Rat

Rat

d’Hautel, 1808 : Pour caprice, fantaisie.
Il a autant de rats qu’un chat a de puces. Se dit d’un homme pétri de caprices et de fantaisies.
On dit d’une arme à feu, qu’Elle a un rat, quand le chien s’est abattu sans faire prendre l’amorce ; on le dit aussi d’une serrure mêlée, que l’on ne peut ouvrir qu’après avoir tourné la clef mainte et mainte fois.
Un nid à rats. Un taudis, un logement étroit, sale et obscur.
Une queue de rat. Se dit par raillerie de la queue d’un homme, ou d’un cheval, petite et peu garnie.
Il n’est pas plus haut qu’un rat. Se dit par mépris d’un homme de très-petite taille, qui se fourre partout, se mêle de toutes les affaires, et fait le fanfaron et le méchant.
Être comme rat en paille. Nager dans l’abondance ; être à bouche que veux-tu.
Prendre des rats par la queue. Filouter, couper des bourses.
Mon rat. Nom flatteur et caressant que l’on donne par amitié à un jeune homme ou à une jeune fille.

Ansiaume, 1821 : Voleur de balle, la nuit.

Le cardeuil l’a mis au mille pour avoir couru le rat.

Larchey, 1865 : « Cette expression s’applique à tout retardataire de l’École polytechnique. Quiconque après son examen de sortie est exclu par son rang des ponts et chaussées est rat de ponts ; le rat de soupe est celui qui arrive trop tard à table. »

(La Bédollière)

Larchey, 1865 : « Le rat est un des éléments de l’Opéra, car il est à la première danseuse ce que le petit clerc est au notaire… — Le rat est produit par les portiers, les pauvres, les acteurs, les danseurs. Il n’y a que la plus grande misère qui puisse conseiller à un enfant de huit ans de livrer ses pieds et ses articulations aux plus durs supplices, de rester sage jusqu’à dix-huit ans uniquement par spéculation et de se flanquer d’une horrible vieille comme vous mettez du fumier autour d’une jolie fleur… — Un rat à onze ans est déjà vieux. Dans deux ans elle peut valoir 60 000 francs, être rien ou tout, un nom célèbre ou une vulgaire courtisane. »

(Roqueplan. 1841)

Larchey, 1865 : « Petits pégriots qui se cachaient à la brune sous un comptoir afin d’ouvrir la nuit la porte du magasin à leurs collègues. Il paraît qu’on ne fermait qu’au pène les boutiques dans ce temps-là. Aujourd’hui le rat qui restera en vedette chez un marchand de vin aurait besoin de ses amis du dehors pour le délivrer. » — A. Monnier.

Larchey, 1865 : Avare, pauvre.

Je vous dénonce mon propriétaire qui est un rat fini.

(Bertall)

Larchey, 1865 : Bougeoir, bougie mince et tortillée dont le brin rappelle la queue du rat.

Je vous demanderai la permission d’allumer mon rat.

(H. Monnier)

Larchey, 1865 : Caprice, fantaisie trottant comme un rat dans la cervelle. V. d’Hautel, 1808.

Delvau, 1866 : s. et adj. Avare ; homme intéressé.

Delvau, 1866 : s. m. Bougie cordelée et repliée de façon à tenir dans la poche. On l’appelle aussi, rat de cave.

Delvau, 1866 : s. m. Caprice, — dans l’argot du peuple, qui dit cela aussi bien à propos des serrures qui ne vont pas que des gens qui font mauvaise mine. Autrefois, Avoir des rats c’était « avoir l’esprit folâtre, bouffon, étourdi, escarbillard, farceur et polisson ».

Delvau, 1866 : s. m. Petit voleur qui entre dans une boutique un peu avant sa fermeture, se cache sous le comptoir en attendant que les maîtres du logis soient couchés, et, lorsqu’il est assuré de l’impunité, ouvre la porte à ses complices du dehors. On dit aussi Raton. Courir le rat. Voler la nuit dans une auberge ou dans un hôtel garni.

Delvau, 1866 : s. m. Petite fille de sept à quatorze ans, élève de la danse qui est à la première danseuse ce que le saute-ruisseau est au notaire, et qui devient bien plus facilement célèbre comme courtisane que comme rivale de Fanny Essler. Le mot date de la Restauration, quoique quelques personnes — mal informées — lui aient donné, comme date, 1842, et comme père, Nestor Roqueplan.

Delvau, 1866 : s. m. Retardataire, — dans l’argot des Polytechniciens. Rat de ponts. Celui qui, après son examen de sortie, est exclu par son rang des Ponts-et-Chaussées. Rat de soupe. Celui qui arrive trop tard au réfectoire.

Rigaud, 1881 : Apprentie danseuse à l’Opéra.

Le vrai rat, en leur langage, est une petite fille de sept à quatorze ans, élève de la danse, qui porte des souliers usés par les autres, des châles déteints, des chapeaux couleur de suie, se chauffe à la fumée des quinquets, a du pain dans ses poches et demande dix sous pour acheter des bonbons.

(N. Roqueplan)

Rigaud, 1881 : Avare. Parce qu’à l’exemple du rongeur de ce nom il rogne tout ce qu’il peut.

Rigaud, 1881 : Retardataire, par apocope, — dans le jargon de l’École Polytechnique. On est rat, lorsqu’on a raté (manqué) l’heure de la rentrée.

La Rue, 1894 : Avare. Petit voleur. Retardataire. Apprentie danseuse à l’Opéra.

France, 1907 : Avare. Être d’un rat, être d’une sordide avarice.

Deux cabotins prennent un bock dans un café du boulevard.
X…, le célèbre chanteur, survient et va s’installer à la table voisine.
— Tu vois, dit l’un des cabotins à son camarade, ce gaillard-là, c’est le fameux X…
— On dit qu’il est d’un rat !
— Précisément..… Et pourtant il a soixante mille francs de rente dans le larynx.
— Et dire qu’on ne peut pas lui faire cracher un sou !

(Zadig)

France, 1907 : Bourse. Elle se cache comme un rat. Prendre des rats par la queue, voler des portemonnaie.

France, 1907 : Petit voleur.

L’apprenti voleur est aussi appelé rat ou raton, quand il sert à éclairer une bande pour s’introduire dans les maisons par les impostes, vasistas ou soupiraux, ou qu’il se cache le jour dans un immeuble, pour en ouvrir, la nuit, la porte à ses complices.

(G. Macé, Un Joli Monde)

Courir le rat, voler la nuit.

France, 1907 : Petite danseuse de ballet ; élève d’un cours de danse qui se destine au théâtre. Le mot date de la Restauration.

Déjà toute jeunette, rat du Théâtre Impérial des Bouffes à l’âge de la première communion, elle s’érigeait, très grande, avec un air de rêche femelle. Bien qu’elle eut nom Caro, on l’appelait le plus souvent la Savate ; les petites camarades disaient : « À cause qu’elle est plate comme une semelle, et qu’on y entre comme on veut. »

(Catulle Mendès, Gog)

Rat (courir le)

Ansiaume, 1821 : Voler à tâtons la nuit dans un lieu habité.

J’ai couru le rat dans sa turne, je n’ai eu qu’un bogue en orient.

Vidocq, 1837 : v. a. — Voler la nuit dans l’intérieur d’une auberge ou maison garnie.
Ce genre de vol se commet ordinairement dans les auberges où logent les marchands forains et les rouliers, et de préférence les jours de marché et de foire.
Les Rats sont habituellement deux et quelquefois trois. Ils exercent ostensiblement la profession de marchand forain ; leurs papiers sont toujours parfaitement en règle, ils peuvent donc exhiber, à la première réquisition, passeport, factures, patente, etc. Ils sont sobres, et leur politesse est extrême.
Les Rats logent plusieurs fois dans une auberge avant d’y commettre un vol. Ils arrivent toujours séparément et d’un lieu opposé, et s’arrangent de manière à ne point coucher dans la même chambre.
On sait qu’il y a toujours cinq ou six lits dans chacune des chambres d’auberges où logent habituellement les rouliers et marchands forains. Les Rats se couchent toujours les premiers, et lorsque ceux qui doivent partager avec eux la chambre qu’ils occupent arrivent, ils paraissent profondément endormis ; mais, comme les chats, ils ne dorment que d’un œil, et ils ont soin d’allumer celui qui place sous son traversin, ou sa ceinture ou sa culotte.
À l’heure convenue entre eux, ils se lèvent chacun de leur côté, ils se retrouvent et se rendent mutuellement compte de leurs observations. La position des lits occupés par ceux qu’ils veulent dévaliser est exactement indiquée, et chacun d’eux alors opère dans la chambre de son camarade, les ceintures et les culottes sont enlevées, et, après avoir placé le chopin en lieu de sûreté, chaque Rat retourne à son lit.
Les Rats n’emportent jamais avec eux ce qu’ils ont volé, ce n’est que quelques jours après la consommation du vol, et en revenant prendre gîte, qu’ils enlèvent leur butin.
Quelques Rats ont un complice au dehors auquel ils remettent instantanément l’objet volé. Il est très-rare que ces voleurs soient pris sur le fait. Aussi, les marchands forains et les rouliers qui boivent sec, et qui, par conséquent, n’ont pas le sommeil léger, devraient placer ce qu’ils possèdent sous leurs matelas, et non pas sous leur traversin. Ce serait le seul moyen de ne pas craindre la visite des Rats.
J’étais, le 5 novembre dernier, occupé à rédiger cet article, lorsque je reçus la visite d’un propriétaire de Charonne près Paris, qui venait d’être la victime d’un Rat.
Le voleur s’était introduit furtivement dans la maison où logeait le propriétaire, et s’était caché sous un lit placé dans la chambre voisine de celle qu’il occupait. Lorsque le voleur eut acquis la certitude que le propriétaire était profondément endormi, il s’introduisit dans sa chambre, enleva sa ceinture, qui contenait 24,000 francs en billets de banque, et se sauva en escaladant les murs de la maison. Je mis de suite en campagne une partie des agens attachés à mon établissement, et, à six heures du soir, le Rat fut saisi encore nanti de la somme volée, qui fut de suite restituée à son propriétaire.

