Quart

Quart

d’Hautel, 1808 : Un moment de trente-six quarts d’heure. Un moment dont on ne voit pas la-fin, qui se change en heure, et quelquefois en jour. Se dit par raillerie des délais que demande un lendore, un homme d’une lenteur et d’une nonchalance extrêmes.
Il ne vaut pas le demi quart de l’autre. Se dit par comparaison de deux choses, et pour exprimer que l’une est bien inférieure à l’autre.
Il n’a pas un quart d’écu. Pour, il est bien pauvre. On dit, dans le sens opposé, d’un homme riche, qu’il a bien des quarts d’écu.
Donner au tiers et au quart. Être prodigue, libéral, généreux, donner à tout ce qui se présente.
Dauber sur le tiers et le quart. Se railler, se moquer des ridicules des autres ; n’épargner personne dans ses moqueries.
Médire du tiers et du quart. Médire de tout le monde.
Le quart-d’heure de Rabelais. Pour dire moment désagréable, fâcheux, triste et pénible. On appelle ainsi l’instant où, chez un traiteur, il faut payer l’écot : instant qui ne fait pas plaisir aux gens intéressés, qui voudroient se divertir et ne rien payer.

Larchey, 1865 : Station d’une fille sur la voie publique ; tolérée par la police de sept à onze heures du soir, elle équivaut en effet au quart des marins.

Je n’ai plus besoin de faire mon quart.

(Montépin)

France, 1907 : N’avoir quart ni part, n’avoir rien à prendre dans une succession, un partage.

France, 1907 : Commissaire de police ; abréviation de quart d’œil.

Car au passant, matin et soir,
De la fenêtre ou du trottoir
Faut faire signe ;
D’un bon miché l’on a l’espoir
Et c’est le quart qui vient vous voir.

(É. Blédort)

France, 1907 : Gobelet en fer-blanc dont se servent les soldats en route et en campagne.

Une fois au milieu de nous, les deux religieuses menèrent lestement leur distribution, — ménageant leurs paroles, mais nullement leur bon vouloir. Bientôt notre misérable troupe eut de quoi apaiser sa faim : pain frais et viande froide, et les quarts se tendirent à la ronde vers les bouteilles de vin clair que débouchait la plus âgée des sœurs.

(André Theuriet)

France, 1907 : Mesure parisienne qui est censée être le quart du décalitre, mais qui ne content en réalité que deux litres. On devrait dire cinquième. On appelait autrefois quarte un vase d’une capacité de convention variant selon les lieux, mais le plus souvent égale à la pinte.

Quart (battre son, faire son)

Rigaud, 1881 : Aller et venir d’un trottoir à l’autre, à l’exemple de Diogène qui cherchait un homme. Les filles de maison font à tour de rôle, pendant quinze minutes, le quart devant leur porte, comme des sentinelles. Mot à mot : faire le quart d’heure.

Quart (faire le)

France, 1907 : Station que font les filles sur la voie publique pour raccrocher les hommes. Cette expression, qui est une allusion au service des marins appelé quart, vient de l’autorisation donnée autrefois par la police aux filles de lupanar de parcourir un certain espace devant leur maison, de 7 à 11 heures du soir. On dit aussi : battre son quart.

Lorsque je bats mon quart, mon macq boit ma recette au café.

(Mémoires de M. Claude)

Quart d’agent

Larchey, 1865 : Propriétaire du quart de la valeur d’une charge d’agent de change.

Une bourrasque fit sombrer son quart d’agent dans l’océan de la Bourse.

(Achard)

Il y a des cinquièmes, sixièmes, voire des dixièmes d’agents. — On dit de même : Un quart d’auteur dramatique.

Quart d’agent de change

Delvau, 1866 : s. m. Personne intéressée pour un quart dans une charge d’agent de change. Argot des boursiers. Il y a aussi des cinquièmes, des sixièmes et même des dixièmes d’agent de change.

Rigaud, 1881 : Associé d’agent de change. — N’aurait-il qu’un dixième de part dans la charge, c’est toujours un quart d’agent de change.

Quart d’auteur

Delvau, 1866 : s. m. Collaborateur pour un quart dans une pièce de théâtre. Argot des coulisses.

Rigaud, 1881 : Collaborateur de naissance, celui qui n’a jamais fait une pièce à lui seul. Collaborateur qui fait… les courses, et ce n’est pas le moins utile quelquefois, ni celui qui a le moins d’esprit.

Quart d’heure de Rabelais

France, 1907 : Moment critique ou il faut payer sa note dans un restaurant ou un hôtel, autrement dit sa douloureuse. L’anecdote qui donna naissance à cette expression est fort controuvée. La voici : Le curé de Meudon, l’immortel auteur de Pantagruel, s’étant arrêté à Lyon à son retour de Rome où il avait accompagné, comme médecin, le cardinal Jean du Bellay, se trouvant à court d’argent pour payer son hôtelier et pour continuer son voyage à Paris, s’avisa du stratagème suivant : il disposa trois petits paquets remplis de cendre et sur lesquels il écrivit : « Poison pour le roi — Poison pour la reine — Poison pour le dauphin. » Ces paquets laissés à dessein sur une table tombèrent sous les yeux de l’hôtelier, qui courut prévenir le lieutenant du roi. Rabelais fut arrêté et expédié, sous bonne escorte à Paris, avec les égards dus à un criminel d’importance. Conduit devant François Ier, celui-ci s’égaya fort du récit de l’aventure et, ajoute la chronique, fit asseoir le régicide à sa table.

Quart d’œil

Larchey, 1865 : Quarante-huit commissaires de police veillent sur Paris comme quarante-huit providences au petit pied ; de là vient le nom de quart d’œil que les voleurs leur ont donné dans leur argot puisqu’ils sont quatre par arrondissement.

(Balzac)

Comme le mot est antérieur à l’organisation susdite, nous y voyons plutôt une allusion à l’ancienne robe noire des commissaires dite cardeuil. V. Fr. Michel. — V. Parrain.

Rigaud, 1881 : Surnom attribué autrefois par les voleurs au commissaire de police. Aujourd’hui les voyous et leurs modèles les voleurs donnent indistinctement ce nom aux commissaires de police et aux sergents de ville. Un étymologiste de la petite Roquette que nous avons consulté nous a affirmé que ce sobriquet leur avait été inspiré par les allures de ces agents de l’autorité, qui les guettent en tapinois et ne montrent que le quart de l’œil.

Virmaître, 1894 : Commissaire de police (Argot du peuple). V. Moissonneur.

Rossignol, 1901 : Commissaire de police.

France, 1907 : Commissaire de police. Voici quelle serait, d’après Balzac, l’origine de ce sobriquet :

Quarante-huit commissaires de police veillent sur Paris, comme quarante-huit providences au petit pied ; de là vient le nom de quart d’œil que les voleurs leur ont donné dans leur argot, puisqu’ils sont quatre par arrondissement.

Mais, objecte Lorédan Larchey, comme le mot est antérieur à l’organisation susdite, on doit y voir plutôt, avec M. Michel, une allusion à l’ancienne robe noire des commissaires, dite cardeuil.

— C’est pas assez de se voir déshonorer par sa fille… Faut encore être insultée par un goaupeur. Eh bien ! puisque c’est comme ça, je vas m’en aller… mais je vas revenir avec le quart d’œil, c’te fois-ei !… Et c’est lui qui te montrera ce que ça coûte, grand feignant, de vouloir se payer des pucelles de quinze ans moins trois mois… Attends un peu !

(Oscar Méténier)

France, 1907 : Coup d’œil furtif, œillade amoureuse que l’on jette en passant, du coin, du quart de l’œil, à une personne d’un sexe différent que l’on veut aguicher ou qui vous plait. Provincialisme.

Nombre de jeunes pensionnaires à qui l’on donnerait le bon Dieu sans confession sont déjà expertes dans le quart d’œil.

Quart de marqué

Vidocq, 1837 : s. f. — Semaine.

Rigaud, 1881 : Semaine, — dans le jargon des voleurs.

Virmaître, 1894 : Semaine. Le quart du mois (marqué) (Argot des voleurs).

Quart de marque, de marquet

France, 1907 : Semaine ; argot des voleurs.

Quart de monde

France, 1907 : Monde des courtisanes d’un degré au-dessous du demi-monde. L’ambition des filles du quart de monde est de se ranger dans le demi.

Quart des dégommés

La Rue, 1894 : Commissaire des morts.

France, 1907 : Commissaire des pompes funèbres. Voir Quart d’œil.

Quart-d’œil

anon., 1827 / Raban et Saint-Hilaire, 1829 / Bras-de-Fer, 1829 : Commissaire.

Halbert, 1849 : Commissaire de police.

Delvau, 1866 : s. m. Commissaire de police, — dans l’argot des faubouriens. Se dit aussi de l’habit noir de ce fonctionnaire.

La Rue, 1894 : Le commissaire. Agent de police.

Quart, ou quart d’œil

Hayard, 1907 : Commissaire de police.

Quart, quart d’œil

anon., 1907 : Commissaire.

Quarta

France, 1907 : Ancienne prestation en nature prélevée sur le blé, le foin, les fruits. Voir Quarto.

Quarteron

d’Hautel, 1808 : Il ne pèse pas un quarteron. Se dit par ironie et par mépris d’un homme de foible complexion, qui fait le fanfaron, le méchant.
Il n’y en a pas trois douzaines au quarteron. Se dit malignement d’une personne dont on veut diminuer le mérite ; et d’une chose qu’on ménage, que l’on conserve avec un soin minutieux.

France, 1907 : Mesure parisienne qui vaut le quart d’un cent, surtout employée pour les noix. On en donne vingt-six au quarteron.

Quartier

d’Hautel, 1808 : La gazette du quartier. Nom injurieux que l’en donne à une femme babillarde qui se mêle de toutes les affaires, qui sait toutes les nouvelles de son quartier, et qui s’amuse à les débiter aux uns et aux autres.
Il se mettroit en quatre quartiers pour le service de cet homme. Pour dire, il n’y a rien qu’il ne voulût faire pour l’obliger.
Mettre l’alarme dans tout un quartier. Y débiter de fausses nouvelles, faire courir de mauvais bruits.
Tirer quelqu’un à quartier. Pour dire à l’écart, à part.

Delvau, 1866 : s. m. Logement de trois ou quatre pièces, — dans l’argot des ouvriers qui ont été travailler en Belgique.

Rigaud, 1881 : Quartier Latin, quartier des Écoles, — dans le jargon des étudiants. — Aller au quartier. — Femme du quartier, femme qui habite le quartier Latin pour y étudier, sur le vif, l’étudiant ; ce qui lui permet d’être restaurée chez Petiau, désaltérée à la Source, amusée chez Bullier et couchée un peu partout.

France, 1907 : Logement composé de plusieurs pièces : expression importée par les ouvriers belges. En Belgique, un appartement est appelé quartier.

Quartier (coqueluche du)

France, 1907 : On désigne ainsi une personne élégante, un homme à la mode, qui fait tourner la tête aux femmes, et dont tout le monde s’occupe dans le coin de ville, le quartier. Cette expression parait dater de la première partie du XVIIIe siècle, où la coqueluche fit de grands ravages. « Ménage, dit M. Ch. Ferrand, rapporte que ce nom lui fut donné, parce que ceux qui en étaient atteints se mirent à porter des coqueluches ou capuchons, pour se garantir la tête du froid. Et comme la crainte de la mort elle-même n’est pas puissante pour bannir la coquetterie, les personnes riches portèrent des coqueluches de drap fin, rehaussées de broderies et couvertes d’ornements d’or ou d’argent. » Le danger passé, la mode reste, et cette partie du vêtement devint bientôt l’article de toilette le plus soigné, désigna donc par métonymie celui ou celle qui portait la coqueluche la plus élégante, par le nom même de cette sorte de capuchon, la plus belle coqueluche de la ville, la plus belle coqueluche du quartier.

Quartier (le)

France, 1907 : Nom que les étudiants donnent au Quartier latin.

Farandol cessa d’être étudiant pour devenir bohème…
Il ne quitta point le Quartier, continua d’y vivre au jour le jour, dans un garni, s’occupant seulement d’y culotter des pipes, de pinter de la bière, et parfois de rimer des sonnets vaguement insérés à l’œil dans de petits journaux d’un tirage problématique.

(Grammont, L’Intransigeant)

Femme du Quartier, femme galante du Quartier latin.

Quartier (pas de)

France, 1907 : Tuez tout, n’épargnez pas l’ennemi ! Dans Les Origines de quelques coutumes anciennes et plusieurs façons de parler triviales, livre paru à Caen en 1672 l’auteur, de Brieux, dit que cette expression vient de la coutume des Hollandais et des Espagnols de faire payer la rançon d’un officier ou d’un soldat prisonnier d’un quartier de sa solde. Refuser ce quartier, c’était condamner l’adversaire à mort. Littré pense que l’origine ci-dessus n’est pas vraisemblable parce que les intermédiaires manquent, mais il faut se rappeler que les gentilshommes et les officiers se faisaient un point d’honneur d’obéir aux lois de la guerre et eussent été déshonorés s’ils avaient refusé, après quartier, de paver leur rançon ; donner quartier, selon lui, serait recevoir à son logis, à sûreté.

Quartier gras

Rigaud, 1881 : Quartier d’un bon rapport pour les chiffonniers. — Quartier maigre, quartier qui rapporte peu à la hotte, — dans le jargon des chiffonniers.

Quartiers souffrants

La Rue, 1894 : Les quartiers Maubert et Mouffetard ; les quartiers malheureux.

Quartilleux

France, 1907 : Voir Écartilleux.

Quarto, quartum

France, 1907 : Prestation en nature, affectée sous la féodalité aux produits de la vigne. Elle était tantôt forcée, tantôt consentie librement ; on pouvait la payer en argent ou la convertir en une mesure de vin, d’où, suivant Ch. Nisard, serait venu le mot quartaut.


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique