Train

Train

d’Hautel, 1808 : Il va un train de chasse. Pour, on ne peut le suivre, tant il va vite ; il travaille avec une grande ardeur ; il mène une vie d’enfer.
Mener quelqu’un grand train, belle manière. Le mener vertement, avec vigueur.
Un bout en train. Un homme de joyeuse humeur, un roger-bontemps ; un bon vivant qui met tout le monde en gaieté.

Delvau, 1866 : s. m. Vacarme, rixe de cabaret, — dans l’argot du peuple. Signifie aussi Émeute. Il y aura du train dans Paris. On fera des barricades et l’on se battra.
Originairement le mot signifiait Prostibulum, et, par une métonymie fréquente dans l’Histoire des mots, la cause est devenue l’effet. De même pour Bousin.

Rigaud, 1881 : Derrière. — Coup de pied dans le train.

La Rue, 1894 : Vacarme. Le postérieur. Être en train, être légèrement ivre.

Train (du)

Larchey, 1865 : Vite. — Mot à mot : Menez-moi grand train.

Asie prit un fiacre et dit au cocher : Au Temple ! et du train ! il y a gras.

(Balzac)

Rigaud, 1881 : Vite ; c’est-à-dire bon train.

Train (du) !

Delvau, 1866 : Vite ! — dans l’argot des petites dames.

Train (en)

Rigaud, 1881 : Sur la pente de l’ivresse. Mis en train par la gaieté bachique.

Train (être dans le)

Fustier, 1889 : Suivre les caprices de la mode ; accepter toutes les innovations. Nous avions déjà dans la langue familière : être dans le mouvement, suivre le mouvement, cela ne suffit plus et, le progrès aidant, il faut être aujourd’hui dans le train !

Je crois devoir avertir Monsieur qu’il n’est plus dans le train. — … ? — Encore un progrès, Monsieur, les voyages n’ont rien à faire ici ; être dans le train veut dire : suivre le progrès.

(National, décembre 1886)

La Rue, 1894 : Ne pas être arriéré.

France, 1907 : Se mettre au goût du jour.

Ce viveur appartenait à l’espèce de ceux qui suivent les premières représentations, visitent les ateliers des peintres, assistent aux procès sensationnels, enfin qui se piquent d’être au courant, dans le train, comme on dit aujourd’hui.

(Paul Bourget, Le Disciple)

— Comment la trouvez-vous ? me demanda Monistrol.
— Belle… savante.
— Vous avez raison : elle est dans le mouvement, dans le train, dans le dernier bateau, et le dernier bateau, c’est le fin du fin.

(Dubut de Laforest)

Train (être en)

Delvau, 1866 : Commencer à se griser, — dans l’argot des bourgeois.

Train (manquer le)

Rigaud, 1881 : Manquer une bonne occasion. — Arriver trop tard.

Train (prendre le)

Rigaud, 1881 : Se sauver. — À quelqu’un qui vous obsède, on dit : Prends le train.

France, 1907 : Locution métaphorique. Courir, se hâter.
Prendre le train d’onze heures, flâner.

Train 11 (le)

Virmaître, 1894 : Les jambes. Celui qui ne peut pas se payer de voiture, fiacre ou omnibus, prend le train 11. Quand on joue au loto, celui qui appelle les numéros, quand il tire le numéro 11, crie :
— 11, les deux jambes à ma tante (Argot du peuple).

Hayard, 1907 : Les jambes.

Train d’onze heures (prendre le)

Rigaud, 1881 : Aller se promener, aller flâner, — dans l’argot des employés du service actif des chemins de fer. Réminiscence du jeu de loto où onze signifie les jambes. Le train d’onze heures c’est donc le train des jambes.

Train de charcuterie

Rigaud, 1881 : Train omnibus, — dans le jargon des employés des chemins de fer.

Parce que les voyageurs de secondes et de troisièmes en ont toujours dans leurs paniers, soit pour leur consommation en route, soit pour cadeaux apportés à leurs familles.

(Aymar de Flagv, Paris-Journal, du 24 mai 1878)

France, 1907 : Train composé de wagons de troisième classe, généralement destiné à l’écrabouillement des voyageurs ; expression populaire.

Train des équipages

France, 1907 : Tout ce qui suit.

Quand on est du séminaire, N. de D., on va à la messe, et puis à vêpres, et tout le train des équipages ! Pourquoi vous ne me demandez pas de permission pour faire vos histoires ?

(Henri Lavedan)

Train direct (un)

Rigaud, 1881 : Un verre d’absinthe ; c’est-à-dire un train direct pour Charenton. On dit encore grande vitesse pour Charenton. (La petite vitesse sert à désigner l’absinthe panachée.) Le peuple n’ignore pas que l’absinthe mène à la folie, mais il en boit tout de même, riant et de l’absinthe et de la folie.

Train direct coupé

Rigaud, 1881 : Un litre de vin en deux verres, — dans le jargon des bouchers. — Train direct sec, un litre en un verre. Chez les marchands de vin de la Villette, il existe des verres de la capacité d’un demi-litre et même d’un litre. Quand les bouchers viennent de faire un bœuf, il leur arrive souvent d’absorber, d’un trait, un train direct coupé et même un train direct sec. À la fin de la journée certains bouchers ont ainsi donné l’hospitalité à six ou sept litres de vin.

Train direct pour Charenton

France, 1907 : Locution métaphorique. Verre d’absinthe.

Train jaune

Fustier, 1889 : « Elles (les femmes de mœurs faciles) commencent à persiller dans les trains de chemins de fer ; il y en a même qui ne font qu’exploiter les trains jaunes qui emmènent chaque samedi de Paris, pour les ramener le lundi, les commerçants dont les femmes sont aux bains de mer. »

(Figaro, 1882)

France, 1907 : Train des maris. C’est celui qui conduit chaque samedis les maris dont les femmes sont en villégiature ou sur quelque plage. Ils viennent passer près d’elles la journée du dimanche, parfois du lundi, puis s’en retournent à leurs affaires, pleins de confiance en la vertu de leurs épouses.
« Je crois, dit Nestor dans le Gil Blas, que c’est à Trouville, il y a quelque vingt ans, aux beaux jours le la gloire trouvilloise, que naquit cette expression d’esprit gaulois : le Train Jaune. C’était le train des maris, qui arrivaient à la mer le samedi soir, repartaient le lundi matin, le train des porteurs de pavillon qui couvrent la marchandise… » M. Gustave Toudouze a écrit un joli roman sous ce titre : Le Train Jaune.

Dans l’ordre social, tout est convention, et si l’adultère était universel, et si tous les maris étaient cocus, il n’y aurait plus d’adultère, il n’y aurait plus de cocus. Est-ce vrai ?
— C’est vrai.
— Le train jaune est mon champ de bataille. Je fais la navette, du samedi au lundi, avec les époux ; j’écoute leurs entretiens, j’observe leurs femmes qui viennent les attendre à la gare. Un jour à Dieppe, un autre jour à Trouville, ou à Villers, tantôt je file un couple, tantôt un autre, et dès qu’il m’arrive de rencontrer un jeune homme en quête de bonne fortune, je lui signale une dame de ces messieurs. De préférence, je désigne celle qui me parait encore vertueuse. Vous ne l’ignorez pas : toutes succombent.
— Vous exagérez. Il y a beaucoup de femmes honnêtes.
— Des malades, baron, des malades !

(Dubut de Laforest)

Train onze

France, 1907 : Jeu de mot. Les jambes.

Train-train

Delvau, 1866 : s. m. Train ordinaire de la vie ; habitudes. Suivre son petit train-train. Ne pas interrompre ses habitudes. On dit aussi tran-tran.

Train-train, tran-tran

Rigaud, 1881 : Train de vie. — Aller son train-train, faire petit à petit son chemin dans le monde, faire un petit commerce à peu de frais et donnant peu de bénéfices, vivoter.

Traînante

Rigaud, 1881 : Serpette de plombier.

Trainard

Rossignol, 1901 : Verre de liquide abandonné sur une table.

Traînards (faire les)

Fustier, 1889 : Argot des cercles, des tripots. C’est ramasser les masses, les jetons oubliés sur les tables de jeux.

Traîne

Delvau, 1866 : s. f. Queue de robe exagérée mise à la mode, en ces derniers temps, par les traînées, qui s’ingénient à gaspiller les étoffes.

Traîne-braies

France, 1907 : Fainéant, lourdaud ; qui traîne ses culottes (braies), du latin braccæ. Notre Gaule du Nord avait reçu des Romains stupéfaits à la vue des culottes gauloises le nom de Gallia braccata. Celle du Midi où l’on portait le costume romain, c’est-à-dire la jambe nue, s’appelait Gallia togata.

Traîne-caisse

France, 1907 : Vieille expression bourguignonne signifiant traîneur d’épée, aujourd’hui traîneur de sabre. « Une caisse, dit Bernard de La Monnoye, est poêle, avec laquelle par mépris on compare l’épée de certains fainéants, comme si le corps rond et creux de la poêle, avec le manche qui est au bout, ressembloit à une épée, composée d’un pommeau, d’une poignée, et d’une garde par le haut, et d’une lame par le bas. Traîne-caisse est encore plus injurieux que traîne-gaine. »

(Noëls bourguignons, 1720)

Traîne-cul

France, 1907 : Fainéant, désœuvré ; locution populaire.

— N’y a pas un ménage au Culot à qui je fais les crédits que j’vous fait à vous. Et v’là que vous êtes comme toutes ces traîne-culs : vous n’me payez pas.

(Camille Lemonnier, Happe-Chair)

Traîne-cul-les-housettes

France, 1907 : Individu dont le fond de culotte tombe plus bas que les fesses.

Venez à moi, claquepatins,
Loqueteux, joueurs de musette,
Clampins, loupeurs, voyous, catins,
Et marmousets, et marmousettes,
Tas de traîne-cul-les-housettes,
Je suis du pays dont vous êtes ;
Race d’indépendants fougueux !
Le poète est le Roi des Gueux.

(J. Richepin, La Chanson des gueux)

Traîne-guêtres

Delvau, 1866 : s. m. Vagabond ; flâneur.

Traîne-la-patte

France, 1907 : Misérable, vagabond qui va péniblement dans de vieilles chaussures et dont la marche a endolori les pieds.

Traîne-paillasse

Larchey, 1865 : Fourrier. — Il règle avec l’employé des lits militaires le prix de chaque dégradation. — V. Rogneur.

Delvau, 1866 : s. m. Fourrier, — dans l’argot des troupiers. On dit aussi Gratte-papier et Rogneur de portions.

Rigaud, 1881 : Fourrier.

Merlin, 1888 : Fourrier. — Chargé de toucher les fournitures de literie.

France, 1907 : Fourrier. Allusion à ses fonctions de chargé de la literie de la compagnie ou de l’escadron ; argot militaire.

Traîne-savate

France, 1907 : Misérable, loqueteux.

La traîne-savate flaira une mauvaise affaire, et, remorquant après elle sa marmaille renâclant et se grattant à pleins poings la tignasse, détala sans retourner la tête.

(Camille Lemonnier)

Traineau (faire)

Rigaud, 1881 : Se dit en parlant des chiens qui, après avoir satisfait aux lois de la nature, frottent contre terre leur train de derrière, parce qu’ils n’ont pas l’habitude de se servir de papier comme les faibles humains.

Traîneau (faire)

France, 1907 : Se traîner sur son derrière ; argot populaire.

Traînée

Delvau, 1864 : Fille de mauvaise vie, qui traîne sa jeunesse quand elle est jeune, sa beauté quand elle en a, dans tous les endroits où vont les hommes et ou elle ne devrait pas aller.

Elle sera heureuse avec lui, si elle ne fait pas la trainée avec lui, par exemple.

(Eug. Vachette)

Delvau, 1866 : s. f. Fille de mauvaise vie, — dans l’argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Coureuse, fille des rues. Celle qui traîne ses savates dans tous les mauvais lieux.

Je t’ai vu entrer au Grand Balcon avec cette traînée d’Adèle.

(É. Zola)

Virmaître, 1894 : Fille publique qui traîne partout à la recherche de clients. Traînée est un gros terme de mépris employé par le peuple vis-à-vis d’une femme. Traînée : synonyme de rouleuse (Argot du peuple).

France, 1907 : Catin, fille de mauvaise vie.

Des filles nu-tête, un ruban rouge dans les cheveux, arrêtées devant des portes basses, mettaient la bouche en cœur à leur approche et murmuraient leur refrain monotone : « Joli garçon… beau blond… mon bijou… viens chez moi, je serai gentille, etc… » mais ces nombreuses provocations à la débauche faites sans conviction étaient plutôt le résultat de la force d’habitude que de l’espoir. Les traînées de ces bas-fonds devinaient, à la tenue et aux allures des noctambules, des touristes et non des amateurs de beautés flétries.