Rigaud, 1881 : Voler la nuit, dans les maisons meublées, dans les hôtels garnis.

Virmaître, 1894 : Voler la nuit. Allusion au chat qui ne sort que la nuit pour chasser le rat, excepté qu’ici il faut retourner le fait, c’est le rat qui chasse le chat — le passant (Argot des voleurs). N.

Rat d’eau

France, 1907 : Douanier.

Rat de cave

Delvau, 1866 : s. m. Employé de la régie, — dans l’argot des marchands de vin V. Rat.

France, 1907 : Employé des contributions indirectes. On donne aussi ce nom à une bougie menue et cordelée qui se replie sur elle-même.

Rat de palais

Virmaître, 1894 : Clerc d’huissier qui attend les malheureux avant l’audience des référés pour accrocher une pièce de cent sous. Hommes d’affaires véreux qui passent leur existence dans la salle des Pas-Perdus à la recherche d’un imbécile. Rat de palais, en un mot tous les rongeurs qui rongent les plaideurs (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Homme d’affaires véreux qui erre dans la salle des Pas-Perdus à la recherche de dupes. Clerc d’huissier.

Rat de prison

Halbert, 1849 : Avocat.

Larchey, 1865 : Avocat. — Allusion aux visites qu’il rend aux prisonniers.

Delvau, 1866 : s. m. Avocat, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 / La Rue, 1894 : Avocat.

Virmaître, 1894 : Avocat. Allusion à ce que ces messieurs grignottent à belles dents l’argent, des prisonniers qui ont besoin de leurs services. Sangsue serait plus juste que rat (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 / France, 1907 : Avocat.

Rat de quai

France, 1907 : Pauvre diable qui cherche à gagner sa vie sur les quais.

Le grand-père est un rat de quai,
Le petit-fils mousse embarqué,
La grand’mère, aux jours les meilleurs,
Porte la hotte aux mareyeurs.

(Jean Richepin, La Mer)

Rat, raton

Rigaud, 1881 : Petit voleur, voleur de petite taille, enfant dressé au vol. C’est le rapin du voleur. L’exiguïté de sa taille le rend très utile dans certaines expéditions. Elle lui permet de se faufiler par les toits de cheminées, et de frayer la route aux filous de toutes les tailles.

Rata

Vidocq, 1837 : s. f. — Fricassée.

Larchey, 1865 : Abréviation de ratatouille.

Pour le rata : faites bouillir de l’eau, prenez des pommes de terre, jetez le légume choisi dans la bassine, ajoutez 3 kilogr. de lard par cent hommes, remuez et servez.

(La Bédollière)

Delvau, 1866 : s. m. Ragoût de pommes de terre et de lard, — dans l’argot des troupiers.

Rigaud, 1881 : C’est le ragoût servi aux troupiers les jeudis et les dimanches ; pour ratatouille, mauvais ragoût. Rata aux pommes, ragoût aux pommes de terre que les restaurateurs des grands boulevards appellent pompeusement : « Un navarin », et qu’ils font payer en conséquence.

Merlin, 1888 : Ragoût composé de toute espèce de viande et légumes.

France, 1907 : Ragoût que l’on sert journellement aux soldats et qu’on ne donnait autrefois à leurs devanciers qu’aux grandes occasions, ou au plus le dimanche. Ce n’est pas, comme on pourrait le croire, l’apocope de ratatouille. Rata vient du grec ratos, ragoût fait de lait de chèvre, de miel et d’andouilles, et c’est de ce dernier mot combiné avec rata qu’on a fait ratatouille.

Homère raconte que les grognards de son temps veillaient à ce que leurs troupiers fussent toujours suffisamment repus. Aussi un festin suivait-il immédiatement un combat. Ajax tournait la broche gigantesque d’Agamemnon. Diomède, après avoir bouchonné ses chevaux, préludait à l’enfoncement complet des Troyens en confectionnant, dans une lèchefrite d’or, ce brouet noir appelé ratos, dont les Grecs étaient si friands, et Achille lui-même, le tendre et vaillant Achille, ne dédaignait pas de mettre la main à la pâte sous la tente de la sensible Briséis.

(Émile Marco de Saint-Hilaire)

Rataconniculer

France, 1907 : Coïter. Vieux mot.

Ratafia de grenouilles

Rigaud, 1881 : Eau, — dans le jargon des ivrognes.

France, 1907 : Eau.

Ratafiat de grenouille

Delvau, 1866 : s. m. L’eau, — dans l’argot du peuple. On dit aussi Anisette de barbillon et Bourgogne de cheval.

Ratapiaule

Rigaud, 1881 : Raclée.

Evidemment la perspective d’une ratapiaule vous fera ch…anceler dans vos calintes.

(L’art de se conduire dans la société des pauvres bougres)

Ratapiole

France, 1907 : Coup.

— Le maître d’hôtel de Bruxelles m’en a appris de belles sur ton compte.
— Qu’est-ce qu’il vous a dit ?…— Que tu avais une drôle de tenue à table.
— Moi ?… Je m’y tiens très bien !… J’ai été chiquement élevé là-dessus dès ma plus tendre enfance. Quand je fourrais mes doigts dans le plat, papa et maman me fichaient des ratapioles que j’en étais bleu.

(Simon Boubée, Le Testament d’un martyr)

Ratapoil

Delvau, 1866 : s. et adj. Partisan quand même du 1er Empire et admirateur aveugle de l’empereur Napoléon.

Rigaud, 1881 : Type du vieux soldat du premier Empire. — Vieux soldat qui a conservé le culte des Napoléon et perdu, le plus souvent, au moins un membre.

France, 1907 : Sobriquet donné par les républicains aux bonapartistes, et qui date de 1850, au moment où l’on entreprit la campagne contre Louis-Napoléon.

Supposant, vraisemblablement à tort, que le général Cavaignac voulut faire arrêter le prince Louis, ils organisèrent une garde qui devait, jour et nuit, veiller aux abords de l’hôtel du Rhin. Les journaux du temps publièrent les noms et les adresses des miliciens de cette nouvelle garde impériale qui, fusionnées avec le Comité central bonapartiste, fut le noyau de la Société du 10 décembre que les républicains flétrissaient du nom, assez bien trouvé, de Ratapoils.

(Jules Richard, Comment on a restauré l’Empire)

Ratatiné

d’Hautel, 1808 : Une mine ratatinée. Pour dire, un visage ridé, fané, comme l’est ordinairement celui d’un vieillard.

Ratatouille

Delvau, 1866 : s. f. Coups donnés ou reçus.

Delvau, 1866 : s. f. Mauvais ragoût, plat manqué.

Rossignol, 1901 : Mets mal préparé.

Rossignol, 1901 : Se battre est se flanquer une ratatouille.

France, 1907 : Coups.

France, 1907 : Fricassée, mauvais ragoût. Voir Rata.

Pension d’étudiants.
— J’ai le regret de vous déclarer, ma chère Madame Plumard, que votre ratatouille est encore plus dégoûtante cette année qui l’année dernière.
— C’est impossible, Monsieur Raoul.

(Ange Pitou)

Ratatouille (en recevoir une)

Virmaître, 1894 : Être battu.
— Je vais te foutre une ratatouille, numéro un.
On dit également :
— Je vais te tremper une soupe (Argot du peuple). N.

Ratatout

Rigaud, 1881 : Atout redoublé. Jouer cœur atout, et ratatout.

France, 1907 : Nouvel atout ; terme de joueur. « Atout et ratatou. »

Rate

d’Hautel, 1808 : Prends garde de te fouler la rate. Se dit par raillerie à un fainéant, à un homme nonchalant et paresseux, qui fait tout avec une extrême lenteur.
S’épanouir la rate. Se réjouir ; se donner du bon temps ; rire à gorge déployée.
Vous avez bon foie, Dieu vous sauve la rate. Se dit par raillerie à ceux qui tiennent des discours ridicules et peu vraisemblables.

Raté

Virmaître, 1894 : Manquer une affaire, rater un coup… de fusil, un examen. D’un homme petit, on dit : il est raté. En littérature, en musique, en peinture, une œuvre est ratée lorsqu’elle est incomplète. Un homme qui donnait de belles espérances et qui n’arrive à rien est un raté. En un mot, raté se dit de tout ce qui n’est pas bien (Argot du peuple).

France, 1907 : Individu qui n’a pas réussi dans sa carrière, dans ses entreprises ; fruit sec.

D’où vient le politicien ? C’est un fruit sec de la magistrature ou du barreau, un raté de l’industrie ou du commerce. Toujours ses origines sont équivoques, et il entra dans les affaires publiques comme un loup affamé, cherchant une proie. Ses dents aiguës ont faim de fonctions lucratives ; il guette les trafics suspects où il pourra s’immiscer grâce à la magistrature élective et réussir par son influence et sa situation à palper de grosses redevances.

(Henry Bauër, La Ville et le Théâtre)

Ce mot s’emploie adjectivement : vie ratée, profession ratée.

C’est le Parlement, me dit-il… Cette assemblée se compose de hâbleurs, que le peuple nomme sans les connaître, car, comme tous les pays de tyrannie, celui-ci possède le suffrage universel. À une date fixée par le Code, les murs se couvrent d’affiches portant les noms des candidats. La plupart sont des médecins ratés, que leurs collègues, désireux de les apaiser par des sinécures honorifiques, proposent à l’élection. En réalité, ce Parlement n’a pas plus d’influence que les éphémères gouvernements et ministres qu’il se donnes.

(Léon Daudet, Les Morticoles)

M. Renan a écrit quelque part qu’au moment du Jugement dernier, quand le Seigneur l’interrogerait, il imaginerait pour sa défense des arguments tellement subtils qu’il était certain de le convaincre de l’excellence de sa cause. C’est que le grand écrivain demeura toujours, comme on a dit joliment, un curé raté.

(Francis Chevassu)

Rate (se fouler la)

France, 1907 : Se démener, se donner du mal, travailler ferme. Ne pas se fouler la rate, ne rien faire, prendre ses aises.

Mignonne, toi qui ne te foules
Jamais la rate, viens-t’en voir
Dans la solitude des foules
Ces malheureux heureux d’un soir ;
Prenons notre part de l’orgie,
Et ce sera vraiment très doux
De dire, en soufflant la bougie,
Que d’autres sont gais comme nous.

(Jacques Rédelsperger)

Rateau

Rigaud, 1881 : Agent de police, — dans le jargon des camelots.

Virmaître, 1894 : Agents de police. Ils ratissent les voleurs (Argot des voleurs).

France, 1907 : Gendarme, agent de police ; ils ratissent les voleurs.

France, 1907 : Prêtre. Abréviation de ratichon. Voir ce mot.

Crevons d’coups de marteaux
La Sorbonne aux rateaux.

(Chanson des Casquettes noires)

France, 1907 : Prostituée ; elle ratisse les poches des clients. Argot faubourien.

Râteau

Fustier, 1889 : Gendarme, agent, dans l’argot des malfaiteurs.

Le terme est nouveau ; veuillez ne pas l’oublier et remarquer toute la justesse de l’expression. L’agent de police en effet nous ratisse et nous englaise dans la piaule.

(A. Belot, Le Roi des Grecs)

Faut suriner les pantres
À coups d’couteaux dans le ventre
Et crever d’coups d’marteaux
La cervelle aux râteaux.

(Chanson, 1884)

La Rue, 1894 : Gendarme. Agent. Prêtre.

Rossignol, 1901 : Agent de police.

Sauvons-nous, v’là les râteaux.

Râteaux parce qu’ils râtissent, (prennent). Un peigne est aussi un râteau.

Rateau (faire son, faire du)

Rigaud, 1881 : Faire, comme punition, un service supplémentaire à l’expiration des vingt-huit jours que, chaque année, les réservistes doivent à l’État, — dans le jargon des soldats de la réserve. C’est la variante de faire du rabiau.

Ratelée

d’Hautel, 1808 : Dire sa ratelée. Dire à son tour librement et franchement tout ce qu’on sait, tout ce qu’on pense de quelqu’un ou de quelque chose.

France, 1907 : Récit, conte, bavardage. Vieux français.

Petits et grands remplis de joye,
Portèrent leur nez hors de Troie
Et visitèrent les quartiers
Dont ils se pensaient héritiers.
On s’entr’apprend, on s’entremontre :
Ici se fit un tel rencontre,
Et là se fit un tel combat,
Chacun bien du païs y bat,
Chacun y dit sa ratelée.

(Scarron, Virgile travesti)

Ratelier

d’Hautel, 1808 : Manger à plus d’un ratelier. Tirer du profit de plusieurs emplois.
Mettre le ratelier trop haut à quelqu’un. Lui rendre une chose si difficile, qu’il ne puisse y réussir qu’avec beaucoup de peine.

Rater

d’Hautel, 1808 : Pour dire échapper l’occasion, manquer son coup, ne pouvoir venir à bout de quelque chose. On le dit aussi en parlant d’une arme à feu dont l’amorce n’a pas pris.

Delvau, 1866 : v. a. Échouer dans une entreprise, manquer une affaire, — amoureuse ou autre. Argot du peuple. Rater une femme. Ne pouvoir réussir à s’en faire aimer après l’avoir couchée en joue.

Hayard, 1907 : Manquer une affaire.

France, 1907 : Manquer. Rater une affaire, une bonne occasion, une fête.

Voilà la fête que l’on rate,
Bourgeois, dis-moi si cela vaut
L’ennui de se fouler la rate ?
C’est usé, bête et pas nouveau.
Aussi, je me suis bien promis
De fuir le temple et ses prêtresses ;
N’avons-nous pas de bons amis
Dont les femmes sont nos maîtresses ?

(Jacques Rédelsperger)

Rater une femme, rester impuissant près d’elle. Rater l’avortement, accoucher en dépit des drogues et des pratiques criminelles.

Alors des parents en détresse
Au préfet content, gémissants,
Qu’un vieux monsieur fit sa maîtresse
De Nana qui n’a pas quinze ans,
On crie au feu, c’est la coutume,
Quand déjà la flamme est partout ;
L’enfant écuma le bitume,
Quand on s’aperçut tout à coup
De sa démarche irrégulière
Et de son ventre ballonnant :
Elle avait suivi la filière.
Sa mère dit : « c’est étonnant ! »
Mais l’enfant, que rien n’intimide,
Expliqua que, tout simplement :
« Il vous reste l’infanticide,
Si l’on rate l’avortement. »

(Pontsevrez)

Rater une femme

Delvau, 1864 : La baiser, en égoïste, et sans la faire jouir.

Quand je la baise, ma femme
S’obstine à ne pas bouger…
Comment faut-il de cela,
Punir cette ingrate-là ?
— Rate-la !

(Aug. Gilles)

Delvau, 1864 : Ne pouvoir bander assez raide au moment suprême où la femme, pamée et déjà délirante dans l’attente de la félicité promise, ouvre les cuisses et ferme les yeux.

Non, mais tout de bon, je vous rate… Vous n’êtes puisqu’une comtesse ratée.

(La Popelinière)

Je rate, hélas ! également,
Le poisson, ma belle et ma muse.

(Béranger)

Rateur

Delvau, 1864 : Homme qui a plus grands yeux que grosse pine et qui reste en affront devant la femme qui l’attend, cuisses ouvertes, fesses frémissantes.

Quand il fait le séducteur,
Sur mon honneur ! ça me vexe :
Car à l’endroit du beau sexe
Il n’est pas à d’mi rateur.

(Jules Poincloud)

Ratiboisé

Rigaud, 1881 : Ruiné.

J’ai fait faillite comme un vrai commerçant ; ratiboisé, ma chère.

(Huysmans, Marthe)

Virmaître, 1894 : Plus le sou.
— Je n’ai plus le sou, je n’ai plus de crédit et pas envie de bien faire, je suis ratiboisé (Argot du peuple).

Hayard, 1907 : Décavé, sans le sou.

France, 1907 : Ruiné.

— J’ai fait faillite comme un vrai commerçant ; ratiboisé, ma chère.

(Huysmans)

Ratiboiser

Rossignol, 1901 : Prendre, voler.

France, 1907 : Prendre.

C’est épatant c’qu’il ratiboise
Avec un chic particulier,
Et sans qu’on puiss’ lui chercher noise,
Car il est à l’œil, le fourrier.

(Griolet)

Y a pas de bon bougre qui, baguenaudant sur les boulevards, n’ait une fois ou l’autre reluqué des prolos en train d’opérer la transplantation des arbres en les collant sur un chariot spécial.
C’est un turbin cotonneux et bougrement dangereux, — aussi est-il moins payé que le préfet de la Seine.
Il y a quelque temps, des prolos employés à ce boulot recevaient vingt sous d’indemnité. C’était fichtre pas volé ! Eh bien, les grosses légumes viennent de ratiboiser ces vingt ronds.
Dam’, faut faire des économies, — sur le dos des petits !

(Père Peinard)

Ratiboiseur de cabot

Virmaître, 1894 : Voleur de chiens. C’est une industrie toute spéciale, elle est florissante au printemps quand les chiennes sont amoureuses. Les chiens une fois volés, sont tondus, maquillés pour les rendre méconnaissables, puis expédiés en Angleterre à une association affiliée aux voleurs parisiens. Ce vol est des plus simples, il faut être deux pour l’accomplir. Pendant que l’un fait la cour à la bonne qui promène Tom ou Mirza, le complice profite de son inattention, il enlève le cabot (Argot des voleurs). N.

Ratiboiseur de landau à baleines

Virmaître, 1894 : Voleur de parapluies. On les nomme aussi des ratiboiseurs à l’échange. Le voleur entre dans un grand café, il a un mauvais parapluie à la main, il le place au porte-parapluie, au milieu des autres. Il s’assied à côté pour guigner de l’œil le plus beau, il paye sa consommation, se lève sans affectation en emportant le parapluie sur qui il a jeté son dévolu. Si l’on s’aperçoit de l’échange, il s’excuse de s’être trompé, puis s’en va tranquillement. Il est rare que ce vol ne réussisse pas (Argot du peuple). N.

Ratiche

Rigaud, 1881 : Église, — dans le jargon des voleurs. — Blaireau de ratiche, goupillon. — Calot à blaireau, donneur d’eau bénite ; calot est pour calotin.

La Rue, 1894 : Église.

France, 1907 : Église. Blaireau de ratiche, goupillon.

Ratichon

Ansiaume, 1821 : Prêtre.

Thierry, lui, se chargera d’aller chercher le carle du ratichon.

anon., 1827 : Abbé, prêtre.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Prêtre.

Bras-de-Fer, 1829 : Abbé, prêtre.

Clémens, 1840 : Aumônier.

M.D., 1844 : Prêtre.

un détenu, 1846 : Prêtre, curé.

Halbert, 1849 : Peigne.

Delvau, 1866 : s. m. Abbé, prêtre, — dans l’argot des voyous et des voleurs. Serpillière de ratichon. Soutane de prêtre. On dit aussi Rasé ou Rasi.

Delvau, 1866 : s. m. Peigne, — dans l’argot des faubouriens.

Rigaud, 1881 : Peigne. Le peigne a la forme d’un râteau, et c’est en effet le râteau de ce gazon qu’on nomme la chevelure.

La Rue, 1894 : Peigne. Prêtre.

Virmaître, 1894 : Curé. Ratichon est un mot ancien. On le trouve dans Olivier Chéreau à propos des Arche-Suppots chargés de réformer le langage, mais là, il n’est pas pris dans le sens de prêtre (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 : Curé.

Hayard, 1907 : Prêtre.

France, 1907 : Peigne. Ratichon, en ce sens, a la signification de petit rateau.

France, 1907 : Prêtre. Serpillière de ratichon, soutane.

Chez nous, si un prêtre à qui nous aurions refusé d’acheter des parts du Paradis s’amusait à nous excommunier, nous nous en tiendrions les côtes. À Madrid, où le catholicisme est plus fort que la loi et où le lieutenant de gendarmerie Portas tenait un crucifix d’une main, tandis que de l’autre il brûlait, avec un tisonnier rougi au feu, les chairs des prisonniers de Montjuich, le ministre des finances espagnoles — une sinécure — est bien obligé de prendre ou tout au moins d’avoir l’air de prendre au sérieux l’anathème que lui adresse l’impudent ratichon.

(Rochefort)

anon., 1907 : Curé.

Ratichon, -ne

Vidocq, 1837 : s. — Abbé, abbesse.

Ratichon, rasé, raze, razi

Larchey, 1865 : Prêtre. — Mot à mot : ratissé, rasé. — Allusion à sa tonsure et à sa figure rosée. V. Momir.

Ratichonne

Ansiaume, 1821 : Abbaye.

Il y a une bonne affaire à faire dans la ratichonne.

Ratichonné

Halbert, 1849 : Peigné.

Ratichonner

Delvau, 1866 : v. a. Peigner.

Rigaud, 1881 / France, 1907 : Peigner.

France, 1907 : Voler les troncs dans les églises.

Ratichonnesque

France, 1907 : Qui tient de l’église, du prêtre.

En plus, c’était les Rogations, la traditionnelle chienlit ratichonnesque à travers la cambrousse, pour la prétendue bénédiction de la récolte et des bicoques ; une réminiscence pure des dimes du « bon vieux temps » que le cul-terreux a tant dans le nez.

(Le Père Peinard)

Ratichonnesse

Ansiaume, 1821 : Abbesse.

Il faudra que j’aille bounir avec la ratichonnesse.

Ratichonnière

Vidocq, 1837 : s. — Abbaye.

Delvau, 1866 : s. f. Église.

Rigaud, 1881 : Communauté religieuse.

France, 1907 : Séminaire, couvent, monastère, église.

Il sortait comme moi de la grande ratichonnière, comme disent les faubouriens, et pas plus que moi n’avait à se louer des hauts mandarins de Saint Sulpice.

(Les Confessions de l’abbé Ledru)

Ratier

d’Hautel, 1808 : Pour dire fantasque, bizarre, capricieux. On dit aussi ratière au féminin.

France, 1907 : Ouvrier tailleur qui travaille chez lui la nuit.

Ratière

France, 1907 : Jeu de hasard où le tenancier gagne toujours. Il se compose d’une boîte en bois, percée d’une ouverture et de sept billes, trois rouges, trois noires et une blanche. Un petit carton où sont trois chevaux correspond.

— Écoute voir, c’est Panpan qui nous montre une ratière de son invention pour duper les retours de course qui jouent la consolation en chemin de fer.

(Hugues Le Roux, Les Larrons)

Ration de la ramée

Halbert, 1849 : Nourriture de la prison.

France, 1907 : Nourriture de prison.

Ratisse

d’Hautel, 1808 : Pour dire gamme, correction, volée de coups de bâton.
On lui a donné une bonne ratisse ; il a reçu une fameuse ratisse. Se dit d’une personne qui a été fortement réprimandée ; corrigée ; maltraitée.

Ratissé

Rigaud, 1881 : Joueur qui a perdu son argent au jeu. Celui dont la poche a été ratissée par le râteau du croupier. Être ratissé jusqu’au dernier sou. La variante est : Ratiboisé.

Fustier, 1889 : Gandin, fashionable. Ç’a été le nom à la mode en 1885 pour désigner le continuateur du poisseux, du genreux.

Les jeunes ratissés (le terme est nouveau pour dire gommeux ou petit crevé), les ratissés ont couru et courent encore, comme un seul homme, lorgner, applaudir, rappeler La Goulue et Grille d’Égout… Pourquoi les ratissés ? Est-ce parce que le jeu, le baccarat, les petits-chevaux des bords de la mer ou les steeple-chases leur vident à la fois la bourse et la cervelle et les ratissent comme le râteau du croupier ? Est-ce au contraire parce que le coiffeur sue sang et eau à les épiler, les coiffer, les brosser et leur ratisse les favoris, la moustache et la chevelure (quand ils en ont), comme le jardinier ratisse les allées d’un jardin bien entretenu ?
Je n’en sais rien ; le fait est que les petits crevés sont devenus les ratissés.
Le ratissé a son féminin : la ratissée. Et je m’imagine qu’aussi bien que le croupier, la ratissée ratisse le ratissé. Le nouveau nom doit venir de là.

(Illustration, octobre 1885.)

Ratisser

d’Hautel, 1808 : Recevoir une ratisse.
Il a été joliment ratissé. Se dit d’un homme qui, engagé dans une batterie, et n’étant pas le plus fort, en a reçu tous les coups.
Se ratisser la couenne. Pour se raser le visage, se faire la barbe.
Je t’en ratisse. Pour dire, ce n’est pas pour toi, tu n’en auras pas ; cette locution équivaut à je t’en ponds, je t’en casse, etc.

Delvau, 1866 : v. a. Prendre, chiper, — dans l’argot des faubouriens. Se faire ratisser. Se laisser duper, ou voler, ou gagner au jeu.

Rigaud, 1881 : Gagner tout l’argent de quelqu’un au jeu, le dépouiller, le laisser sans un sou.

Madame Zéphyrin qui les ratissait chaque fois.

(Vast-Ricouard, Le Tripot)

La Rue, 1894 : Prendre, chiper. Gagner tout l’argent au jeu. Évincer.

Virmaître, 1894 : Voler, retourner la poche d’un individu, le ratisser avec autant de soin que le jardinier en met à ratisser ses allées (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Prendre, voler.

France, 1907 : Prendre, rafler. Se faire ratisser, perdre son argent. Je t’en ratisse, je me moque de toi, tu n’en auras pas. Allusion à l’usage de passer un morceau de bois sur la surface d’une mesure de grains pour enlever tout ce qui dépasse, ce qui s’appelle ratisser. Lorsque la mesure est vide, c’est une dérision de passer le morceau de bois. Les Romains disaient : abstergere mensuram vacuam, racler la mesure vide. Et ils passaient par moquerie l’index d’une main sur l’index de l’autre.

Ratisser (en)

Delvau, 1866 : v. a. Se moquer de quelqu’un, — dans l’argot du peuple. On n’emploie guère ce verbe qu’à la première et à la troisième personne de l’indicatif présent.

Ratisser la terrasse

France, 1907 : Coiffer, peigner.

Ratisser le bas des reins avec une brique

Virmaître, 1894 : Ce n’est guère récréatif, c’est pourtant ce que l’on dit aux personnes qui s’ennuient.
— Ah ! comme je m’ennuie.
— Ratissez-vous le bas des reins avec une brique.
Ou bien encore :
— Râclez-vous les os des jambes avec un tesson de bouteille (Argot du peuple).

Ratisseuse de colabres

France, 1907 : Guillotine.

Ratisseuse de colabres (la)

Rigaud, 1881 : La guillotine. Mot à mot : celle qui ratisse les cous.

Raton

d’Hautel, 1808 : Diminutif de rat. Nom flatteur et caressant que l’on donne à un petit enfant.

Vidocq, 1837 : s. m. — Petit voleur de dix à douze ans que les grands voleurs font entrer le soir dans les boutiques pour voler l’argent du comptoir, ou pour leur ouvrir la porte.
Les marchands devront, lorsque leurs boutiques ou magasins seront définitivement fermés, ordonner une visite scrupuleuse, afin d’acquérir la certitude que personne n’est caché chez eux. Ces visites devront être faites avec le plus grand soin, car les Ratons savent se blottir dans le lieu le moins apparent, et de manière à n’être vus que difficilement.
En 1815, un enfant de huit ans seulement, d’une constitution très-délicate, s’était caché dans une manne qui fut déposée chez un distillateur de la rue Boucher. Lorsque les propriétaires de l’établissement furent couchés, il ouvrit les portes aux nommés Pétroux, Villatte et Dinocourt. Ces voleurs émérites furent assez hardis pour ouvrir la boutique et allumer les quinquets. Ils ne bornèrent pas leurs exploits à cette fanfaronade, ils ne laissèrent absolument rien dans la boutique de l’infortuné distillateur.
Beaucoup de marchands ferment l’entrée de leur boutique par une porte à claire-voie à laquelle est attachée une sonnette qui tinte chaque fois qu’un étranger entre dans la boutique. Des voleurs passent un enfant, bien dressé au métier de Raton, par-dessus cette porte, qui est ordinairement très-basse. L’enfant marche à quatre pattes, se blottit sous le comptoir, et saisit le moment opportun pour enlever le tiroir, qu’il passe à son maître. Si, par hasard, la clé n’est pas au tiroir, il cherche à l’ouvrir, et s’il ne peut y parvenir, il passe à son compagnon, en marchant toujours à quatre pattes, ce qu’il trouve à sa portée et à sa convenance. Des Ratons ont volé ainsi des valeurs considérables à des orfèvres et bijoutiers qui n’avaient pas contracté la bonne habitude de fermer à la clé leurs montres et vitrines.
Comme on a pu le voir au commencement de cet article, des Ratons restent quelquefois cachés dans la boutique jusqu’à ce que tout le monde soit couché, pour ouvrir la porte à d’autres voleurs. Il faut toujours avoir la précaution de fermer toutes les issues de manière à ce qu’on ne puisse ouvrir.

Delvau, 1866 : s. m. Petit voleur.

Virmaître, 1894 : Apprenti voleur qui s’introduit par l’imposte dans une boutique et se cache dans un coin. Quand tout bruit a cessé, il ouvre la porte à son complice (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 : Celui qui commet le vol au radin.

France, 1907 : Jeune voleur ; argot des voleurs. Voir Rat.

Rats (avoir des)

Rigaud, 1881 : Être de mauvaise humeur, — dans le jargon du peuple.

Rattrapage

Delvau, 1866 : s. m. Fin de la copie donnée à un typographe. Il est tenu de composer (on dit rattraper) jusqu’au nom de son camarade écrit sur la copie suivante.

Rigaud, 1881 : Compensation.

Rattraper

d’Hautel, 1808 : Bien fin qui m’y rattrapera. Pour, je ne risquerai plus de pareille chose, je ne m’exposerai plus à de semblables aventures.


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique