme.
Un gentilhomme peut ne pas être un gentleman.
Gentleman-rider
France, 1907 : Homme du monde qui monte dans les courses ; du verbe anglais to ride, monter à cheval. Les membres du Jockey-Club et les officiers de cavalerie ont seuls le droit de monter dans les courses des gentlemen-riders.
Gentlemen
France, 1907 : Pluriel de gentleman.
Jérusalem (lettre de)
Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Missive, annonce, commission qui a pour but de donner un faux avis.
Vidocq, 1837 : s. f. — (Voir Lettre de Jérusalem.)
Rigaud, 1881 : Lettre écrite de prison.
France, 1907 : Lettre écrite d’une prison pour demander des secours d’argent. Argot des voleurs. La Préfecture de police et par conséquent la prison adjacente se trouvait autrefois dans la rue de Jérusalem.
Jouer de la flûte de l’Allemand
France, 1907 : Boire abondamment, à cause des verres longs et étroits dont les Allemands se servaient autrefois pour boire de la bière et qu’on appelle flûtes. « Comme, dit Fleury de Bellingen, ils vuident souvent et qu’ils boivent beaucoup, on dit en commun proverbe : jouer de la flûte de l’Allemand, quand on veut dire boire avec excès. »
Lem
Delvau, 1866 : Désinence javanaise, — mais d’un javanais spécial aux saltimbanques, et quelquefois aussi aux voleurs. Parler en lem. Ajouter cette syllabe à tous les mots pour les rendre inintelligibles au vulgaire. On dit aussi Parler en luch — et alors on remplace lem par luch.
Lem (parler en)
Larchey, 1865 : Soumettre chaque substantif à l’emploi d’une même syllabe finale et à la transposition de deux lettres. On peut ainsi parler un français inintelligible pour les profanes. Ce système consiste : 1o à ajouter la syllabe lem à chacun des mots qui viennent à la bouche ; 2o à troquer la lettre l de lem contre la première lettre du mot qu’on prononce.
Et alors que tous les trucs seront lonbem (bons).
(Patrie du 2 mars 1852)
On parle en luch comme en lem. On combine quelquefois les deux.
France, 1907 : Ajouter cette syllabe à tous les mots pour rendre la conversation inintelligible aux pantes en mettant la lettre l au commencement du mot, à la place de la première lettre de ce mot que l’on transporte à la fin suivi de la syllabe em ; ex. : loupsem, soupe.
Lemmefuche
Hayard, 1907 : Femme.
Lempe
M.D., 1844 : Drap de lit.
Lettre de Jérusalem
Delvau, 1866 : s. f. Escroquerie par lettre, dont Vidocq donne le détail aux pages 241-253 de son livre.
France, 1907 : Escroquerie par lettre. Elle est ordinairement écrite par un détenu qui cherche à soutirer de l’argent. Le dépôt de la préfecture de police, d’où ces lettres partaient généralement, se trouvait autrefois rue de Jérusalem.
Lettres de Jérusalem
Vidocq, 1837 : Les évènemens de notre première révolution ont donné naissance aux Lettres de Jérusalem ainsi qu’aux Vols à la Graisse et à plusieurs autres. De la fin de 1789 à l’an VI de la république, des sommes très-considérables, résultats de Lettres de Jérusalem, sont entrées dans les diverses prisons du département de la Seine, et notamment à Bicêtre. En l’an VI, il arriva dans cette dernière prison, et dans l’espace de deux mois, plus de 15,000 francs.
Voici quelle était la manière de procéder des prisonniers qui voulaient faire un arcat, c’est-à-dire escroquer de l’argent à une personne au moyen d’une Lettre de Jérusalem. Ils se procuraient les adresses de plusieurs habitans des départemens, et, autant que possible, ils choisissaient ceux qui regrettaient l’ancien ordre de choses, et qu’ils croyaient susceptibles de se laisser séduire par l’espoir de faire une opération avantageuse ; on adressait à ces personnes une lettre à-peu-près semblable à celle-ci.
Monsieur,
Poursuivi par les révolutionnaires, M. le vicomte de ***, M. le comte de ***, M. le marquis de ***, (on avait le soin de choisir le nom d’une personne connue et récemment proscrite), au service duquel j’étais en qualité de valet de chambre, prit le parti de se dérober par la fuite à la rage de ses ennemis ; nous nous sauvâmes, mais suivis pour ainsi dire à la piste, nous allions être arrêtés lorsque nous arrivâmes à peu de distance de votre ville ; nous fûmes forcés d’abandonner notre voiture, nos malles, enfin tout notre bagage ; nous pûmes cependant sauver un petit coffre contenant les bijoux de Madame, et 30 000 fr. en or ; mais, dans la crainte d’être arrêtés nantis de ces objets, nous nous rendîmes dans un lieu écarté et non loin de celui où nous avions été forcés de nous arrêter ; après en avoir levé le plan, nous enfouîmes notre trésor, puis ensuite nous nous déguisâmes, nous entrâmes dans votre ville et allâmes loger à l’hôtel de ***. Nous nous informâmes en soupant d’une personnes à laquelle on pût, au besoin, confier des sommes un peu fortes ; nous voulions charger cette personne de déterrer notre argent, et de nous l’envoyer par petites parties au fur et à mesure de nos besoins, mais la destinée en ordonna autrement. Vous connaissez sans doute les circonstances qui accompagnèrent l’arrestation de mon vertueux maître, ainsi que sa triste fin. Plus heureux que lui, il me fut possible de gagner l’Allemagne, mais bientôt assailli par la plus affreuse misère, je me déterminai à rentrer en France. Je fus arrêté et conduit à Paris ; trouvé nanti d’un faux passeport, je fus condamné à la peine des fers, et maintenant, à la suite d’une longue et cruelle maladie, je suis à l’infirmerie de Bicêtre. J’avais eu, avant de rentrer en France, la précaution de cacher le plan en question dans la doublure d’une malle qui, heureusement, est encore en ma possession. Dans la position cruelle où je me trouve, je crois pouvoir, sans mériter le moindre blâme, me servir d’une partie de la somme enfouie près de votre ville. Parmi plusieurs noms que nous avions recueillis, mon maître et moi, à l’hôtel, je choisis le vôtre. Je n’ai pas l’honneur de vous connaître personnellement, mais la réputation de probité et de bonté dont vous jouissez dans votre ville, m’est un sûr garant que vous voudrez bien vous acquitter de la mission dont je désire vous charger, et que vous vous montrerez digne de la confiance d’un pauvre prisonnier qui n’espère qu’en Dieu et en vous.
Veuillez, Monsieur, me faire savoir si vous acceptez ma proposition. Si j’étais assez heureux pour qu’elle vous convint, je trouverais les moyens de vous faire parvenir le plan, de sorte qu’il ne vous resterait plus qu’a déterrer la cassette ; vous garderiez le contenu entre vos mains ; seulement vous me feriez tenir ce qui me serait nécessaire pour alléger ma malheureuse position.
Je suis, etc.
P. S. Il n’est pas nécessaire de vous dire qu’une affaire semblable à celle que je vous propose doit être faite avec la plus grande discrétion ; ainsi, dans votre réponse, qui devra passer par le greffe de la prison avant de m’être remise, bornez-vous, seulement à me répondre, oui, ou non.
Toutes les Lettres de Jérusalem étaient calquées sur le même modèle, et tous les jours il en sortait, des prisons de la Seine, une très-grande quantité ; sur dix, sur vingt même, une tombait entre les mains d’un individu qui, par bonté d’ame, ou dans l’espoir de s’approprier tout ou partie du trésor, voulait bien se charger de la commission, et qui répondait au prisonnier. (C’est ici le lieu de faire remarquer que ce n’était jamais à celui qui avait monté l’arcat que la réponse était adressée ; un autre prisonnier était chargé de figurer, c’est-à-dire, de représenter, au besoin, le domestique infortuné du comte ou du marquis.)
Lorsque la réponse du Pantre était parvenue à l’Arcasineur, il s’empressait de lui écrire qu’il bénissait le ciel qui avait bien voulu permettre que la première personne à laquelle il s’était adressé, fût assez bonne pour compâtir à ses peines ; il était prêt, disait-il, à lui envoyer le plan qui devait le guider dans ses recherches ; mais pour le moment cela lui était impossible, attendu que, pour subvenir à ses premiers besoins, il avait été forcé de mettre sa malle, et tout ce qu’elle contenait, entre les mains d’un infirmier, en garantie d’une somme de… (la somme était toujours en rapport avec la fortune présumée de l’individu auquel on s’adressait.) Mais pourtant, ajoutait en terminant l’Arcasineur, si vous voulez avoir l’extrême complaisance de m’envoyer la somme due par moi à l’infirmier, je vous enverrai de suite le plan, et toutes les indications qui vous seraient nécessaires. La cupidité exerce un tel empire sur la plupart des hommes, que, presque toujours, le prisonnier recevait la somme qu’il avait demandée ; il arrivait même que, par excès de complaisance ou de précaution, le Sinve l’apportait lui-même, ce qui ne l’empêchait pas de subir le sort du commun des martyrs.
Les Lettres de Jérusalem ne sont pas mortes avec les circonstances qui les avaient fait naître ; tous les jours encore, des arcats sont montés dans les prisons, et l’audace des Arcasineurs est si grande, qu’ils ne craignent pas de s’adresser à des individus qui doivent, par le fait seul de leurs relations antérieures, connaître leurs us et coutumes ; cela est si vrai, qu’un Arcasineur m’adressa, il y a peu de temps, la lettre suivante :
Toulon, le 14 novembre 1835.
Monsieur,
J’ai fait du bien ; qu’il est doux, ce mot ! Ce mot renferme des pages entières, des volumes même. Un bienfait n’est jamais perdu. Quoi ! le bienfaiteur désintéressé a-t-il besoin de récompense ? Non ! Il est trop payé, s’il est humain et généreux, par cette satisfaction qui énivre les ames sensibles après un bienfait.
Telle j’étais, Monsieur, à votre égard, lors de votre évasion de Toulon, et votre nom m’eût été toujours inconnu, sans mon petit-fils, dans les mains duquel se trouvait votre biographie en me faisant le récit de cette aventure, me mit à même de connaître le nom de l’individu auquel je m’étais intéressée. Il me restait cependant le doute que vous ne fussiez tel que je le souhaitais, ce qui aurait pu attirer sur moi la divine réprobation et l’exécration des hommes. Mais l’aveugle confiance que vous eûtes en moi en était un sûr garant ; et je me disais : le coupable endurci n’aime que la nuit, le grand jour l’épouvante. Enfin le ciel même parut me l’attester, quand il vint lui-même à votre secours, et vous offrit, par le moyen de l’enterrement, la voie de salut que vous me demandâtes, et que, par un excès d’humanité, je vous promis. Pourquoi donc, Monsieur, après votre aveu et votre prière : Sauvez-moi, ame sensible, Dieu vous on tiendra bon compte, ne continuâtes-vous pas à me dire : Vous sauvez un malheureux qui n’a pas trempé dans le crime dont il a été accusé, et qui l’a plongé dans l’abîme dont il est si difficile, mais non impossible de se relever ! Cette déclaration aurait redoublé en moi l’intérêt qui me portait à vous aider, et aurait laissé en moi cette sécurité, et cette satisfaction que l’on éprouve à la suite d’un bienfait qui est ignoré de tout le monde. Mais, hélas ! comme les temps sont changés, depuis lors, pour nous ! Vous, en butte alors à la plus cruelle destinée, manquant de tout, obligé à fuir la société des hommes, et moi qui menais une vie paisible, quoique veuve d’un maître marin mort au service du roi Louis XVI, par le moyen d’un modique commerce, et une conscience pure, qui me mettait, ainsi que mes deux demoiselles en bas âge, à l’abri des premiers besoins.
Depuis que cette faible ressource m’a manqué, n’en ayant pas d’autres, je n’ai fait que languir.
Atteinte une des premières par le choléra je croyais toucher à la fin de mes maux, mais le ciel en a disposé autrement. La volonté de Dieu soit faite. Dieu a voulu m’épargner en prolongeant mon existence ; Dieu y pourvoira.
Je souhaite, Monsieur, que Dieu continue à prospérer vos affaires, et que vous soyez toujours le soutien des malheureux.
Agréez, Monsieur, les sentimens de ma considération, avec lesquels je suis,
Votre dévouée servante,
Geneviève Peyron, Ve Diaque.
Rue du Pradel, 19.
Voici en quels termes je répondis à cette lettre ; car, quoique bien convaincu qu’elle n’émanait pas de la personne qui m’avait rendu l’important service de favoriser mon évasion, mais bien de quelque Arcasineur pensionnaire du bagne de Toulon, qui avait appris la circonstance qu’il me rappelait, par mes Mémoires, je ne voulais pas, si contre toute attente mes prévisions étaient fausses, m’exposer à manquer de reconnaissance.
« Je serais mille fois heureux, Madame, si le hasard me faisait retrouver la femme qui m’a si généreusement aidé, à Toulon, lors de mon évasion ; je suis tout prêt à reconnaître, comme je le dois, ce qu’elle a fait pour moi, mais je ne veux point m’exposer à être dupe.
Ce que vous me dites, Madame, me prouve jusqu’à l’évidence que vous n’êtes pas la femme généreuse qui me procura les moyens de sortir de la ville de Toulon, et que vous ne connaissez cette circonstance de ma vie que par la lecture de mes Mémoires. Au reste, si vous êtes réellement la personne en question, vous pouvez aisément m’en donner la preuve, en me rappelant un incident qui m’arriva lorsque j’étais chez vous ; incident que la mémoire la moins locale ne peut avoir oublié ; si vous pouvez faire ce que je vous demande, je suis prêt à vous envoyer 500 fr., et même plus, etc., etc. »
L’Arcasineur ne se tint pas pour battu, et il me répondit en ces termes :
Toulon, le 30 novembre 1815.
Monsieur,
Il sied à la bienséance de répondre à une honnête missive, mais il n’est pas permis d’humilier les personnes.
Née dans une classe médiocre, appartenant à des parens dont l’honneur et la probité ont été les idoles, j’ai su répondre à leur attente, et me mériter, par une conduite toujours exempte de blâme, l’estime publique. Quoique illettrée, la nature m’a douée de ce tact qui tient lieu d’éducation soignée, et qui nous met à même de juger du procédé d’une personne. Mon petit-fils, né dans un siècle plus heureux que le mien, quant à l’instruction, a été choisi par moi pour être l’organe de mes pensées, et l’interprète de mes sentimens.
Oui, monsieur, je l’avouerai sans réserve, la tournure de votre lettre, et vos phrases ont tellement blessé mon amour-propre, que j’en ai été indignée. Vous eussiez beaucoup mieux fait de ne pas répondre que de m’offenser, et réserver votre manière de rédiger pour des ames basses et vénales. Cependant, un seul de vos paragraphes a mérité toute mon attention, et m’a paru être le plus fondé : c’est la crainte d’être trompé. J’ai apprécié vos doutes, et je les ai même admis. Mais, d’ailleurs, m’examinant attentivement, comment admettre en moi de pareilles idées, et supposer en moi un subterfuge, m’écriai-je au fond de l’ame, m’attachant à la ligne au contenu de ma lettre ! Demandait-elle une reconnaissance pécuniaire ? Contenait-elle un emprunt ? Exigeait-elle un sacrifice ? Non ! rien de tout cela. Elle ne contenait que l’épanchement sincère d’une ame sensible en apprenant l’heureux changement de votre sort ; et si la comparaison de nos destinées en différentes époques a été interprétée pour une demande quelconque, je la repousse de toutes mes forces, et hautement je m’écrie : mieux vaut mourir que s’humilier.
Quant à la preuve convaincante que vous me demandez, afin de reconnaître si je suis la personne en question, je répugnerais à la donner, précisément parce qu’elle a pour but la proposition d’une somme, si ce n’était une satisfaction personnelle. Je vous observerai donc que, soit vous, soit un autre individu auquel soit arrivé un pareil accident, vous ne fûtes jamais chez moi, n’ayant pu faire, sans me compromettre ; que le court entretien dans lequel je vous fis espérer les moyens de sortir, eut lieu publiquement, et que la circonstance et l’incident dont vous me parlez, me sont aussi inconnus que le Phénix. Et qu’enfin, n’ayant jamais joué, pendant ma vie, quoique orageuse, que des rôles honorables, je ne commencerai pas à l’hiver de mon âge à démentir mes sentimens.
J’ai l’honneur d’être,
Monsieur
Votre servante,
Genièvre Peyron, Ve Diaque.
Je ne voulus point prendre la peine de répondre à cette seconde missive. J’engage toutes les personnes qui en recevraient de semblables à suivre mon exemple.
Malemort
d’Hautel, 1808 : Cet homme mourra de malemort. Pour finira mal, aura une fin funeste.
Mèche (roulement de)
France, 1907 : Roulement de tambour qui annonce la reprise du travail ; argot de l’École navale.
Mens agitat molem
France, 1907 : « ’esprit meut la matière. » Dicton tiré de l’Énéide de Virgile.
Le poète, riche de ses illusions, n’est jamais seul dans la nature. Pour lui, le mens agitat molem, l’esprit animant la matière, est pris au sérieux.
(Le Pelletier de la Sarthe)
Moule aux guillemets
Delvau, 1866 : s. m. C’est l’Huile de cotrets des troupiers.
Mufleman
Rigaud, 1881 : Mufle ; tournure anglaise donnée à ce mot.
Elle conservait en même temps Alfred, un mufleman de la pire espèce.
(Huysmans, les Sœurs Vatard)
Parlement
d’Hautel, 1808 : C’est un parlement sans vacances. Se dit par mépris d’un homme qui ne décesse de parler, d’un grand babillard, d’un par leur éternel.
Rigaud, 1881 : Langue. — Ouvrir le parlement, faire l’ouverture du parlement, parler.
France, 1907 : Bavardage. Parlement sans vacances, bavard insupportable. Ouvrir le parlement, commencer à bavarder. « Dès que la vieille ouvre le parlement, elle n’en finit plus. »
Parlement n’a presque jamais dansé sans viole
France, 1907 : Vieux dicton dont Gaignères donne ainsi l’explication.
La famille de Violle est assez ancienne dans le Parlement de Paris, et il y eu jusqu’à dix ou douze conseillers en divers temps. Depuis l’an 1506 que Jean Viole y fut reçu, Pierre en 1522, Jacques en 1543, Guillaume en 1550, Claude en 1553, Jacques en 1574, Nicolas en 1575, Nicolas en 1596, Jacques en 1604, Pierre en 1625, Pierre en 1642, et autres, ce qui, par allusion au nom de Viole, a fait dire que le Parlement n’a presque jamais dansé sans Viole, à cause qu’il y en a eu beaucoup dans cette cour.
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