Os

Os

d’Hautel, 1808 : Il est rongé jusqu’aux os. Se dit d’un homme rempli de vermines, ou qui a quelque maladie honteuse et secrète qui le mine.
Donner un os à ronger à quelqu’un. Lui susciter une mauvaise querelle ; ou l’embarrasser dans une mauvaise affaire ; l’amuser, détourner son attention.
Les os sont pour les absens. Voyez absent.
Elle n’a que la peau sur les os. Se dit d’une personne fort maigre.
Il ne fera pas de vieux os. Pour, son existence ne sera pas longue, il mourra bientôt.
Jeter un os à la gueule de quelqu’un. Voyez chien.
Il n’y a pas de viande sans os. Dicton des bouchers de Paris, quand leurs pratiques se plaignent du trop grand poids des os qu’ils donnent, et qui signifie qu’il faut que tout passe ensemble.

Larchey, 1865 : « Dans la langue populaire parisienne, on appelle os le numéraire. » — Mornand. — « Il faut cependant que je lui donne de l’os. » — Lynol. — Pourquoi ne dirait-on pas au figuré, de l’os, comme on dit du nerf, pour désigner aussi l’argent ?

Delvau, 1866 : s. m. Argent, or, monnaie, — dans l’argot des faubouriens. Avoir l’os. Être riche.

La Rue, 1894 : Argent, monnaie. Avoir de l’os ou avoir l’os signifie aussi courage, énergie, force, moelle.

Virmaître, 1894 : Argent, or ou monnaie.
— J’ai de l’os à moelle dans ma poche (plusieurs pièces de cent sous) (Argot du peuple).

France, 1907 : Argent. Ce terme vient évidemment des maisons de jeu où la mise des joueurs est représentée par des jetons en os. « Je n’ai plus d’os », c’est-à-dire je n’ai plus de jetons, et par conséquent d’argent.

— Y ne manque pas d’aplomb, ce vieux, de vouloir essayer d’enjôler les filles : plus de cheveux, plus de dents, une sale trombine… Si encore il avait de l’os !

(René de Nancy)

L’soir on rencontr’ plus d’un’ fripouille
Extra muros
Qui vous assomme et vous dépouille
De votr’ pauvre os…
C’est pas la pein’ d’app’ler du monde
D’vos cris plaintifs :
Y a qu’l’écho qui nous réponde
Sur Les fortifs.

(Victor Meusy)

Os (à bon chien n’échet bon)

France, 1907 : Dicton plein d’amertume et qui malheureusement est trop souvent vrai, car il se rencontre chez tous les peuples. « Toutes les règles peuvent varier, dit Sydney Smith, mis celle-ci est la seule que vous trouverez sans exception, dans ce monde, la rétribution ou la récompense est toujours en raison inverse des devoirs accomplis. » Luck in all, chance dans tout, disent les Anglais. Et ils ajoutent :

The more rogue the more luck.
The devil’s children have the devil’s luck.

« Plus on est coquin, plus on a de chance. Les enfants du diable ont la chance du diable. »
Le plus mauvais cochon attrape le meilleur grain (al mas rum puerco la mejor bellota), disent les Espagnols.
C’est la transformation du vieil adage latin : Fortuna favet fatuis, « la fortune est favorable aux sots ». Les Allemands disent : « La fortune et les femmes aiment les fous » (Glück und Weiber haben die Narren lieb).

Os (avoir de l’)

Hayard, 1907 : Avoir de l’argent.

Os (de l’)

Rigaud, 1881 : De l’argent.

Os (jamais belle chair ne fut près des)

France, 1907 : Femme trop maigre n’est jamais belle.

Os (point de viande sans)

France, 1907 : Il n’y a point de joie sans mélange, de satisfaction complète, d’avantage sans déduction. Cette locution provient de ce que les bouchers donnent toujours des os avec la viande qu’on leur achète.

Os à moelle

Rigaud, 1881 : Nez. — Faire juter l’os à moelle, se moucher avec le mouchoir de ses cinq doigts. Les voyous disent aussi : « faire dégorger son ulcère. »

Merlin, 1888 : Grande flûte traversière.

Fustier, 1889 : Lorgnette.

France, 1907 : Lorgnette. Allusion au membre viril.

France, 1907 : Nez ; se dit aussi du membre viril. Faire juter l’os à moelle, se servir de ses doigts comme de mouchoir de poche ; se masturber.

Os de boudin

France, 1907 : Rien, chose qui n’existe pas, la composition des boudins excluant l’emploi des os ; patois du Centre.
S’en aller en os de boudin, tomber à rien. On dit ailleurs, dans le même sens, s’en aller en eau de boudin.

Os de l’avocat

France, 1907 : Os de l’éclanche de mouton qui contient beaucoup de moelle. On l’appelait ainsi à cause de la réputation de gourmands et de pigne-assiette qu’avaient autrefois les avocats, ainsi qu’en témoigne ce dicton :

Les avocats
Sont des lèche-plats.

Cette expression vient peut-être aussi de ce qu’ils tiraient toute la moelle des procès.

Os de mouton

La Rue, 1894 : Arme dite coup de poing.

France, 1907 : Sorte de coup de poing américain

Os du maître clerc

France, 1907 : Prolongement de l’os du gigot. Cette expression est vieillie comme la précédente.

Osanore, osselet

Rigaud, 1881 : Dent. — Jouer des osanores, manger.

Osanores

France, 1907 : Dents. Argot des dentistes passé dans le peuple. Les osanores sont, à proprement parler, des dents artificielles fixées dans des râteliers sans or. Le mot est forme d’os et or, séparés par le préfixe grec an, sans ; littéralement, os sans or.

Oseille

Rigaud, 1881 : Argent, — dans le jargon des voleurs. C’est le mot os doté de la terminaison eille.

Les frangins auraient plutôt acheté quatre exemplaires, au lieu d’un, afin de remettre de l’oseille dans ton porte-monnaie !

(Le petit Badinguet, 1878)

La Rue, 1894 : Argent.

Virmaître, 1894 : La faire à l’oseille. Jouer un tour désagréable à quelqu’un. A. D. Il attribue ce mot à un cabotin habitué d’une petite gargote de la rue de Malte où mangeaient les artistes des théâtres du boulevard et du Temple. Selon lui, ce mot date de 1861 environ. Comme cette locution : la faire à l’oseille est très répandue, il est bon de rétablir son origine. Le petit père Vinet, mort il y a deux ans dans un taudis de la rue de Tourtille, à Belleville, était vers 1840 un chansonnier en vogue. Il avait été sauvage au Caveau des Aveugles, au Palais-Royal, avant le père Blondelet ; il mangeait dans la gargote citée par Delvau. La gargote était non rue de Malte, mais rue de la Tour. Un après-déjeuner, il composa une chanson intitulée : Vous me la faites à l’oseille. Bouvard, l’homme à la vessie la chantait encore en 1848, place de la Bastille. Voici un couplet de cette chanson :

Comme papa j’suis resté garçon
Pour bonne j’ai pris Gervaise.
Elle est maîtresse à la maison
Je la trouve mauvaise
De la cave au grenier
La danse du panier
Que c’est une merveille.
Elle mange à son goût
Mes meilleurs ragoûts.
Vous me la faites à l’oseille.


Comme on le voit, il y a plus de cinquante ans que l’on connaît cette expression (Argot du peuple). N.

Virmaître, 1894 : Argent (Argot du peuple). V. Aubert.

Rossignol, 1901 / Hayard, 1907 : Argent.

France, 1907 : Argent. Il fond dans la main comme l’oseille dans la casserole.

Mais, nom de Dieu ! mince d’purée !
C’est dégoûtant c’que nous cachons :
Des nentill’s, des pois en purée
Et d’l’eau grass’ comme à des cochons,
Vrai, j’m’enfil’rais ben un’ bouteille ;
À présent qu’t’es sorti d’là-bas,
Envoy’-moi donc un peu d’oseille,
À Mazas.

(Aristide Bruant)

Oseille (avoir mangé de l’)

Rigaud, 1881 : Être de mauvaise humeur, montrer de l’aigreur ; allusion à l’acidité de l’oseille.

France, 1907 : Être de mauvaise humeur.

Oseille (la faire à l’)

Virmaître, 1894 : Réussir un bon vol qui a été bien nourri. Sûrement c’est la faire à l’oseille à celui qui a été dévalisé. Les voleurs sont quelquefois facétieux (Argot des voleurs).

France, 1907 : Se moquer de quelqu’un ; le duper. « Vous me la faites à l’oseille. »

L’expression, dit Delvau, sort d’une petite gargote de cabotins de la rue de Malte, derrière le boulevard du Temple. La maîtresse de cette gargote servait souvent à ses habitués des œufs à l’oseille, où il y avait souvent plus d’oseille que d’œufs. Un jour, elle servit une omelette — sans œufs. — « Ah ! cette fois, tu nous la fais trop à l’oseille », s’écria un cabotin. Le mot circula dans l’établissement, puis dans le quartier ; il est aujourd’hui dans la circulation générale.

Oseille (la fourre à l’)

Hayard, 1907 : Essayer de tromper.

Oseille (scène de l’)

Rigaud, 1881 : Scène où l’on exhibe le bataillon des femmes décolletées, dans une féerie ou autre pièce de même moralité. Oseille est là comme variante de persil. On a dit scène de l’oseille comme on aurait dit scène du persil, c’est-à-dire scène de la retape. (V. ces mots.)

Oseille (scènes de l’)

France, 1907 : Scènes où les figurantes font leur apparition en costume suggestif, c’est-à-dire avec le moins de costume possible. On sait que l’oseille crue fait venir l’eau à la bouche, c’est sans doute une allusion à cette particularité salivaire.

Osier

d’Hautel, 1808 : Pliant comme l’osier. Homme bas et souple, prêt à s’humilier aux moindres occasions.

Osse

France, 1907 : Cheville de fer qui traverse le bout du moyeu pour empêcher la roue de sortir.

Osselet

La Rue, 1894 : Dents.

Osselets

Delvau, 1866 : s. m. Les dents, — dans l’argot des voleurs.

Virmaître, 1894 : Les cinq doigts. Les gamins jouent un jeu qui se nomme osselet avec des os de pied de mouton (Argot du peuple). V. Apôtres.

Rossignol, 1901 : Voir abatis.

France, 1907 : Dents.

Osselets (les)

Hayard, 1907 : Les doigts.

Ossian

France, 1907 : Bonnet de coton ; argot de l’École polytechnique, du nom d’un ancien directeur des études, Ossian Bonnet.

L’ossian sert ordinairement à essuyer les rasoirs ; mais son utilité principale est de servir de cagoule à ceux qui se déguisent et de masque excellent à ceux qui, le soir, veulent faire du tapage dans les corridors… Percé de deux trous à la hauteur des yeux et d’un autre pour la bouche, enfoncé jusqu’au cou, l’ossian rend absolument méconnaissable.

(Albert Lévy et G. Pinet)

Ost

d’Hautel, 1808 : Armée. Si l’ost savoit ce que fait l’ost, l’ost battroit l’ost. Vieux proverbe qui signifie que si un général savoit l’état, les desseins, les démarches de son ennemi, il lui seroit facile d’en venir à bout, de le vaincre.

Ostau

France, 1907 : Voir Hostau.

Osto

d’Hautel, 1808 : Mot baroque qui signifie maison, ménage, son chez soi.
Aller à l’osto ; revenir à l’osto. Pour aller à la maison, retourner chez soi.

Rossignol, 1901 : Salle de police.

Hayard, 1907 : Prison.

Ostot

un détenu, 1846 : Asile, maison, chambre, demeure.

Ostrogoth

d’Hautel, 1808 : Mot injurieux qui signifie sot, ignorant, imbécile ; homme qui ignore les coutumes et les bienséances que l’on pratique en société.

Delvau, 1866 : (on prononce Ostrogo) s. m. Importun ; niais, — dans l’argot du peuple.


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique