d’Hautel, 1808 : Il a reçu sa paye, on lui a donné sa paye. Se dit d’un enfant auquel on a infligé quelque correction ; que l’on a maltraité, battu.
Paye
Paye
Paye (bonne)
Larchey, 1865 : Débiteur solvable.
Une lorette très-mauvaise paye.
(Ed. Lemoine)
Payent l’amende (les battus)
France, 1907 : Cette vielle et amère boutade de la sagesse des nations a malheureusement été vraie à toutes les époques et l’est trop souvent encore aujourd’hui. Le faible, le miséreux, les pauvres gens que l’adversité accable sont punis comme des coupables. On emprisonne parce qu’on n’a pas de gite, parce qu’on est pauvre, parce qu’on a faim, Au moyen âge, cette expression n’avait rien de figuré. C’était la réalité même. On vidait un différend par les armes. Le juge prononçait qu’il échéait gage de bataille, et les deux parties allaient plaider leur cause en champ clos sous les yeux du juge. Les nobles combattaient avec l’épée, les vilains se servaient du bâton. La victoire prouvait le droit ; la raison du plus fort était la meilleure. « Quand, dit Didier Loubens, les contestations reposent sur des matières criminelles, le vaincu, s’il ne succombait pas sous l’arme de son adversaire, était livré au bourreau pour avoir la main coupée… Lorsque, au contraire, elles appartenaient à des matières civiles, le vaincu et les témoins qui avait pris son parti se rachetaient de la peine encourue par la défaite en payant une amende plus ou moins forte comme satisfaction au vainqueur, de là le proverbe : « Les battus payent l’amende. » Bon vieux temps ! Le duel n’est qu’un restant de cet âge de barbarie. »
Payer
d’Hautel, 1808 : Adieu, porte-toi bien ; je payerai le médecin. Plaisanteries, goguettes populaires, usitées en se séparant de gens avec lesquels on est très-familier.
Il veut tout savoir et ne rien payer. Se dit d’un investigateur, d’un curieux fort avare.
Payer ric à ric. Se faire tirer l’oreille pour payer une somme ; la payer par petits à comptes.
Il payera les pots cassés. Signifie qu’on fera retomber sur quelqu’un le dommage survenu dans une affaire.
Tant tenu, tant payé. Pour dire qu’on ne doit payer un ouvrier qu’à proportion du temps qu’on l’a employé.
Payer en monnoie de singe, en gambades. Signifie se moquer de celui à qui l’on doit.
Payer bouteille, pinte, chopine, demi-setier. Pour dire payer à boire à quelqu’un.
Fustier, 1889 : Argot des lycées. S’exonérer, au moyen d’une exemption, d’un satisfecit, d’une punition encourue. Payer ses arrêts, sa retenue. Sortie payante, sortie de faveur accordée à relève qui remet en paiement une ou plusieurs exemptions que son travail, sa bonne conduite lui ont fait obtenir.
Depuis longtemps, la France a protesté contre les sorties dites payantes ou de faveur et contre les punitions actuellement en vigueur.
(France, 1881)
La Rue, 1894 : Faire, accomplir. Être condamné. Avoir payé, avoir subi des condamnations, faire payer, condamner.
Payer (se)
Delvau, 1866 : v. réfl. S’offrir, se donner, se procurer, — dans l’argot des petites dames et des faubouriens. Se payer un homme. Avoir un caprice pour lui. Se payer une bosse de plaisir. S’amuser beaucoup.
Rigaud, 1881 : Se passer une fantaisie.
France, 1907 : Se passer une fantaisie. « Voilà une petite femme que je me payerais volontiers. »
Hue ! nom de Dieu !… v’là qu’ j’ai l’hoquet !
Ça s’rait du prop’ que j’dégobille ;
Si j’trouve encore un mastroquet
D’ouvert, je m’ paye eun’ petit’ fille,
Ça m’débarbouill’ra l’cœur et pis
D’abord, ej’suis rond comme un disque,
J’m’arrondirai pas pus que j’suis.
(Aristide Bruant, Dans la Rue)
Payer au marc le franc
France, 1907 : Répartir une somme entre les créanciers proportionnellement à ce qui est dû à chacun.
Payer bouteille
Delvau, 1866 : Offrir à boire chez le marchand de vin. Argot des ouvriers.
Payer de toupet
France, 1907 : Faire un coup d’audace.
Babylas, le cantinier, surprend sa femme en conversation animée avec un jeune conscrit.
Celui-et paie de toupet.
— Venez vite, cantinier, votre femme se trouve mal.
— Mais vous, espèce de bleu, vous avez l’air de la trouver bien.
(La Baïonnette)
Payer en monnaie de singe
France, 1907 : Saint Louis avait toujours besoin d’argent : il rendit une ordonnance soumettant à un droit de péage tout animal entrant dans Paris. Les bateleurs qui presque tous possédaient des singes pour amuser le public dans leurs parades, cherchèrent naturellement à esquiver ce nouvel impôt. Ils s’arrêtaient donc aux barrières et faisaient danser et grimacer leurs singes devant les commis du fisc, qui, pour les récompenser de ce spectacle, les faisaient passer sans payer. Cet usage était tellement enraciné que Louis IX établit un tarif réglant à ce sujet les droits de péage : « Si le singe est à un joueur, celui-ci le fera jouer devant le péager, qui sera tenu de se contenter de cette monnaie x» ; au cas contraire, il payait 4 deniers.
On dit donc de quelqu’un qu’il paye en monnaie de singe lorsqu’il s’acquitte de sa dette par des grimaces, des révérences et des promesses. Une vieille coutume existait en Normandie par laquelle on pouvait défrayer son hôte par un conte ou une chanson :
Usages est en Normandie
Que qui hébergiez est qu’il die
Fable ou chanson die à son oste :
Cette coutume pas n’en oste
Sire Jehan de Chapelain.
(Jean le Chapelain)
Payer l’intérêt de sa mine
France, 1907 : On ne connaît pas le vin au cerceau, ni l’homme au chapeau, et cependant que de gens reçoivent un bon ou mauvais accueil suivant qu’ils sont bien ou mal vêtus. Que de sots et d’ignorants élégamment mis l’emportent dans les choses de la vie sur des hommes intelligents vêtus avec simplicité ! L’habit ne fait pas le moine, mais cependant que de gredins honorés comme moines parce qu’ils en portent la robe !
Garde-toi, tant que tu vivras.
De juger des gens par la mine,
vieux proverbe auquel on ne fait jamais attention. Philopœmen, le plus grand capitaine qu’ait eu la Grèce, le dernier des Grecs, comme l’appelaient les Romains, véritable artiste en guerre suivant l’expression de Plutarque, joignait à ses talents et à ses vertus civiques et guerrières la plus grande simplicité. Jamais de pompeux étalage, jamais de suite nombreuse comme avaient coutume d’en avoir les généraux grecs. Un jour, invité chez un ami, il arrive, suivant son habitude, simplement vêtu et sans serviteur. La maîtresse du logis, qui ne le connaissait pas et qui était en ce moment fort affairée et fort troublée par l’attente de l’illustre général des Achéens, voyant cet homme, le pria sans façon de fendre un peu de bois pour son feu qui n’allait pas à son gré. Philopœmen sourit, se dépouilla de son manteau et se mit gravement à l’œuvre. Le mari entre sur ces entrefaites, et quelle n’est pas sa stupéfaction de voir le général occupé, dans sa propre maison, à cette besogne d’esclave — « Qu’est-ce que cela ? s’écrit-il stupéfait. Quoi ! seigneur… — Je paie l’intérêt de ma mauvaise mine, dit en riant Philopœmen. » Les Arabes disent : Selon l’habit, l’hospitalité.
Payer la goutte (faire)
Delvau, 1866 : Siffler, — dans l’argot des coulisses.
Rigaud, 1881 : Siffler un acteur.
Payer les pots cassés
France, 1907 : Pâtir pour les fautes d’autrui.
J’ai faim, disait ventre creux
Devenu sceptique,
Je suis las des fruits véreux
De la politique,
Tiens ! je paie assez
Les vieux pots cassés.
Les partis
Sont petits.
Chacun a sa bande.
J’aime mieux la viande !
(Eugène Pottier, Chansons révolutionnaires)
Payer les violons
France, 1907 : Payer sans y prendre part les plaisirs d’autrui, avoir la peine sans le profit. Cette expression est fort ancienne. Molière l’a introduite dans une de ses comédies, La Comtesse d’Escarbagnas : « Pour moi, je ne suis pas d’honneur à payer les violons pour faire danser les autres. »
Les Romains disaient : Delirant reges, plectuntur achivi, « les rois font des turpitudes et c’est le peuple qui souffre. »
Payer sa fiole, sa hure, sa tête (se)
France, 1907 : Se moquer de quelqu’un.
Tous ces conscrits auraient bougrement envie de pleurer, — mais, tous, ravalent leurs larmes, crainte que les camaros se payent leur fiole et aussi pour montrer qu’on est un homme.
(Almanach du Père Peinard, 1894)
Amédée de Saint-Gapour crut comprendre, à ce moment, que la dame se payait sa tête.
Très vexé et fou d’amour, il se précipita sur elle en imitant, à s’y méprendre, le cri du carme.
(Je ne sais pas si je me fais bien comprendre.)
(Alphonse Allais)
Quelqu’un veut se payer ma tête…
Mais j’ai bon œil et bon poignet,
Et d’une aventure aussi bête
Avant peu j’aurai le cœur net !
(Jules Célès)
Payer un homme (se)
Virmaître, 1894 : Moyen que possèdent toutes les femmes sans débourser d’argent. Cette expression est généralement employée par les femmes à caprices.
— Elle se paye autant d’hommes qu’elle change de chemises (Argot des filles). N.
Payer un moos, la goutte (se faire)
Fustier, 1889 : Argot théâtral. Jouer un rôle à emboîtage.
Payer une bosse (s’en)
France, 1907 : S’en donner à cœur joie.
Aplati sous le joug d’une bossue atroce (Louis XII)
Il la quitte, et bientôt avec sa liberté,
Recouvre le bonheur et la tranquilité ;
De là le mot fameux : « S’en payer une bosse ! »
(Charles Tabaraud)
Payer une course (se)
Delvau, 1866 : Courir, — dans l’argot des faubouriens.
Payer, Aglaé (tu vas me le) !
Rigaud, 1881 : Locution très répandue, il y a une dizaine d’années, lorsqu’on était mécontent de quelqu’un, lorsqu’une proposition paraissait extravagante ou déplacée, une prétention exagérée.
Payette
France, 1907 : Diminutif de paye ; petite récompense. Lorsque les bergères du Centre sont contentes de leurs chiens, elles les rappellent en criant : « À la payette ! »
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