(G. Macé, Un Joli Monde)

Traîner

France, 1907 : Terme de courses, anglicisme pour entraîneur. Le trainer est presque toujours un ancien jockey devenu trop lourd pour continuer à monter. Son rôle est plus important que celui du jockey, car sa mission consiste à faire arriver le cheval au plus complet développement de ses forces. Il est la cheville ouvrière d’une écurie de courses.

Les trainers sont de véritables artistes en chevaux. Ils font de la science pratique, de l’histoire naturelle en action. Aussi se passionnent-ils et la spéculation se concilie-t-elle très bien, chez eux, avec l’enthousiasme.
Un trainer avait été charge d’instruire, pour le Derby, un cheval momme Éléonor.
À mesure que le jour de la course approchait, cet homme devenait inquiet, distrait, hagard. Il ne mangeait plus, ne dormait plus. Il finit par tomber tout à fait malade.
Ses parents, le voyant alité pour la première fois de sa vie, crurent qu’il touchait à ses derniers moments, et appelèrent le vicaire de la paroisse pour le consoler.
Le moribond n’entendait rien, s’agitait sur son lit et gémissait comme une âme en peine.
— Mon ami, lui dit le vicaire, n’avez-vous point quelque chose sur la conscience qui vous tourmente ? S’il en est ainsi, je vous engage à me le confier.
— Oui, répondit le jockey, et je le dirai, mais à vous seul.
Le vicaire se baissa vers le mourant, et celui-ci lui murmura dans l’oreille :
— Éléonor est un cheval douteux.
À quelques jours de là, le cheval douteux gagna deux grands prix, celui du Derby et celui des Oaks.
Le trainer se releva guéri.

(Tony Révillon)

Traîner la savate

Delvau, 1866 : v. a. Être misérable, n’avoir rien à se mettre sous la dent ni aux pieds, — dans l’argot des bourgeois, qui ne manquent ni de bottes, ni de pain. C’est le to shuffle along des Anglais.

Traîner le cheval mort

Delvau, 1866 : v. a. Avoir du travail payé d’avance, — dans l’argot des ouvriers. On dit aussi Faire du chien.

France, 1907 : Avoir touché son salaire à l’avance et l’avoir dépensé ; argot populaire.

Traîner sa savate quelque part

Delvau, 1866 : v. a. Aller quelque part, se promener, — dans l’argot du peuple. On dit aussi Traîner ses guêtres.

Traîner ses guêtres

Rigaud, 1881 : Marcher à l’aventure, flâner bêtement en usant ses souliers et quelquefois les souliers des autres.

France, 1907 : Errer çà et là.

Rien n’est maussade comme d’aller traîner ses guêtres sans efforts.

(Paul Déroulède)

Traîner son boulet (ou sa chaîne)

Delvau, 1864 : Terme populaire qui signifie ; avoir toujours sa femme légitime au bras, sur le dos, ou sous la pine. — Le mariage étant une chaîne, on en a pour jusqu’à la fin des jours de l’un ou de l’autre.

Traîneur de sabre

Delvau, 1866 : s. m. Soldat fanfaron qui croit faire beaucoup d’effet en faisant beaucoup de bruit et qui ne réussit qu’auprès des filles, amies des soudards. Type aussi vieux que le monde, puisque les anciens avaient aussi leur machærophorus…
Mais, eurêka ! me voilà sans le vouloir sur la piste de maquereau. Qu’en pensent messieurs les étymologistes ?…

Traîneuse

Rigaud, 1881 : Fille qui stationne dans les gares, attendant les trains de voyageurs. La gare du Havre est encombrée de traineuses.

Virmaître, 1894 : Robe. Allusion à la traîne de la robe qui balaye les trottoirs. On dit également : une balayeuse (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : V. Rôdeuse.

France, 1907 : Robe longue qui ramasse les ordures et les crachats du trottoir.

Traintrain

France, 1907 : Habitude. Aller son traintrain, vaquer à ses petites affaires tranquillement.

Faut pas, dit-elle, agir à la légère, ni prendre modèle sur moi. Moi, je ne suis plus une débutante, et je suis brûlée dans les quartiers chics ; je m’aime pas le bruit, et, ce qu’il me faut à présent, c’est le repos et la tranquillité, une existence réglée comme un papier de musique. À part les occasions que je trouve sans courir après, je me contente d’un petit traintrain qui suffit à mes besoins.

(Oscar Méténier, Madame la Boule)


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique