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Mi

Mi

France, 1907 : Moi. Corruption du latin mihi, encore en usage dans nombre de provinces, entre autres en Picardie, en Languedoc, en Bretagne, en Lorraine.

Envers mi, n’soyez pas trop difficile,
Veuillez écouter chin que j’vas vous dir,
Pour sujet d’mes chansons, j’ai pris not’ ville
Car tout Roubaignou s’lon mi dort et fir.

(Henri Loridan, Chansons en patois de Roubais)

Mon cœur est toujours endormy,
Réveille-le-my.

(Clément Marot)

Mi-temps

Virmaître, 1894 : Milieu. A. Delvau écrit mitan, ce n’est pas exact (Argot du peuple).

Miaulard, miauleur

France, 1907 : Nom vulgaire des mouettes et des goélands.

Miauler

d’Hautel, 1808 : Se dit du cri des chats.
Le peuple supprime l’u de ce mot et dit mialer, comme on dit piailler.

Mib

France, 1907 : Chose dans laquelle on excelle ; argot des voyous.

Mib ou Mibre

Delvau, 1866 : s. m. Tour de force quelconque, chose où l’on excelle, — dans l’argot des gamins. C’est mon mib ! C’est mon triomphe ! Signifie aussi Défi. C’est ton mib, c’est-à-dire : Tu ne feras jamais cela.

Mic-mac

Delvau, 1866 : s. m. Fourberie, tromperie cachée, intrigue, — dans l’argot du peuple.

Fustier, 1889 : Difficulté, complication, chose inintelligible.

C’est un mic-mac où personne ne comprend rien.

(Zola, Pot-Bouille)

France, 1907 : Intrigue, tripotage, menées suspectes : de l’allemand mischmasch, même sens.

La politiqu’, viande creuse,
Bouillie aux chats, affreux mic-mac,
Ne rend pas la mâchoire heureuse
Et ne met rien dans l’estomac,
Ta poule au pot, brave Henri quatre,
On l’attend toujours sous l’ormeau :
Notre fin de siècle marâtre
Ne nous offre que du chameau !

(Émile Second)

Micameau

France, 1907 : Demi-tasse de café.

— Entrez donc un instant, père Gérard, nous allons faire un petit bout de conversation tout en prenant un demi.
— Ah ! oui, c’est ainsi qu’on appelle par ici une demi-tasse de café.
— Ça a encore bien d’autres noms : on dit aussi prendre un micameau ou un sou de moka.

(Marc Mario)

Michaud

Rigaud, 1881 : Tête, — dans le jargon des voleurs.

La Rue, 1894 : Tête. Faire un michaud, dormir.

France, 1907 : Tête ; argot des voleurs.

Michaud (faire son)

Rigaud, 1881 : Dormir.

Michaud (faire un)

Boutmy, 1883 : v. Dormir un somme. Employé dans d’autres argots parisiens.

France, 1907 : Dormir.

Michaut

d’Hautel, 1808 : Avoir michaut. Pour dire, avoir envie de dormir, être tourmenté par le sommeil.
Faire son michaut. Pour, dormir un somme.

Miche

d’Hautel, 1808 : Grosse morceau de pain.
Un donneur de miche. Celui qui est en pouvoir de distribuer des faveurs, les pensions, les charges, les emplois.
Miche de St. Étienne. Nom que l’on donne aux pierres, parce que ce saint fut lapidé.
À la porte où l’on donne les miches, les gueux y vont. Pour dire que l’on courtise ceux qui distribuent les graces, les honneurs.

Delvau, 1866 : s. f. Gros morceau de pain, — dans l’argot du peuple. Se dit aussi pour Pain entier.

Et moins encor il fait du bien
Aux pauvres gens, tant il est chiche ;
Si il a mangé de leur miche.

(Les Touches du seigneur des Accords.)

Delvau, 1866 : s. f. Dentelle, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Dentelle, — dans l’ancien argot.

La Rue, 1894 : Dentelle. Argent. Pain.

France, 1907 : Dentelle.

Miché

Delvau, 1864 : Homme galant forcé d’acheter ce que les femmes galantes donnent pour rien à leurs amants de cœur.

Allumer tous les soirs la chandelle de l’hyménée en faveur d’un tas de gonzesses et d’autant de michés.

Lemercier de Neuville.

Surtout selon l’argent donné par le miché.

Louis Protat.

Larchey, 1865 : Homme payant l’amour d’une femme. — Peut venir des vieux mots michon : sot (V. Roquefort) ou michon : argent de poche (V. d’Hautel).

On appelle miché Quiconque va de nuit et se glisse en cachette Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchonnette.

Mérard de Saint-Just, 1764.

Dans une Protestation des Filles de Paris, 1790, nous lisons :

Ce pourfendeur de Mars avait bien affaire aussi de se présenter pour nous enlever nos michés.

« La biche étudiante qui avait levé un michet quelconque. » — 1860, les Étudiants du Quartier latin. On disait aussi micheton « All’ me dit : Mon fiston, Étrenne ma tirelire. Je lui réponds : Ma poule, tu m’ prends pour un mich’ton. » — Le Bâtonniste à la Halle, Aubert, 1813. Outre le miché proprement dit, il y a le miché sérieux et le miché de carton — « 1/ Le michet sérieux équivaut à l’entreteneur… Dans un lieu de plaisir où les femmes sont nombreuses, les jeunes gens se disent souvent, comme un mot d’ordre : Messieurs, ne parlez pas à la petite une telle, elle est ici avec son michet sérieux. Le même individu se désigne aussi par ce mot : Ponteur. Ce dernier mot, pris dans le vocabulaire des jeux, vient du verbe Ponter (V. Ponter). — 2/ Le michet de carton est un jeune homme bien élevé, qui fréquente les femmes entretenues. Il ne va jamais coucher chez elles, sauf durant les interrègnes des michets sérieux. En tout autre cas, sa maîtresse vient chez lui. Il ne donne que des cadeaux, paie à souper, à dîner dehors, à déjeuner chez lui. Il conduit aux courses en voitures et au théâtre en petites loges de baignoires Il ne sort point dans la rue avec les femmes. Il les salue au bois d’un petit geste. » — Cadol. — Il y a longtemps que le carton symbolise une apparence trompeuse. Saint-Simon appelait déjà le duc du Maine un roi de carton, c’est-à-dire un roi de cartes. V. Carton, Mikel.

Delvau, 1866 : s. m. Homme quelconque, jeune ou vieux, laid ou beau, disposé à acheter ce qui ne devrait jamais se vendre, — dans l’argot des filles, qui emploient depuis longtemps cette expression, contemporaine de michon (argent) et de miche (pain).

On appelle miché…
Quiconque va de nuit et se glisse en cachette
Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchette,

dit un poème de Médard de Saint-Just (1764).
Miché de carton. Amant de passage, qui n’offre que des gants de filoselle. Miché sérieux. Protecteur, ou amant généreux qui offre une boîte entière de gants.

Delvau, 1866 : s. m. Client, — dans l’argot des photographes ; homme ou femme qui achète, qui paie, — dans plusieurs autres argots.

La Rue, 1894 : Niais. Dupe. Homme qui pave généreusement les faveurs d’une Aile. Miché de carton, homme qui paye mal ou pas du tout les filles.

Virmaître, 1894 : Homme qui monte avec une fille, en payant, ou qui y couche. Miché était déjà connu en 1764. Merard de Saint-Just dit ceci :

D’où vient qu’on appelle miché
Quiconque va de nuit et se glisse en cachette
Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchette (Argot des souteneurs).

Hayard, 1907 : Riche client d’une fille.

France, 1907 : Niais, dupe, ou simplement client, dans l’argot des souteneurs et des prostituées. Le miché est celui qui paye, du vieux mot michon, bien, richesse. Mais les michés n’apportent pas toujours la richesse, il y en a qui ne payent pas ou qui payent peu : ce sont les michés de carton. Quant à ceux qui payent bien, on les appelle michés sérieux.

Les femmes – dit Léo Taxil — appellent « michés sérieux » les clients qui montent et flanelles ceux qui se contentent de peloter et de payer un petit verre…
On a prétendu, ajoute-t-il, que toutes les prostituées de Paris avaient un argot ou un jargon qui leur était particulier ; ceci n’est pas exact, nous avons vu qu’elles désignent le client sous le nom de miché, le visiteur qui ne monte pas sous celui de flanelle. Pour elles, les inspecteurs sont des « rails », un commissaire de police un « flique », une jolie fille une « gironde » ou une « chouette », une fille laide un « roubion », etc. Ce sont là des expressions qui font partie du langage des souteneurs qui, eux, possèdent un véritable argot ; elles en retiennent quelques mots et les mêlent à leur conversation. Quant aux prostituées qui s’entendent avec les voleurs et qui n’ont recours au libertinage que pour cacher leur réelle industrie, il n’est pas étonnant qu’elles ont adopté le jargon de leurs suppôts ; mais on ne peut pas dire que ce langage soit celui des prostituées.

(La Prostitution à Paris)

Or, quelqu’un les remarque et se met à les suivre,
L’espoir de voir finir la dèche les enivre ;
Leur pas se ralentit, d’instinct, sans faire exprès…
Le monsieur est bien mis et fume des londrès,
Tandis que leurs premiers amants fumaient la pipe ;
Elles tournent la tête, et jetant sur ce type,
Par-dessurs leur épaule, un regard curieux,
Songent : « Oh ! Si c’était un miché sérieux ! »

(André Gill, La Muse à Bibi)

Un vieux miché, un vieux beau.

Tel au printemps un vieux miché
Parade en galante toilette.

(André Gill)

On écrit aussi michet.

Vous êt’s tous des fils de michets
Qu’on envoie téter en nourrice ;
C’est pour ça qu’vous êt’s mal torchés…
Allez donc dir’ qu’on vous finisse !

(Aristide Bruant)

anon., 1907 : Le client.

Miché de carton

Delvau, 1864 : Honnête homme qui achète de l’amour en marchandant, ce qui le fait mépriser des amoureuses.

Les Valaques ont près des femmes une grande réputation de mauvaise foi… Aussi elles les évitent et les ont placés au premier rang des michés de carton.

Vermorel.

Virmaître, 1894 : Homme à qui une fille demande cinq louis et qui lui offre quarante sous. On dit aussi : miché à la mie de pain (Argot des filles).

Miche de profonde

France, 1907 : Argent.

Miche de profonde, michon

Rigaud, 1881 : Argent. — L’argent est le pain de la poche.

Miche de Saint-Étienne

Rigaud, 1881 : Pierre, par allusion à la lapidation de saint Étienne.

Miché galetteux

France, 1907 : Miché qui a de l’argent ; autrement dit, miché sérieux.

Il n’y a pas au Conservatoire une seule gamine de quinze ans qui, au bout de six mois, ne pense à avoir un miché galetteux pour lui fourrer du luxe…

(Victorien du Saussay, L’École du vice)

Miche sérieux

Delvau, 1864 : Homme qui ne regarda pas à la dépense avec la femme qui l’a levé à Mabille ou sur le boulevard, et dont il devient souvent le Monsieur.

Fichtra ! C’est un miché sérieux !

Lemercier de Neuville.

Miché, Mikel, Miquel

Rigaud, 1881 : Nigaud ; homme simple, dupe, gobe-mouche. Monter un miquel, duper quelqu’un à qui on avait promis monts et merveilles.

Michel (ça fait la rue)

France, 1907 : Sous-entendu : le-Comte, jeu de mots sur compte.

— Eh bien, si j’y coupe pas, v’là tout, je coucherai à la boîte comme les camarades, et ça fera la rue Michel.

(Georges Courteline)

Michel cassant ses œufs

France, 1907 : Le tonnerre.

Michelet (faire le)

France, 1907 : Se glisser dans les foules pour palper les parties charnues des femmes.

Le vieux sénateur ne manquait jamais un de ces sermons mondains qui, pendant le carême, attirent les dames du noble faubourg ; il attendait pieusement la sortie et, perdu dans la foule, il se livrait avec une ardeur toute juvénile à ces manœuvres qu’on appelle en termes vulgaires faire le michelet.

(Les Propos du Commandeur)

Michelet, Michelin (faire le)

Rigaud, 1881 : C’est, à la faveur d’une cohue, dans l’obscurité, apprécier, à la manière de Tartuffe, l’étoffe de la robe d’une Elmire quelconque. Il y a des amateurs qui ne vont au milieu des foules que pour faire « les michelins ». Au spectacle de Guignol aux Champs-Élysées, les soldats font les michelins auprès des bonnes d’enfants. Autrefois le grand rendez-vous des michelins était au théâtre Comte. Grâce à l’obscurité nécessitée par la représentation des Ombres chinoises, les michelins avaient beau jeu. Parfois se faisait entendre le cri de quelque Lucrèce effarouchée ; mais le spectacle n’en était pas troublé, et des rires étouffés répondaient seuls à cet appel de la vertu indignée.

Michelets (avoir ses)

Rigaud, 1881 : Avoir ses menstrues, — dans le jargon des femmes qui ont lu le livre de Michelet sur l’Amour.

Michet

Rigaud, 1881 : Homme qui paye les femmes autrement qu’en belles paroles. Mot connu au XVIIIe siècle. — Michet sérieux, celui sur qui une femme peut compter, celui qui donne beaucoup d’argent et a passé un bail. Elles (les pierreuses) tournent la tête, et, jetant sur ce type, « Par dessus leur épaule un regard curieux, » Songent : « Oh ! si c’était un miché sérieux ! » (La Muse à Bibi, Les Pierreuses.) Bon Michet, oiseau de passage généreux. — Michet de carton, oiseau également de passage, mais marchandeur, un qui ne dit pas son nom et qu’on ne revoit plus.

Rossignol, 1901 : Homme généreux qui dépense sans regarder. Lorsqu’une fille publique trouve un client, elle a rencontré un michet ; s’il n’est pas généreux, c’est un michet à la mie de pain. Celui qui dépense sans compter et à qui l’on vend plus cher qu’à un autre est encore un michet.

Micheton

Delvau, 1866 : s. m. Petit miche, homme à qui les marchandes d’amour font un rabais.

Rigaud, 1881 : Michet en raccourci. Jeune homme, rhétoricien, qui apporte à une femme le peu d’argent dont il dispose, et qui, au besoin, en dérobe à sa famille.

Virmaître, 1894 : Petit miché qui rale sur le prix des faveurs des filles (Argot des souteneurs).

Rossignol, 1901 : Homme qui paye les femmes.

Hayard, 1907 : Petit miché.

France, 1907 : Petit miché, qui paye peu ou marchande.

Michetonner

France, 1907 : Chercher un micheton.

Jeanne, t’en souvient-il des dèches d’autrefois ?
Las ! Alors tu portais moins de batiste fine,
Tu n’allais pas encore michetonner au Bois.

Micheuse, mirante, miradon

La Rue, 1894 : Glace.

Michon

d’Hautel, 1808 : Il a bien du michon. Pour, il a bien de l’argent pour avoir des miches.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Argent. Faire du michon, amasser de l’argent.

France, 1907 : Fortune, richesse : avoir du michon. Foncer du michon, payer. De michon est venu miché.

Michon (du)

anon., 1827 : De l’argent.

Bras-de-Fer, 1829 : De l’argent.

Halbert, 1849 : Du pain blanc.

Micmac

d’Hautel, 1808 : Manigance, intrigue, embarras, désordre, confusion.

Microbe

France, 1907 : Injure signifiant avorton, être sans aucune valeur.

On se prend à douter si l’avenir, au lieu de désigner notre siècle par le nom de quelque rare génie, ne l’appellera pas le siècle de microbes ; nul mot ne rendrait mieux notre physionomie et le sens de notre passage à travers les générations.

(M. de Vogüé)

France, 1907 : Du grec micros, petit, et bios, vie. Mot créé vers 1878 par Sédillot, chirurgien de Strasbourg, pour désigner les plus petits représentants de la nature vivante. Ces êtres se mesurent par millièmes ou dixièmes de millième de millimètre. Les microbes se reproduisent avec une vitesse prodigieuse. En 24 heures, 16 millions d’individus peuvent provenir d’un seul. Un millimètre cube de sang corrompu donne en un jour le nombre de 5,000 milliards de micro-organismes. La doctrine microbienne, dite théorie parasitaire ou doctrine du contage animé, explique les phénomènes de la contagion et de l’épidémicité des maladies infectieuses. Les fièvres éruptives, la fièvre typhoïde, les pneumonies, les abcès, les furoncles, la tuberculose, etc., sont causés par la pénétration du microbe dans l’organisme.
On dit « ensemencer » ou « cultiver » les microbes parce que, par une suite de gradations insensibles, ils se rattachent aux moisissures et aux algues, ce qui les a fait considérer à tort comme des végétaux.

Microbiologie

France, 1907 : Étude du microbe. « On peut dire que la microbiologie a pris naissance avec les travaux de Pasteur sur le vin et la bière. »

(Jules Héricourt)

Microscope

d’Hautel, 1808 : Instrument qui grossit les objets. Le peuple dit par corruption mitroscope.

Midi

d’Hautel, 1808 : À midi précise, sur les midi. Beaucoup de personnes parlent ainsi, au lieu de dire au masculin et au singulier à midi précis ; sur le midi. Il en est de même du mot minuit.
Chercher midi à quatorze heures.
Chercher une chose où elle n’est pas. Voyez Heure.
Chercheurs de midi. Filous qui s’introduisent dans les maisons, pour y exercer des vols.
Il ne voit pas clair en plein midi. Se dit d’un homme entêté, qui a peu de jugement, et qui ne veut pas convenir de ses erreurs.

Rigaud, 1881 : Trop tard. — Il est midi, cela n’est pas vrai. — Les ouvriers se servent encore de cette expression dans le sens de : « Méfions-nous », lorsqu’il y a des étrangers à l’atelier.

France, 1907 : Trop tard. Il est midi, je ne vous crois pas, cela n’est pas vrai. Il est midi sonné, ce n’est pas possible, c’est défendu.

— Faut pas te figurer comme ça que t’as le droit de te coller un bouc… Quand tu seras de la classe comme me v’là, ça se pourra, mais jusque-là, c’est midi sonné.

Midi !

Delvau, 1866 : Exclamation du même argot [du peuple], employée pour signifier : Trop tard ! Il est midi ! C’est-à-dire je ne crois pas un mot de ce que vous dites ; « Je ne coupe pas dans ce pont-là ! »

Merlin, 1888 : Trop tard ! ou tu peux t’ fouiller ! (argot parisien).

La Rue, 1894 : Trop tard. Il est midi ! cela n’est pas vrai.

Midi (chercheurs de)

France, 1907 : On appelait ainsi autrefois des filous qui se glissaient dans les maisons, un peu avant le dîner de midi, pour faire main basse sur l’argenterie.

Midi (il est)

Larchey, 1865 : Il n’est plus temps. — Date du temps où midi était l’heure du repas, celle où cessait toute affaire.

Midi à quatorze heures (chercher)

France, 1907 : Chercher des difficultés où il n’y en a pas, tergiverser.

Elle commença, sans chercher autrement midi à quatorze heures, par surexciter Flamboche et l’affoler au désir. Sous cet amour respectueux et presque religieux, qui se dupait lui-même à se croire en extase uniquement devant la splendeur morale de la sainte, elle avait tout de suite flairé, elle, le secret bouillonnement de la puberté en éveil. Elle en avait tant l’expérience, de ces chaleurs animales dont fermentent les adolescents ! Elle en avait tant su éteindre, après les avoir attisées dans son officine de la rue de la Lune !

(Jean Richepin, Flamboche)

Midinette

France, 1907 : Trottin ou jeune ouvrière qui sort de l’atelier ou du magasin à midi, soit pour déjeuner, soit pour prendre l’air. Le mot est de Paul Arène.

Au déjeuner, par bandes, se tenant par le bras, les ouvrières descendent, emplissent les trottoirs de gaieté débordante, causent à voix aiguë, s’interpellent sans souci des calembredaines que leur débitent les passants ; à cette heure, à ce quart d’heure plutôt, l’amour est mis de côté, laissé pour plus tard, on a un instant pour respirer à l’aise loin de la patronne et de ses cris, de l’ouvrage abrutissant, de l’air lourd, chargé d’odeurs fades qui écœurent et tandis que les poumons s’atrophient dans la position courbée où vous force à vous tenir l’ouvrage sans cesse renaissant… Aussi le quart d’heure est-il largement employé au récit des incidents importants de la veille, fâcheries d’amoureux, bourrades de la mère, observations sévères d’un père ébranlé dans sa crédulité par des veillées si fréquentes en morte-saison ; le tout entrecoupé de — ma chère ! — de rires qui partent, éclatent tout à coup comme des fusées sous le nez du suiveur interdit, décontenancé, qui lâche prise. Saluez, les midinettes passent !

(Jules Davray, L’Amour à Paris)

Midship-ça !

France, 1907 : Exclamation des élèves de l’École navale à la clôture d’un cours.

Quelle que soit l’application déployée par les élèves dans leurs différents cours, on comprend facilement qu’ils en voient arriver la fin avec plaisir.
Pour les uns, c’est l’année de fistot qui se termine ; pour les autres, c’est le galon d’aspirant qui s’approche. Ainsi, toutes les fois qu’un cours est clôturé, les fistots, pour témoigner leur joie, dès que le professeur a quitté l’amphithéâtre, crient-ils par trois fois : Ancien-ça ! expression elliptique signifiant : Désormais nous n’assisterons plus à un cours de même nature qu’en qualité d’ancien.
De leur côté, les anciens, à la fin de chaque cours, crient par trois fois : Midship-ça ! midship étant le nom anglais des aspirants de marine.

(Un ancien officier, Histoire de l’École navale)

Midship, midshipman

France, 1907 : Aspirant de marine. Anglicisme.

Dans les allées, un flot naissait, plus mêlé, des soldats, des marins, des officiers de tous corps, des filles à toilette tapageuse, des ouvrières riant très haut et des jeunes gens par bandes, — beaucoup de jeunes gens, une jeunesse de province, calicots ou commis, — des étudiants en médecine, des midships aussi, des aide-médecins, des sous-lieutenants en bourgeois qui, très gais, brocardaient les femmes au passage.

(Paul Bonnetain, Le nommé Perreux)

Midshiper

France, 1907 : Se dispenser de faire quelque choses, carotter le service ; argot du Borda.

(Un ancien officier, Histoire de l’École navale)

Mie

d’Hautel, 1808 : Jeûner entre la mie et la croûte. Ne point observer de jeûne.

France, 1907 : Pas, point. Vieux mot qui n’est plus usité que dans certaines provinces : du latin mica, petit morceau, miette.

Maître Adam le Bossu, qui bossu n’étais mie,
Voici qu’on te réveille en ta gloire endormie !
S’il est des malveillants pour en être étonnés,
Réponds-leur, bon raillard, avec un pied de nez.

(Jean Richepin)

On dit ironiquement dans le Centre : manger de la mie, pour plaider, être en procès, — les procès vous réduisant aux miettes (mica).

Mie de pain

Larchey, 1865 : Vermine (Vidocq). — Allusion à la démangeaison causée par une mie de pain égarée.

Delvau, 1866 : s. f. Pou, — dans l’argot des voleurs, qui savent combien une miette de pain égarée sous la chemise cause de démangeaisons à la peau.

Delvau, 1866 : s. f. Chose de peu de valeur, — dans l’argot des typographes. Ils disent cela à propos des gens qui ne leur conviennent pas.

Rigaud, 1881 : Objet de nulle valeur. — Individu déplaisant, — dans le jargon des typographes. — Pellicules de la tête, — dans le jargon des enfants.

Boutmy, 1883 : s. f. Chose de peu d’importance, de mince valeur Compositeur mie de pain, ouvrier peu habile. Metteur en pages mie de pain, celui qui n’a que des ouvrages de peu d’importance, ou qui n’est chargé que par occasion de la mise en pages d’un travail de cette sorte.

Virmaître, 1894 : Pou. On sait combien une mie de pain est désagréable sur la peau ; le pou occasionne une démangeaison semblable (Argot des voleurs).

Virmaître, 1894 : Moins que rien. Les typos, par la grande habitude, savent, du premier coup d’œil, discerner un bon article d’un mauvais. Le mauvais, c’est de la mie de pain (Argot d’imprimerie).

Rossignol, 1901 : Pou.

dis donc, Gugusse, quoiq’t’as sur le cou ? — C’est une mie de pain. — Une mie de pain ? ça marche !

France, 1907 : Pou.

— Oui, hier, je me peignais avec les doigts, rapport que j’ai oublié mon démêloir dans mon dernier garni. Vlan ! Voilà que j’en ramène un. Saleté de bête ! que je dis, et j’allais l’écraser quand je vois un capitaine d’artillerie qui passe avec sa dame.
— Permettez, mon officier, que j’y fais.
— Quoi donc ?
— Là, sur votre dolman, une mie de pain, vous aurez coudoyé quelqu’un de sale.
Et je fais celui qui enlève le pou en ayant l’air de me cacher de la dame.
— Merci, mon ami, qui dit.
Et il m’allonge une pièce de vingt ronds.

(Guy Tomel, Le Bas du pavé parisien)

France, 1907 : Chose de nulle valeur. Ouvrier mie de pain, mauvais ouvrier. Mac à la mie de pain, souteneur qui ne sait pas tirer profit de sa marmite.

Pègr’… mais pas pègre à la mie d’pain,
Pègre d’naissanc’, d’autor et d’riffe,
Pègre d’la haute et j’colle un paing
Au pantrio, quand i’ se r’biffe.

(Aristide Bruant, Dans la rue)

Mie de pain (à la)

Hayard, 1907 : De peu de valeur.

Mie de pain à pattes

France, 1907 : Petit jeune homme chétif et bien mis, gommeux. Argot populaire.

Mie de pain à ressort

Hayard, 1907 : Pou.

Miel !

Delvau, 1866 : Interjection de l’argot des bourgeois, amis de l’euphémisme.

France, 1907 : Exclamation que les gens polis emploient pour merde. On dit également miel de blé.

Miel (c’est un)

Delvau, 1866 : Phrase de l’argot des faubouriens, qui disent cela à propos de tout, et surtout mal à propos. Une chose leur paraît bonne ou belle : C’est un miel. Ils entrent dans un endroit qui pue : C’est un miel. On se bat devant eux à coups de poing ou de couteau, et le sang coule : C’est un miel, etc., etc.

Rigaud, 1881 : C’est bon, c’est amusant, très agréable ; et par ironie, c’est laid, ennuyeux, désagréable.

France, 1907 : C’est une chose excellente. On dit aussi : C’est un beurre !

Mielleux

d’Hautel, 1808 : Avoir un air mielleux. Pour dire fade, doucereux, comme sont ordinairement les fourbes et les hypocrites.

Miette

d’Hautel, 1808 : Faire sauter les miettes. Manger avec un grand appétit, avidement ; mettre les morceaux doubles, comme il arrive lorsqu’on a pris beaucoup d’exercice, ou que l’on s’est appliqué à un travail pénible.
Rendre les miettes. Pour vomir, rendre les alimens que l’on a pris avec excès.

Miette (une)

Larchey, 1865 : Un peu.

Minute ! je me chauffe les pattes une miette.

Gavarni.

Delvau, 1866 : Un peu, — dans l’argot du peuple.

Mieux vaut règle que rente

France, 1907 : Régler l’emploi d’un revenu si modique qu’il soit est préférable que dépenser au delà d’un revenu même considérable ; l’homme de fortune modeste qui règle sa dépense est plus riche que l’opulent qui dépense sans compter.
« On ne devient pas riche, dit Fielding, parce que l’on gagne, mais par ce que l’on épargne. » C’est la traduction du dicton italien : Lo sparagno è to primo guadagno, l’épargne est le premier gain. Les Anglais, gens pratiques, ont une quantité de dictons sur ce sujet. En voici quelques-uns : Waste not, want not : ne gaspillez rien, vous n’aurez besoin de rien. Take care of the pence, the pounds will take care of themselves : prenez soin des sous, les pièces d’or prendront soin d’elles-mêmes. A fool and his money are soon parted, un écervelé et son argent sont bientôt séparés. A fool may make money, but it takes a wise man to spend it ; un fou peut gagner de l’argent, mais il faut un sage pour le dépenser. Wilful waste makes woeful want, grands gaspillages engendrent grands besoins. A penny saved is a penny got, sou épargné est sou gagné.

Mièvre

d’Hautel, 1808 : Eveillé, espiègle ; joyeux, débauché.

Miévrerie

d’Hautel, 1808 : Petite malice, tour de jeunesse.

Miévreté

d’Hautel, 1808 : Fredaines, malignité.

Mignard

France, 1907 : On appelle ainsi, dans l’argot de la boucherie, le bélier que l’on place devant les moutons pour les faire entrer à l’abattoir.

… ce bélier parjure que l’argot de la boucherie appelle un mignard, et la pègre de la Roquette un mouton, parce qu’il sert à conduire ses frères au supplice.

(Hugues Le Roux, Les Larrons)

anon., 1907 : Enfant.

Mignarder

France, 1907 : S’amuser, jouer surtout avec des filles.

Mignardise

d’Hautel, 1808 : Affectation de gentillesse, de délicatesse ; flatterie, enjôlerie, caresses fines et intéressées.

Mignon

d’Hautel, 1808 : Un mignon. Homme d’une lâche complaisance, asservi à d’infâmes caprices.
Un péché mignon. Inclination fautive dans laquelle on tombe à tout moment.
Argent mignon. Épargnes, économie, abondance d’argent comptant, que l’on dépense en frivolités, que l’on emploie à satisfaire ses moindres désirs.

Delvau, 1864 : Jeune pédéraste… passif. — Apollon à belles fesses. — L’histoire faisant mention des pages de Henri III, qui étaient non-seulement ses favoris, mais encore ses mignons, ne laisse pas de doute sur l’emploi qu’ils avaient auprès de leur maître.

Ce qu’il est le plus naturel de faire à la femme est précisément ce dont elle se soucie le moins ;… tantôt elle veut qu’où la traite comme un mignon… tantôt, etc…

A. de Nerciat.

Petit fils, petit mignon, Mâle ou femelle, Je sais ton nom.

Béranger.

Et j’abandonne au vicaire de Dieu
Ses trois clés d’or, ses fulminantes bulles,
Son Vatican, son cardinal neveu,
Ses beaux mignons, ses nièces et ses mules.

Parny.

France, 1907 : Jeune garçon servant aux plaisirs hors nature ; du celtique mion, amour, ou de l’ancien allemand minnia, même sens. Les mignons d’Henri III sont restés célèbres ; lorsqu’ils se battirent avez ceux du duc de Guise, on chanta dans les rues ce De profundis :

Que Dieu reçoive en son giron
Quélus, Schomberg et Maugiron !

D’ignobles débauches, entremêlées de capucinades et de coups d’épée, furent toute la vie de ces mignons, qui, du reste, moururent tous jeunes pour la plupart.

(Laroussse)

Et j’abandonne au vicaire de Dieu
Ses trois clefs d’or, ses fulminantes bulles,
Son Vatican, son cardinal neveu,
Ses beaux mignons, ses nièces et ses mules.

(Piron)

Mignon de couchette

France, 1907 : Joli garçon aimé des femmes, ce que le peuple appelle plus crûment tiroir à putain.

Le voilà le beau fils, le mignon de couchette,
Le malheureux tison de ta flamme secrète.

(Molière)

… Ce beau mignon de couchette
Dont Achille vengea la mort.

(Scarron)

Mignonne

Delvau, 1864 : Nom que l’on donnait au XVIIe siècle, à l’époque de leur apparition, à toutes les femmes entretenues.

Les riches seigneurs et les financiers ne se faisaient pas faute d’entretenir plusieurs mignonnes à la fois dans différents quartiers de la ville, ou même de les réunir ensemble comme dans un sérail.

P. Dufour.

Il me faut donc chercher quelque jeune mignonne,
Que, pour fille de chambre, en gaussant je lui donne.

J. De Schélandre.

Mignot

France, 1907 : Câlin, qui aime à être caressé ; de mignon. Parler mignot, parler en mignardant.

Ainsi ce n’est pas chose vainne,
Sa femme mignote et fetisse (bien faite),
De peur d’enlaidir à la peine,
Refuse à devenir nourrisse.

(Coquillard, XVIe siècle)

Mignoter

d’Hautel, 1808 : Caresser, dorloter, traiter délicatement. Il se dit particulièrement des enfans.
Se mignoter. Se traiter avec beaucoup de précaution, mettre de l’affectation dans les soins qu’on prend de sa personne.

Fustier, 1889 : Cajoler, embrasser, faire mignon.

Elle mignotait Céline, sa préférée, dont la tignasse jaune de chrome l’intéressait.

(Huysmans, les Sœurs Vatard)

France, 1907 : Caresser.

Mignotise

d’Hautel, 1808 : Flatterie, cajolerie, basse caresse.

Mijaurée

d’Hautel, 1808 : Sobriquet injurieux et méprisant que l’on donne à une femme qui s’en fait trop accroire ; à une bégueule, et généralement à ces indolentes, à ces idiotes toujours malades, et qui ne sont bonnes à rien.

Delvau, 1864 : Fille ou femme qui, devant l’homme, affiche des prétentions par des manières affectées et ridicules qui nous font… pisser. — Oh ! la ! la !

Ne va pas avec moi faire la mijaurée.

Regnard.

Fi des coquettes maniérées !
Fi des bégueules du grand ton !
Je préfère à ces mijaurées
Ma Jeannette, ma Jeanneton.

Béranger.

Delvau, 1866 : s. f. Femme dédaigneuse et plus bégueule qu’il convient, — dans l’argot des bourgeois. Faire la mijaurée. Faire des manières et des façons pour accepter une chose. On dit aussi Minaudière.

Mijoter

d’Hautel, 1808 : Mijoter une affaire. La traiter doucement, avec beaucoup de prudence ; la mener petit à petit au succès.
Se mijoter. Le même que mignoter.

Delvau, 1866 : v. a. Entreprendre à la sourdine ; préparer lentement, — dans l’argot du peuple, qui emploie ce verbe au figuré.

Rigaud, 1881 : Combiner avec soin. — Mijoter une affaire, une intrigue. — Mijoter un livre.

France, 1907 : Bouillir lentement, se préparer de longue main.

Comprenez donc que ce mot République, nous ne le gardons que pour la frime, ça fait patienter les ventres creux, —— en attendant la monarchie se mijote.

(Père Peinard)

J’suis pourtant pas un imbécile !…
Pour mijoter un coup d’fric-frac,
Ya pas deux comm’ mon gniasse au mille…
Mais quand i’ faut marcher, j’ai l’trac !

(Aristide Bruant, Dans la rue)

Mijou

Hayard, 1907 : Malade.

France, 1907 : Faux malade. Faire Le mijou, simuler une maladie.

Mijou (faire le)

Virmaître, 1894 : Simuler une maladie (Argot des voleurs).

Mikel

Larchey, 1865 : Dupe (Vidocq). — C’est le nom de Michel dont le diminutif michon signifiait autrefois sot. V. Roquefort.

Delvau, 1866 : s. m. Dupe, — dans l’argot des saltimbanques.

Mikel, miquel

France, 1907 : Sobriquet que les diseurs de bonne aventure donnent à leurs dupes ; du nom propre Michel, qui signifiait autrefois niais, comme aujourd’hui Jean-Jean, Colas, etc.

Milet (un)

anon., 1907 : Mille francs.

Miliasse

France, 1907 : Bouillie de grains de maïs.

Milieu

d’Hautel, 1808 : Il n’y a pas de milieu à cela. Pour, il n’y a pas d’autre parti à prendre ; il faut en passer par-là.

Delvau, 1864 : Le con, par devant ; — le cul, par derrière. — Il n’y a pas de milieu, nom de Dieu !

Ce n’était que l’enjeu, nom de Dieu !
Pour luron de ma sorte.
Je fêtai son milieu ! nom de Dieu !
Trois fois avant que j’ sorte, nom de Dieu !
J’ fous la quatrième à la porte, nom de Dieu !
J’ fous la quatrième à la porte.

F. de Calonne.

Le doux milieu demandait à sa dame.
Pour y trouver un repos bienheureux.
Et la pauvrette s’est donnée
D’un vit par le milieu du corps.

Collé.

Milieu (empire du)

France, 1907 : Le plus puissant empire de la terre, celui que gouverne le roi Éros et qui s’étend du nombril aux cuisses.

Un prêtre confessait une jeune personne, de celles qui jettent dès l’âge de quinze ans leur bonnet par-dessus les moulins de la Galette. Elle avait trouvé un vieil imbécile amoureux fou d’elle qui consentait à lui donner son nom ; mais elle avait exigé que le mariage se fit à l’église, bien que le vieux fût un franc-maçon pratiquant et farouche mangeur de prêtres.
Le dit confesseur la félicitait : « Quel empire vous avez ! » disait-il.
Et la mutine enfant répondit :
— Je sais bien, mon père ; c’est l’empire du milieu.

Militaire

d’Hautel, 1808 : La goute militaire. Pour dire le rogomme, l’eau-de-vie que les soldats ont coutume de boire le matin à jeun.

Millard

France, 1907 : Variété de mendiants qui portent une besace sur leurs épaules et opèrent plus spécialement dans les campagnes.

Millards sont ceux qui trollent sur leur andosse de gros gueulards ; ils truchent plus aux champs qu’aux vergnes, et sont haïs des autres argotiers, parce qu’ils morflent ce qu’ils ont tout seul.

(Le Jargon de l’argot)

Mille

d’Hautel, 1808 : Il a des mille et des cents. Pour dire, que quelqu’un a beaucoup d’argent ; qu’il est très à son aise.

Fustier, 1889 : Argot des libraires. L’édition totale d’un ouvrage, d’un roman quelconque, étant donné — ce qui est une supposition — que cet ouvrage est tiré à mille exemplaires.

Depuis quelque temps on lit sur la couverture des volumes d’une maison de librairie : Premier mille ou sixième mille ou dixième mille. Mille quoi ? Mille exemplaires, cela se devine, mais cela n’en est pas moins de l’argot et quel argot !

(Événement, 1883).

Le dernier roman de M. Daudet a eu une envolée heureuse. Le cinquantième mille est depuis longtemps dépassé.

(Français, juillet 1884)

France, 1907 : Voir Mettre dans le mille.

Fera-t-il beau, fera-t-il laid ?
C’est un problème difficile,
Chacun prédit ce qui lui plaît :
Tant mieux si l’on met dans de mille !

Millé

Hayard, 1907 : Billet de mille francs.

Mille (mettre dans le)

Fustier, 1889 : Réussir pleinement.

Mille millions de milliasse

Rigaud, 1881 : Enormément, un nombre infini de fois, tout ce que l’esprit du peuple peut concevoir de plus élevé comme chiffre.

Mille pattes

Rossignol, 1901 : Soldat d’infanterie.

Mille-langues

Delvau, 1866 : s. m. Personne bavarde, indiscrète, — dans l’argot du peuple.

France, 1907 : Bavard.

Mille-pattes

Merlin, 1888 : Infanterie, régiment ou bataillon de fantassins. Le mot fait image.

Fustier, 1889 : Fantassin.

France, 1907 : Sobriquet donné par les cavaliers aux fantassins.

Il arrive parfois
Que la bourse est bien plate,
On n’est pas des bourgeois
Quand on est mille-patte,
Si l’on n’peut se payer
Sa petite chopine,
Faut souvent se fouiller
Passant d’vant la cantine !…
Aussi vive mon quart de vin
Dont la distribution sonne !
Vive ce nectar purpurin !
Vive la France qui le donne !

Milled

La Rue, 1894 : Mille francs.

Virmaître, 1894 : Billet de mille francs (Argot des voleurs). N.

Millegroux

France, 1907 : Loup-garou.

Millerand

France, 1907 : Raisin à grains nombreux et sans pépins ; du latin mille et granum, grain.

Millerie

Halbert, 1849 : Loterie.

Delvau, 1866 : s. f. Loterie, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Loterie, — dans l’ancien argot.

La Rue, 1894 : Loterie.

Virmaître, 1894 : Loterie que tiennent les camelots dans les fêles publiques (Argot des camelots).

Hayard, 1907 : Loterie de camelot dans les foires.

France, 1907 : Loterie foraine ; argot des camelots.

Millet

d’Hautel, 1808 : C’est un grain de millet dans la gueule d’un âne. Se dit quand les secours que l’on donne à quelqu’un sont bien au-dessous de ses besoins.

Rossignol, 1901 : 1000 francs.

France, 1907 : Mille francs.

Millet à la bouche d’un âne (grain de)

France, 1907 : Peu de chose.

Millet, millot

Rigaud, 1881 : Billet de banque de mille francs.

Quarante millets ! Telle était cette aubaine.

(La France, du 13 mars 1879.)

Milliards

anon., 1827 : Ceux qui portent des bissacs sur le dos.

Halbert, 1849 : Ceux qui portent des bissacs sur le dos.

Milliasse

d’Hautel, 1808 : Il y en a par milliasse. Se dit d’un lieu qui renferme une multitude d’êtres, d’insectes, comme les fourmis, les moucherons.

Milliasses

Delvau, 1866 : s. f. pl. Fort grand nombre. Argot du peuple.

Milord

Delvau, 1864 : L’entreteneur — anglais ou toulousain — d’une femme galante.

Le notaire est son milord.

H. De Balzac.

J’allons fair’ sauter les sacoches
De ce bon mossieu, son milord.

L. Festrau.

Une demoiselle entretenue ne se contente pas de son seul entreteneur appelé ordinairement Mylord Pot-au-feu. Elle a un amant en titre, qui ne paye que les chiffons ; un Guerluchon, c’est un amant qu’elle paye ; un Farfadet, c’est un complaisant ; et un Qu’importe est une personne qui vient de temps en temps, qui est sans conséquence ! et paye au besoin les petites dettes criardes.

(Correspondance d’Eutylie, 1,132.)

Larchey, 1865 : On donne moins ce nom aux Anglais qu’à ceux dont les largesses rappellent l’opulence britannique. Au moyen âge, milourt avait déjà le même sens, avec une acception plus ironique encore. C’est, comme Anglais, un fruit de nos anciennes guerres.

Ce sont milourdz qui ne voulsissent point d’hostes avoir.

Cretin, Épitre à Charles VIII.

Et je vous attise un beau feu au dessoubs et vous flambois mon milourt comme on faict les harencs sorets à la cheminée.

Rabelais, Ch., 14.

Le gros tailleur se dit négociant. À sa tournure il n’est pas milord russe.

Sénéchal, Ch., 1852.

Être sur le boulevard de Gand, se donner un air milord.

Ed. Lemoine.

Milord est souvent synonyme du miché sérieux décrit plus haut. exemple :

Le notaire est son milord.

(Balzac)

Larchey, 1865 : Cabriolet à quatre roues.

On vote vingt-deux sous à Clémence pour un cabriolet milord.

Méry.

Delvau, 1866 : s. m. Homme riche, en apparence du moins, — dans l’argot du peuple, qui emploie cette expression depuis l’occupation de Paris par les Anglais.

Delvau, 1866 : s. m. Entreteneur, — dans l’argot des petites dames. Leurs mères, plus prosaïques et moins vaniteuses, disaient Milord pot-au-feu, comme en témoigne ce couplet de Désaugiers :

Lorsque nous aimons,
Nous finançons
Afin de plaire.
D’où vient qu’en tout lieu
On dit : « Un milord pot-au-feu. »

Delvau, 1866 : s. m. Cabriolet à quatre roues, — dans l’argot des cochers.

Rigaud, 1881 : Entreteneur, à l’époque où les Anglais passaient our être généreux avec les dames qui vivent de la générosité publique.

France, 1907 : Nom que les voyous donnent à tout Anglais ou tout Américain qui paraît riche.

France, 1907 : Entreteneur d’une petite dame.

J’allons faire sauter les sacoches
De ce bon monsieur, ton milord.

(Festeau)

On disait autrefois de l’entreteneur : Milord Pot-au-feu ; c’est en effet lui qui fait bouillir la marmite.

Lorsque nous aimons,
Nous finançons
Afin de plaire ;
D’où vient qu’en tout lieu
On dit : Um milord Pot-au-feu.

(Désaugiers)

France, 1907 : Cabriolet à quatre roues

Milord l’arsouille

France, 1907 : Sobriquet donné à lord Seymour qui, vers la fin de la Restauration et au commencement du règne de Louis-Philippe, se rendit célèbre à Paris par ses excentricités. C’était un homme accompli, jeune, gai, d’une force herculéenne, spirituel et immensément riche, écrasant tons les jeunes gens qui voulaient rivaliser avec lui par son luxe inouï et ses excentricités colossales. Il purgea par la seule force de son poing la Courtille de tous ses batailleurs, de ses terreurs, de ses mangeurs de nez.

Lorsque sa voiture, attelée de six chevaux, accompagnée de piqueurs donnant de la trompe et de courriers enrubannés, montait le boulevard, c’était un grand hourra, comme aux jours de feu d’artifice, quand part des Tuileries la fusée signal. On s’arrêtait, on se pressait, on se bousculait pour voir passer la mascarade modèle. Tous les gens de la suite, les cavaliers, les amazones, les cavalcades et les voitures de masques lui faisaient cortège : ils étaient glorieux de faire croire au bon public massé sur les trottoirs, aux femmes qui paradaient dans les calèches des deux files, et même aux municipaux, qu’ils faisaient partie de cette aristocratique saturnale. Et lui, calme et tranquille comme un dieu antique, il inondait de bonbons et de dragées tous ses obscurs admirateurs…
— C’est Milord l’arsouille ! Vive Milord l’arsouille ! exclamaient les gamins… Les excentricités de Milord l’arsouille n’ont pas duré plus de trois ou quatre ans.

(A. Privat d’Anglemont)

Mils

France, 1907 : Nom d’un exercice gymnastique emprunté aux Persans et qui se fait au moyen de massues.

Mimele

Rossignol, 1901 : Argot hébreu qui signifie chatte.

Mimi

Delvau, 1866 : s. f. Maîtresse, — dans l’argot des artistes et des bohèmes, qui ont emprunté cette expression à Henry Murger, qui l’avait empruntée à Alfred de Musset.

France, 1907 : Maîtresse ; du nom de l’héroïne d’un roman d’Henri Murger.

Ici, deux étudiants poursuivaient le cours de leurs études médicales à travers une partie de jacquet sur une table bravement couverte de chopes vides et de verres d’absinthe. Là, quatre figures enluminées discutaient gravement la question du dîner, et supputaient ce que l’on pouvait retirer de tel ou tel attentat sur la bonne foi paternelle. Plus loin, un groupe se livrait avec ardeur à ce que Victor Hugo appelle littérature et philosophie mêlées. Dans un coin, un étudiant en droit apprenait le Code dans les yeux bleus d’une Mimi anonyme, tandis qu’un vieux carabin considérait avec attention le mélange de l’eau qui tombait goutte à goutte dans son verre avec une absinthe suisse qui s’y trouvait. La salle était obscurcie par la fumée des pipes, à travers laquelle on apercevait des têtes coiffées de bérets rouges placés d’une façon impossible.

(Eugène Vermersch, Le Laticum moderne)

Minable

Delvau, 1866 : adj. et s. Pauvre, misérable ; mesquin ; de mauvaise mine, — dans l’argot du peuple.

Minauder

d’Hautel, 1808 : Affecter des mines et des manières ; faire le gracieux.

Minauderie

d’Hautel, 1808 : Toner doucereux, grimacier et affecté.

Minaudier

d’Hautel, 1808 : Qui affecte des manières ridicules, qui fait l’agréable.

Mince

d’Hautel, 1808 : Des minces. On appeloit ainsi vulgairement le papier monnoie, connu sous le nom d’assignats, quand il étoit en émission ; c’est maintenant le nom que le peuple donne aux billets de banque.
Mince comme la langue d’un chat. Se dit par mépris d’une chose peu épaisse, qui n’a de valeur qu’autant qu’il y a beaucoup de matière.
Il est assez mince. Pour dire, il n’est pas trop à son aise.
Avoir l’esprit mince. Pour avoir peu d’esprit, être borné.

Larchey, 1865 : Papier à lettres (Vidocq). — Allusion d’épaisseur.

Delvau, 1866 : s. m. Papier à lettres, — dans l’argot des voleurs.

Delvau, 1866 : s. m. De peu de valeur, morale ou physique, — dans l’argot des faubouriens, qui disent cela à propos des gens et des choses. Mince alors !

Rigaud, 1881 : Papier à lettres, billet de banque, papier. — Le mot mince pour désigner papier date de la création des assignats.

Boutmy, 1883 : adj. Pris adverbialement Beaucoup, sans doute par antiphrase. Il a mince la barbe, il est complètement ivre. Commun à plusieurs argots.

La Rue, 1894 : Papier. Billet de banque. Mince ! Beaucoup, très.

Virmaître, 1894 : Rien. Mais, dans le peuple, cette expression sert à manifester l’étonnement.
— Ah ! mince alors, elle en a une nichée dans la paillasse (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Ce mot sert à marquer l’étonnement, et signifie beaucoup.

Vois ce que j’ai pris de poisson ! Mince alors. — Le patron offre à dîner : mince ce que nous allons nous les caler.

France, 1907 : Papier à lettres ; argot des voleurs.

France, 1907 : Beaucoup. Mince de chic ! Mince de potin ! Mince de colle ! Mince de rigolade ! Mince de pelle !

Depuis qu’nous somme on république,
On fourr’ ces mots un peu partout.
Nos gouvernants sont ironiques,
Ils la connaiss’nt pour s’fout’ de nous,
Sur les monuments, les écoles,
Les mairies, on voit ces trois mots,
Comm’ si qu’c’était vrai. Minc’ de colle !
C’qu’on te gourr’, mon vieux populo !

(Le Père Peinard)

Je r’viens d’un’ noce aux Batignolles,
Minc’ de rigolade ! Ah ! chaleur !
Les invités avaient des fioles
À fair’ pâmer un saul’ pleureurs 
Y avait d’quoi rir’ comm’ un’ baleine
En voyant parents et mariés.

(Jeanne Bloch)

Mince !

Fustier, 1889 : Exclamation qui répond à zut ! ou à : ah ! non ! alors !

Ah ! mince alors ! si les billes de billard se mettent à moucharder la jeunesse.

(Meilhac et Halévy, Lolotte)

A aussi le sens de beaucoup.

Hayard, 1907 : Expression à peu près équivalente à « zut ! »

France, 1907 : Exclamation exprimant un étonnement réel ou feint.

Malgré qu’il avait pas d’état,
Ça fit tout d’suite un bon soldat,
Et pis mince
Qu’i’ mangeait à gueul’ que veux-tu ;
Il ‘tait nourri, logé, vêtu
Comme un prince.

(Aristide Bruant)

Mince alors !

France, 1907 : Exclamation ironique.

Entre Alphonses :
— T’as pas vu la femme qu’a eune peau que quand on la frotte, a laisse jaillir des étincelles ?
— Mince alors !… C’est rien chouette ! Son type n’a qu’à la frotter pour qu’elle éclaire !…

Mince de

Rigaud, 1881 : Beaucoup de ; rien que ça de. Locution employée par le peuple hors de tout propos devant un autre mot, pour en marquer à la fois le nombre et la bonne qualité. — Mince de toilette à la clé, mince de politesse, mince de beurre, mince de tableaux, mince de chic.

Mince, mince que

Rigaud, 1881 : Je crois bien, comment donc, certainement que. — Mince que je voudrais le voir. — Mince qu’il est bate.

Mince que t’as raison.

(J. Lermina, Les Chasseurs de femmes, 1879.)

Vous avez des places ? — Mince ! si j’ai des places ? Une loge de face.

(Le Gavroche, 1879)

Les voyous emploient encore le mot mince comme synonyme du fameux mot de Cambronne, à la fin d’une phrase, comme argument décisif : Ah ! mince alors.

Mincer

France, 1907 : Hacher, couper en petits morceaux. Vieux mot.

Minces

Delvau, 1866 : s. m. pl. Billets de banque, — dans l’argot des faubouriens, qui, originairement, ont donné ce nom aux assignats.

Minçon

Clémens, 1840 : Morceaux.

Mine

d’Hautel, 1808 : Tourner la mine du côté de la marmite. Phrase facétieuse. Pour aller dîner ; aller prendre un repas.
Faire grise mine. N’être pas de bonne humeur ; avoir l’air sérieux et triste.
Faire bonne mine et mauvais jeu. Cacher le désordre de ses affaires, en montrant une grande tranquillité.
Faire la mine à quelqu’un. Pour le bouder, lui montrer de la mauvaise humeur.
Mine éventée. On appelle ainsi ironiquement une fille qui s’est laissée séduire.

Mine à chier dessus

Rigaud, 1881 : Vilain visage, — dans le jargon du peuple. Qu’est-ce qu’il vient vous emm… ieller, celui-là, avec sa mine à chier dessus ?

France, 1907 : Vilaine figure.

— Qu’est-ce qu’il vient nous emmieller celui-là, avec sa mine à chier dessus ?

On dit aussi dans le même sens : mine à coucher dehors, c’est-à-dire avoir une figure à qui personne ne voudrait ouvrir la porte de chez soi pour y passer la nuit.

Mine à poivre

France, 1907 : Cabaret.

Lui était un bon, un chouette, un d’attaque. Ah ! zut ! le singe pouvait se fouiller, il ne retournerait pas à la boîte, il avait la flemme. Et il proposait aux deux camarades d’aller au « Petit bonhomme qui tousse », une mine à poivre de la barrière Saint-Denis, où l’on buvait du chien tout pur.

(Émile Zola, L’Assommoir)

Mine revenante

Rigaud, 1881 : Mine qui revient, visage agréable.

Minerve

Fustier, 1889 : Argot de joueurs. Filouterie qui rappelle celle dite du neuf de campagne. (V. cette expression).

D’ordinaire, le baccara se joue avec deux cartes dont l’assemblage forme le point et, si le banquier veut bien y consentir, une troisième qu’il donne découverte au tableau qui la demande. Quelquefois dans ces trois cartes il n’y a pas de quoi gagner sa vie, au contraire. Les malins en ont ajouté une quatrième, cachée celle-là qu’ils tiennent dans leur main gauche et que, par un travail analogue à celui dont j’ai parlé plus haut, ils arrivent à substituer à l’une de celles qui leur sont données régulièrement. D’habitude, les prestidigitateurs qui font la minerve adoptent un quatre ou un cinq, une carte qui peut s’adapter à toutes les combinaisons pour faire un point très honorable.

(C. des Perrières : Paris qui triche.)

France, 1907 : Petite machine à imprimer que l’on lait mouvoir avec le pied.

France, 1907 : Carte que substitue le grec à celle que le banquier lui a donnée.

Minerviste

France, 1907 : Imprimeur qui travaille à la minerve.

Minet

Delvau, 1866 : s. m. Chat, — dans l’argot des enfants. Ils disent aussi Minon.

France, 1907 : Chat. On dit aussi minon.

Minette

d’Hautel, 1808 : Nom d’amitié que l’on donne à une petite fille.

Delvau, 1864 : Gamahuchage de la femme par l’homme, et quelquefois de l’homme par la femme, — au moyen de la langue, qui a l’air de laper le sperme comme les chats lapent le lait.

Allons, ma fille, une minette, pour que je bande.

J. Le Vallois.

Le bougre lui fait minette.

Gustave Nadaud.

Elle a l’étrange goût
Qu’on la foute en levrette,
Elle vous fait minette
Et puis avale tout.

Joachim Duflot.

Et maintenant, mon agneau… fais-moi une minette distinguée, digne du coup que nous allons tirer ensemble.

Lemercier de Neuville.

Larchey, 1865 : Mot d’amitié. V. Chat.

Oui, minette, je me calme.

De Courcy.

Virmaître, 1894 : V. Descendre à la crémerie.

Minette (faire)

France, 1907 : Caresser une femme de la façon appelée descendre à la crèmerie.

Cette expression, dit Ch. Virmaître, est employée par des filles qui n’aiment pas les hommes : elle est suffisamment claire.

Elle est employée aussi par les hommes qui aiment trop les femmes.

Mineur

d’Hautel, 1808 : Cela ne fait pas le compte des mineurs. Se dit en plaisantant de quelque chose qui blesse les intérêts d’une personne compromise dans une affaire.

Halbert, 1849 : Manseau.

France, 1907 : Manceau ; argot des voleurs.

Minima de malis

France, 1907 : « Des maux choisir le moindre », dicton latin tiré de Phèdre.

Ministère

d’Hautel, 1808 : Avez-vous besoin de mon ministère ? Pour, avez-vous besoin de mes services ; puis-je vous être utile ?

Ministrable

France, 1907 : On appelle ainsi, en argot parlementaire, les personnalités de la Chambre dont on peut faire des ministres à un changement de cabinet.

Après l’élection de Carnot, le général Boulanger fit pressentir les chefs du parti radical, les ministrables.

(Mermeix)

Ministre

Rigaud, 1881 : Pour le soldat, tout individu crevant de santé, bien placé ou bien renté, que rien n’émeut, content de lui, gros et gras à lard est un « ministre ». Il y a, comme on voit, un grand fond d’observation chez le troupier français. — Gros ministre, marche donc, si tu peux, ou roule, si tu peux pas marcher.

Rossignol, 1901 : Mulet. En campagne, les mulets sont des ministres parce qu’ils sont toujours charges des affaires de l’État.

France, 1907 : Mulet, cheval de bât ; argot militaire spécialement de l’armée d’Afrique. Cette appellation burlesque vient de ce que les mulets, chevaux de bât sont chargés, disent les soldats, des affaires du régiment, comme les ministres de celles de l’État. Dans certains départements du Centre, ministre, qu’on prononce minisse, est le nom donné aux baudets (Voir Mazarin).

Dans l’enquête sur le chemin de fer de Clermont, un cantonnier chargé de constater la circulation journalière sur une route écrivait dans son rapport : « Le… (quantième), huit chevaux, six bœufs, dix vaches, trois ministres. » Nous nous sommes plu à constater que ce sobriquet était antérieur à l’établissement du régime représentatif ; il date peut-être des guerres de religion, et aura été employé en haine de ceux, comme on disait, de la religion prétendue réformée et de leurs ministres. Se dit notamment à la Charité, l’une des villes de sûreté des protestants, dans la paix dite boiteuse et mal assise ; à Sancerre, ville fameuse par le siège qu’elle a soutenu après la Saint-Barthélémy, et surtout à Asniéres, village encore tout protestant, aux portes de Bourges. L’explication la plus honnête est celle qu’on tire simplement du latin minisier, serviteur.

(Jaubrert, Glossaire du centre de la France)

Ministre de l’intérieur

Virmaître, 1894 : Doigt. Allusion à une coutume très en usage dans les couvents de jeunes filles (Argot du peuple).

France, 1907 : Doigt ; argot populaire. « Allusion, dit Charles Virmaître, à une coutume en usage dans les couvents de jeunes filles. »

(Dictionnaire d’argot fin de siècle)

Ministresse

France, 1907 : Femme de ministre.

— Comment est-elle devenue ministresse, après avoir porté tant de bonheur chez tant d’étudiants ?
— Elle est devenue ministresse le plus simplement du monde. Le sénateur Dumas avait l’habitude de passer ses soirées au café de la Source. Lorsque Dumont lâcha Gabrielle, il la recueillit. Il était jovial, ce brave Dumas. Ces deux gaietés se convinrent et ça fit un beau petit collage.

(Edgar Monteil, Le Monde officiel)

Minois

Halbert, 1849 : Nez.

Delvau, 1866 : s. m. Nez, — dans l’argot des voleurs.

La Rue, 1894 : Nez. Visage.

France, 1907 : Nez, visage.

Plus d’œil que de fond ; plus de mousse que de vin. Il donne plus de plaisir que d’amour ; il engendre plus de caprices que de passions ; et je suis loin d’en faire un reproche au minois.

(Dr Grégoire)

Minois, mine

Rigaud, 1881 : Nez, — dans le jargon des voleurs.

Minon

d’Hautel, 1808 : Nom que les enfans donnent aux chats.
Il entend bien chat, sans qu’on dise minon. Pour, il entend le demi-mot, et sans qu’on lui explique.

France, 1907 : Nom familier du chat. Il entend bien chat sans qu’on dise minon, il comprend a demi-mot.

Minon Minette (faire)

Delvau, 1864 : Se gamahucher mutuellement, homme et femme ; faire tête-bêche.

Minon-minette

France, 1907 : Cachotterie. Faire des minons-minettes. Entrer en minon-minette, entrer à la dérobée, en sournois, comme une chatte.

Minoribus (in)

France, 1907 : « Dans les moindres », être rangé parmi les intimes.

Minot

d’Hautel, 1808 : Ils ne mangeront pas un minot de sel ensemble. Pour, ils ne seront pas long-temps unis, bons amis.

Minotaure

France, 1907 : Mari trompé. Minautoriser un mari, séduire sa femme.

Minotaure, risé

Larchey, 1865 : « Quand une femme est inconséquente, le mari serait, selon moi, minotaurisé. » — Balzac.

Minotauriser

Delvau, 1866 : v. a. Tromper un homme avec sa femme, comme Paris avec la femme de Ménélas. Argot des gens de lettres. L’expression sort de la Physiologie du mariage d’H. de Balzac.

Minotauriser un homme

Delvau, 1864 : Le faire cocu, — allusion aux cornes du Minotaure de l’Ile de Crète.

Quand une femme est inconséquente, le mari doit être, selon moi, minotaurisé.

H. De Balzac.

Minstrel

France, 1907 : Chanteur déguisé en nègre qui s’accompagne sur un banjo. C’est notre vieux mot ménestrel revenu déformé par son passage en Angleterre.

Boulogne et le Havre enfin, leurs bars, les music-halls et les minstrels aidant, ont-ils besoin d’un ciel gris, d’une mer embrouillardée pour « entraîner » leurs hôtes de passage à la vie anglo-saxonne ?…

(Paul Bonnetain)

Mintzingue

France, 1907 : Cabaretier. Formé de manzingue.

Depuis ce temps elle est toujours pompette
Et chez l’mintzingue ell’ croque le magot.

(L’Almanach chantant, 1869)

Minuit

d’Hautel, 1808 : À minuit précis, sur le minuit. Ce mot est toujours singulier et masculin ; c’est à tort que l’on dit continuellement à minuit précise, sur les minuit. Voy. Midi.

Larchey, 1865 : Nègre (Vidocq). — Allusion à la couleur sombre de la nuit.

Delvau, 1866 : s. m. Nègre, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Nègre. — Enfant de minuit, voleur.

La Rue, 1894 : Nègre.

Minuit (enfant de messe de)

France, 1907 : Coureur de filles, libertin.

Minus-habens

France, 1907 : Terme scolastique pour désigner un enfant ou un homme de peu de moyens ; littéralement ayant moins, sous-entendu : que les autres.

Minusseries

France, 1907 : Affaires sans importance, minuties. Provincialisme.

Minute

d’Hautel, 1808 : Minute ! Espèce d’exclamation, pour dire, un moment ; arrêtez, n’achevez pas.

Minute !

France, 1907 : Attention, doucement.

Minzingo

France, 1907 : Cabaretier, marchand de vin. Corruption de manzingue.

Je la rencontrai chez le minzingo qu’est au coin du boulevard ; elle s’enfilait un demi-setier avec le tambour-maître. « Ah ! la gironde gonzesse, que je me dis : quinze ans et pas de corset ! »

(Les Joyeusetés du régiment)

Minzingue

Rigaud, 1881 : Marchand de vin. Et les variantes minzingo, mind-zingue, manzinguin, qu’on prononce en faisant sonner fortement le premier N.

La philosophie, vil mindzingue, quand ça ne servirait qu’à trouver ton vin bon.

(Grévin).

Pauvre Dupuis manzinguin, malheureux.

(Privat d’Anglemont).

Minzinguin

Larchey, 1865 : « Le roi est un bon zigue qui protège les minzinguins. » — Cabassol. — V. Mannezingue.

Mioche

d’Hautel, 1808 : Pour, petit enfant.
Avoir des mioches. Pour avoir des enfans.
C’est aussi un terme de mépris que l’on applique à un petit homme qui fait le fanfaron ; à un fat qui n’a ni force, ni talent.

Delvau, 1866 : s. m. Enfant, — dans l’argot du peuple, pour qui un nouveau-né est une miette d’homme, et dont le corps pétri de lait, presque sans os et sans muscles, ressemble à de la mie de pain.

France, 1907 : Enfant, petit garçon ; du latin mica, petit morceau, mie. On dit, pour une petite fille, une mioche.

Ah ! Je voudrais les tenir ici, ceux qui déplorent la dépopulation de la France, les crocodiles économistes qui conspuent Malthus, et déclarent les ouvriers coupables de ne pas « peupler » davantage !
Elle a suivi leur doctrine, celle-là ! Elle s’est mariée toute jeune, n’a pas triché dans l’amour, apporte sa nichée de cinq moutards à la patrie ! Elle a crû, multiplié, re-peu-plé !
Qu’est-ce que la patrie fait pour elle ? Elle la laisse crever de faim, tout simplement, elle et ses cinq petits citoyens !
Avant d’encourager les malheureux à reproduire, est-ce qu’on ne devrait pas avoir la pudeur de s’occuper de nourrir les mioches déjà nés ! Il en meurt cent vingt mille par an, de vos futurs conscrits. Commencez donc par les nourrir et les élever, avant de reprocher aux malheureux leur souci de l’avenir, et d’aller rechercher dans le linge sale des sages-femmes les traces de méfaits que vous justifiez !

(Jacqueline, Gil Blas)

Mioche, mion

Larchey, 1865 : Bambin. — Mion est un mot de langue romane (V. Roquefort) dont mioche serait le diminutif. — V. Dardant.

C’est à moi que reviendra le droit d’être le parrain de tous les mioches.

Bourget.

Rigaud, 1881 : Petit enfant, petit garçon. — Mion de gonesse. Adolescent. — Mion de boule, voleur.

Mion

anon., 1827 : Garçon.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Filou de bas étage.

Bras-de-Fer, 1829 : Garçon.

Halbert, 1849 : Garçon.

Hayard, 1907 : Enfant.

France, 1907 : Petite mesure pour le vin ; provincialisme.

France, 1907 : Petit garçon, marmot, mioche ; même origine que ce dernier mot, à moins qu’il ne vienne du vieux français dérive du grec meion, moindre.

Fonçons à ce mion folâtre
Notre palpitant.

(Nicolas Grandval)

France, 1907 : Canard siffleur.

Mion de boule

Halbert, 1849 : Filou.

France, 1907 : Filou, coupeur de bourse ; argot du temps de Cartouche.

Mions de boule

anon., 1827 : Coupeurs de bourse, filoux.

Bras-de-Fer, 1829 : Coupeurs de bourse, filous.

Miot

France, 1907 : Brin, miette ; du patois bas normand ; même sens dans le patois béarnais ; miette, dans la Meuse.

Miou

Virmaître, 1894 : Enfant. Allusion au miaou du jeune chat (Argot du peuple).

Mipe

d’Hautel, 1808 : Défi, bravade ; terme d’écoliers.
Faire un mipe. Défier un camarade au jeu ; jouer au plus habile, à qui sera le plus fort, qui l’emportera.

Miquel

Clémens, 1840 : Facile à faire.

La Rue, 1894 : Facile à faire. Niais, dupe.

Miquelot (faire le)

France, 1907 : Faire l’hypocrite religieux : du sobriquet donné aux pèlerins de Saint-Michel.

Miracle

d’Hautel, 1808 : Il ne faut pas encore crier miracle. Se dit d’une affaire dont le succès, quoique presqu’assuré, n’est cependant pas encore absolument décidé.
Voilà un beau miracle ! Se dit ironiquement, pour diminuer le prix d’une action.
Il a fait un miracle. Pour, il lui est arrivé un malheur, il a brisé ou cassé quelque chose.
À miracle. Pour dire, à merveille, parfaitement, on ne peut mieux.

Mirador

France, 1907 : Belvédère que l’on construit dans les maisons d’Espagne ou les provinces espagnoles ; de mirari, regarder.

Miradou

Larchey, 1865 : Miroir (Vidocq). — Mirauder voulait dire autrefois regarder.

Delvau, 1866 : s. m. Miroir, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Miroir ; mot emprunté au provençal. — La variante est : mirelaid.

Virmaître, 1894 : V. Mirante.

France, 1907 : Miroir.

Mirancul

France, 1907 : Apothicaire, vieil argot.

Mirante

France, 1907 : La glace.

Mirauder

France, 1907 : Regarder, admirer ; du latin mirari ; ne s’emploie guère que dans cette expression ; mirauder un œuf, regarder au travers pour juger s’il est frais.

France, 1907 : Ajuster, attifer, faire la toilette. « Je viens de mirauder la gosseline. »

Mire-laid

d’Hautel, 1808 : Pour dire un miroir, et par une allusion maligne avec la personne qui s’en sert.

Delvau, 1866 : s. m. Miroir, — dans l’argot du peuple.

Mirecourt

Delvau, 1866 : s. m. Nom d’homme qui est devenu celui de tous les pamphlétaires de plus de passion que de talent. Théodore de Banville est le premier qui, en littérature, ait fait de ce nom propre un substantif courant. Il restera, il doit rester.

Rigaud, 1881 : Violon. M. Fr. Michel assure que c’est parce qu’on fabrique beaucoup de violons dans les Vosges que les voleurs ont donné au violon le nom d’une petite ville de ce département. — C’est tout simplement parce que pour jouer du violon on regarde l’instrument de très près ; l’exécutant le met pour ainsi dire sous son nez : mirer de court, regarder de près, a fait mirecourt.

France, 1907 : Violon ; argot des voleurs. La ville de Mirecourt, sous-préfecture des Vosges, est célèbre pour ses instruments de musique, principalement la fabrication les violons.

Mirelaid

France, 1907 : Miroir.

Mirement

France, 1907 : Mirage ; argot des marins. Être en mirement, paraître dans une situation plus élevée qu’on ne l’est réellement.

Mirer

d’Hautel, 1808 : Se mirer dans ses plumes. Se dit d’un fat qui est idolâtre de sa personne ; qui s’admire avec complaisance, s’enthousiasme de sa fadeur et de son insipidité.

Mirette

Halbert, 1849 : Œil.

Larchey, 1865 : Œil (id). — L’œil est un petit miroir.

Rigaud, 1881 : Prunelle de l’œil. — Sans mirettes, aveugle. Mirettes en glacis, mirettes glacées, lunettes. Mirette en caouche, télescope ; caouche pour caoutchouc.

Mirettes

Delvau, 1866 : s. f. pl. Yeux, — dans l’argot des voyous.

La Rue, 1894 : Yeux.

Virmaître, 1894 : Les yeux (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 : Yeux.

Hayard, 1907 : Yeux.

France, 1907 : Les yeux.

Comm’ je pionçais, l’aut’nuit, dans ma chambrette,
V’là feu ma doch’ qui radin’ subito.
Mêm’ qu’elle avait encor peint ses mirettes,
Poudré son blair et rougi son museau,
Bien tendrement la v’là qui me regarde :
Tremble, qu’a m’dit, fillette, pour tes jours,
À Jéhovah, vois-tu., faut prendre garde,
Car le vieux Juif te jouera d’vilains tours.

(Willy)

Mirettes, quinquets

anon., 1907 : Yeux.

Mireur

Rigaud, 1881 : Espion, observateur, — dans le jargon des voyous. — Quand ils auront fini de se ballader, tous ces mireurs !

France, 1907 : Employé aux caves des Halles pour y inspecter les provisions.

Deux cents becs de gaz éclairent ces caves gigantesques, où l’on rencontre diverses industries spéciales… Les mireurs qui passent à la chandelle une délicate révision des sujets ; les « préparateurs de fromages » qui font jaunir le chester, pleurer le gruyère, couler le brie, ou piquer le roquefort…

(E. Frébault)

Mirjolures

France, 1907 : Enjolivements à plat.

Mirlicoton

France, 1907 : Pêche d’automne appelée aussi poire jaune.

Mirlifichures

France, 1907 : Colifichets, objets de parure. Vieux mot.

Mirliflor, mirliflore

France, 1907 : Prédécesseur du gommeux ; de mirer et de fleur.
Francisque Michel voit dans mirliflore une altération de mille-fleurs, bouquet de plusieurs leurs odorantes dont se paraient les élégants du siècle dernier, tandis que Littré pense que c’est une altération de mirlifique, altération elle-même de mirifique, mirificus, merveilleux. Le mirliflor florissait vers 1820.

Ces favoris de la mode appelés roués sous la Régence, merveilleux sous Louis XV, mirliflores sous Louis XVI, incroyables sous le Directoire, agréables sous l’empire, étaient-ils inférieurs aux lions de nos jours ?

(Sophie Gay)

Avec des bouquets comme celui-là, ou des œillets rouges flambants comme braise, et résistants dans les bagarres, on s’en allait, les demi-soldes, les « brigands de la Loire », au café Lamblin, à la Rotonde. Les mirliflores nous y attendaient, avec des œillets blancs au revers de leur habit de drap fin.
Ce n’était pas long. Un mot, une gifle ! « Vive le roi ! — Vive l’empereur ! » Et ce qu’on se battait !

(Sévérine)

Mirliflore

d’Hautel, 1808 : Un merveilleux ; un fat, un homme fort épris de sa personne.

Delvau, 1866 : s. m. Le gandin de la Restauration, qui est toujours le Lion pour le peuple.

Mirlipot

France, 1907 : Infusion de sauge. On s’en sert pour remplacer le thé.

Mirliton

Delvau, 1864 : Un des nombreux synonymes des mots : vit, pine et con, — très usité dans les chansons et les poésies légères.

Je ne connais sur la terre
Que deux séduisants objets :
Ce vin qui remplit mon verre
Et d’un tendron jeune et frais.
L’étroit mirliton, etc.
Le cynique Diogène
Blâmait toujours le plaisir,
Et lui-même, dans Athènes,
Il empoignait pour jouir
Son vieux mirliton, etc.

J. Cabassol.

Vos mirlitons, Mesdames, à présent,
Sont grands trois fois plus qu’ils ne devraient être.

Grècourt.

Mais où placer un Amphion
Qui n’a qu’un petit mirliton ?

(Chanson anonyme moderne.)

Delvau, 1866 : s. f. La voix humaine, — dans l’argot des faubouriens. Jouer du mirliton. Parler, causer.

Rigaud, 1881 : Voix. — Jouer du mirliton, parler.

France, 1907 : Ce n’est pas la trompette du plaisir, c’en est l’instrument, ce que Rabelais appelait Maistre Jehan Chouart ou Maistre Jehan Jeudi. Jouer du mirliton, sacrifier à Vénus, ou, suivant Maître Alcofribas, frotter son lard.

Ce soir, ma ménagère
Trouvant que j’rentrais tard,
J’lui dis : Écout’, ma chère,
J’apport’ pour le moutard
Un joli p’tit mirlitire,
Un charmant p’tit mirliton.
Là-d’sus, se mettant à rire,
Ma femm’, qui change de ton,
Veut jouer du mirlitire,
Veut jouer du mirliton,
Veut jouer du mir, du li, du ton,
Du mirliton !

(Le Mirliton)

Mirliton s’employait aussi autrefois pour la nature de la femme :

Auprès de toi, ma mignonne,
Mon cœur est comme l’aimant,
Et mon aiguille friponne
Cherche le pôle charmant
De ton mirliton.

(Le Nouveau Tarquin, 1731)

Mirmidon

d’Hautel, 1808 : Un mirmidon. Terme de mépris ; nain, bamboche ; homme étourdi, indiscret, in considéré.

Mirnte

Virmaître, 1894 : La glace (Argot des voleurs).

Mirobolamment

Larchey, 1865 : Merveilleusement.

À meubler mirobolamment sa maison.

(Balzac)

Delvau, 1866 : adv. Merveilleusement. Cet adverbe appartient à H. de Balzac.

Mirobolant

Larchey, 1865 : Merveilleux.

La cravate mirobolante.

Ed. Lemoine.

Je me sens d’une incapacité mirobolante.

(Balzac)

Delvau, 1866 : adj. Inouï, merveilleux, féerique.

France, 1907 : Merveilleux, extraordinaire.

Mais une vingtaine d’années plus tard, le conseil cipal qui, par extraordinaire, était à la hauteur, se dit qu’en somme ce terrible malfaiteur avait été un bon zigue, secourable aux miséreux et dur aux richards, et on planta sur sa tombe des fleurs mirobolantes. Maintenant encore, ce qu’il suce par la racine, ce n’est pas des pissenlits ; c’est des rosiers, des géraniums et des lilas.

(Almanach du Père Peinard, 1894)

Mirobolard

France, 1907 : Augmentatif de mirobolant.

Reste Littré. Je lui souhaite
De rencontrer plus laid que lui,
Ou de se faire une autre tête,
Et de mettre dans un étui
Celle qu’il possède aujourd’hui,
Pour que l’avenir la regarde ;
Car jamais le soleil n’a lui
Sur laideur plus mirobolarde.

(Jean Richepin)

Miroder

Rigaud, 1881 : Regarder, arranger.

Elle monta seule et nu-pieds sur l’échelle et sur l’échafaud et fut un quart d’heure mirodée, rasée, dressée et redressée par le bourreau.

(Madame de Sévigné, Lettres.)

Miroir

Rigaud, 1881 : Coup d’œil rapide jeté sur le talon d’un jeu de piquet, sur les premières cartes à distribuer au baccarat, — dans le jargon des grecs ; une manière de connaître le jeu de l’adversaire.

Miroir à putains

Delvau, 1864 : Beau garçon, souvent trop beau pour rien faire, dont toutes les filles raffolent et qu’elles payent l’une après l’autre — et même quelquefois ensemble.

Larchey, 1865 : Garçon dépourvu de distinction mais riche de cette beauté banale qui séduit le commun des femmes.

Delvau, 1866 : s. m. Beau garçon, — dans l’argot du peuple, qui dit cela depuis longtemps, comme le témoignent ces vers de Scarron :

Dis-lui qu’un miroir il putain,
Pour dompter le Pays Latin
Est un fort mauvais personnage.

Rigaud, 1881 : Joli visage d’homme à la manière des têtes exposées à la vitrine des coiffeurs.

Virmaître, 1894 : Joli garçon qui s’en croit beaucoup, une espèce de « Nicolas » de faubourg.

Dis-lui qu’un miroir à putain
Pour dompter le pays latin
Est un fort mauvais personnage.

Celle expression était employée au temps de Scarron (Argot du peuple).

France, 1907 : Joli garçon recherché par les femmes.

C’est un type parisien assez remarquable à cet égard, par exemple, que l’époux d’une couturière où d’une modiste qui gagne bien sa vie. Quelquefois — pas souvent — il est occupé, au dehors, par un petit emploi dont il garde le produit pour ses menues débauches. Mais, la plupart du temps, il ne fait rien, ou presque rien. Il tient les livres de sa femme, prépare les factures, tout au plus.
C’est toujours un homme aimé pour lui-même, un joli garçon, un miroir à… ce que vous savez. Trop beau pour rien faire, il est pareil au lys de l’Écriture.

(François Coppée)

Pour me donner un nom qui me soit convenable,
Chloris, ton jugement est plus que raisonnable,
Quand tu viens m’appeler un miroir à putains,
Je n’en refuse point le titre ni l’usage ;
Il est vrai, je le suis, tes propos sont certains,
Car tu t’es bien souvent mirée et mon visage.

(Saint-Amand)

Miroir à putains, à grues

La Rue, 1894 : Homme d’une beauté banale.

Miroir aux alouettes

Delvau, 1864 : Pièce d’or que l’on fait briller dans un bal et sur laquelle les drôlesses tombent toutes rôties — par le désir.

Miroir de Vénus

France, 1907 : Sorte de campanule.

Miroton

France, 1907 : Tranches de bœuf bouilli accommodé aux oignons.

C’est que pour pouvoir, savoir et vouloir faire un miroton, la première condition est d’être portière. Et si je n’étais plus portière, je ne saurais plus faire les mirotons.

(Théodore de Banville)

Mirquin

Halbert, 1849 : Bonnet.

Delvau, 1866 : s. m. Bonnet, — dans l’argot des voleurs.

Virmaître, 1894 : Bonnet.
— J’ai vu une gerce au rastue de Saint-Lago ; elle était rudement gironde avec sou melet mirquin ; il y manquait un rayon de miel (Argot des voleurs). N.

Hayard, 1907 : Bonnet.

France, 1907 : Bonnet de femme ; argot des voleurs.

Mirzale

Larchey, 1865 : Boucle d’oreille (Vidocq). — Même construction que dans cabe, combre, calvin. Une mirzale est mot à mot : ce qui mir-oite z’à l’oreille.

Rigaud, 1881 : Boucle d’oreilles.

Mirzales

Delvau, 1866 : s. f. pl. Boucles d’oreilles, — dans le même argot [des voleurs].

La Rue, 1894 : Boucles d’oreilles.

Virmaître, 1894 : Boucles d’oreilles (Argot des voleurs).

Hayard, 1907 : Pendants d’oreilles.

France, 1907 : Pendants d’oreilles ; argot des voleurs.

Misce stultitiam consiliis brevem

France, 1907 : « Mêle à ta sagesse un peu de folie. » Locution latine tirée des Odes d’Horace.

Mise

d’Hautel, 1808 : C’est de mise. Pour, c’est reçu ; cela peut être dit.

Mise (faire sa)

Delvau, 1866 : Payer le droit de circulation sur « le pont d’Avignon », — dans l’argot des filles.

Rigaud, 1881 : Payer la patente, — dans le jargon des filles.

Mise à pied

Larchey, 1865 : Mise en non activité.

Une mise à pied enseigna à notre inspecteur à faire plus exactement son service.

Canler.

Delvau, 1866 : s. f. Privation de fonctions et d’appointements. Argot des bourgeois.

Rigaud, 1881 : Suppression momentanée de paye pour un cocher, un agent de police. — Interdiction momentanée de jouer faite à un acteur par son directeur, sans suppression d’appointements.

France, 1907 : Privation temporaire de fonctions, et par conséquent d’appointements. Voir Mettre à pied.

Mise bas

France, 1907 : Vêtements des maîtres qui reviennent aux domestiques.

France, 1907 : Cessation volontaire de travail d’une équipe de compositeurs, à la suite de quelque mécontentement.

France, 1907 : Accouchement, dans l’argot des ouvriers, qui comparent leur compagne à une chatte ou une chienne.

Mise en train

Rigaud, 1881 : Première tournée, station matinale chez le marchand de vin, — dans le jargon des ouvriers pressiers, en souvenir de la mise en train des presses.

Mise-bas

Delvau, 1866 : Accouchement, — dans l’argot du peuple.

Delvau, 1866 : s. f. Vêtements des maîtres qui reviennent de droit aux domestiques, lesquels se croiraient lésés et réclameraient si l’on portait trop longtemps ces vêtements.

Delvau, 1866 : s. f. Grève, chômage volontaire, — dans l’argot des typographes.

Rigaud, 1881 : Congé que s’octroie un ouvrier typographe.

Boutmy, 1883 : s. f. Grève, cessation de travail dans un atelier. Les mises-bas ont lieu pour infraction au Tarif ou au règlement consenti par les patrons et les ouvriers.

Virmaître, 1894 : Quand une équipe de compositeurs est mécontente pour une raison ou pour une autre, elle met bas, elle quitte le travail (Argot d’imprimerie).

Miseloque

France, 1907 : Le monde des gens de théâtre, acteurs, chanteurs, danseurs et leurs congénères féminins ; tout ce monde qui s’affuble de loques. Jean Richepin explique ce terme d’argot dans une spirituelle ballade :

Croire que l’on a du génie,
Et même en avoir, et pourtant
Rester de la race honnie
Que jusqu’en nos jours va fouettant
L’envie ou le rire insultant
Du bourgeois faisant l’Archiloque
Contre ceux qui l’amusent tant,
Voilà, c’est ça la misloque.

Prince ou larbin, en en sortant
Devenir une triste loque
Que l’oubli tout entier attend,
Voilà, c’est ça la misloque.

Jouer la misloque, jouer la comédie.

Miseloquier, miseloqueur

France, 1907 : Acteur.

Miser

France, 1907 : Mettre, faire l’acte vénérien.

Misérable

d’Hautel, 1808 : C’est un misérable. Terme de mépris. Pour, c’est un pauvre sire, un mauvais sujet, un vaurien.

Larchey, 1865 : Petit verre. V. Monsieur.

Delvau, 1866 : s. m. Verre d’eau-de-vie d’un sou, — dans l’argot des ouvriers.

Rigaud, 1881 : Verre de vin du broc à 15 centimes.

La Rue, 1894 : Verre de vin au broc.

France, 1907 : Verre de vin au broc ; petit verre d’eau-de-vie, dans les campagnes vendéennes. Deux misérables font une demoiselle ; deux demoiselles font un petit pot.

Misère

d’Hautel, 1808 : Le collier de misère. Pour dire, le travail journalier, les occupations habituelles qui procurent l’existence.
Crier misère. Pour, se plaindre continuellement et souvent sans sujet.

Delvau, 1866 : s. f. Petite quantité ; chose de peu d’importance : petite somme, — dans l’argot des bourgeois.

Misérer

Delvau, 1866 : v. n. Souffrir de la misère, — dans l’argot du peuple. On dit aussi : Ficher la misère.

Miserere

France, 1907 : Supplication, prière. Latinisme.

Misères

Delvau, 1866 : s. f. pl. Taquineries, petites méchancetés, — dans l’argot des bourgeois. Dire des misères. Taquiner quelqu’un en lui contant des choses qui le contrarient, qui l’inquiètent. Faire des misères. Agacer quelqu’un, lui jouer un tour plus ou moins désagréable.

Miséreux

Virmaître, 1894 : Malheureux. Homme qui est dans une profonde misère (Argot du peuple). N.

Rossignol, 1901 : Celui qui est dans la misère.

France, 1907 : Pauvre, nécessiteux.

Combien faut-il que le froid ait fait de martyrs pour que cesse l’inertie administrative ? Y a-t-il un quantum de cadavres à atteindre pour que l’on songe aux miséreux qui déambulent la nuit, le long des rues, échouent dans les postes de police, la faim au ventre, la rage au cœur, ou s’abattent sur les bancs des promenades publiques en exhalant leur dernier râle ?

(Mentor, Le Journal)

Eh bien ! il est temps de dire à ces eunuques du devoir, à ces fourbes de l’humanité, à ces pontifes d’une religion burlo-macaronico-humanitaire, qu’ils ne donnent le change à personne, que nul ne se méprend sur leurs véritables intentions, et que « l’ami des détenus » ne nous intéresse guère plus que sa fangeuse clientèle, et qu’enfin nous réservons notre pitié — la vraie, celle-là — pour les miséreux blancs de conscience et de casiers judiciaires et notre admiration pour les hommes de cœur qui, sans distinction de parti, de religions ou de doctrines, se préoccupent d’améliorer la situation du travailleur.

(P. Peltier d’Hampol, La Nation)

Sinistre sans jamais s’asseoir,
Fuyant les sergots en maraude,
Le miséreux sur le trottoir,
Comme un voleur, dans l’ombre rôde ;
Christ sans haine pour ses bourreaux,
Il s’arrête, ouvrant la narine,
Devant les larges soupiraux
D’où monte une odeur de farine.

(Jules Jouy)

Miséricorde

d’Hautel, 1808 : À tout péché miséricorde. Signifie que toute faute, quelle qu’elle soit, doit trouver son pardon.

Misloque

Larchey, 1865 : Comédie (Vidocq).

Je joue la mislocq pour un fanandel en fine pégrenne.

(Balzac)

Delvau, 1866 : s. f. Théâtre, — dans l’argot des voleurs. Jouer la misloque. Jouer la comédie.

Rigaud, 1881 : Comédie, — dans le jargon des voleurs. — Flancher la misloque, jouer la comédie. — Misloquier, misloquière, acteur, actrice. — Misloquier schpil, très bon acteur.

La Rue, 1894 : Théâtre, comédie.

Virmaître, 1894 : Théâtre (Argot des voleurs).

Hayard, 1907 : Théâtre.

Misloquier

La Rue, 1894 : Acteur.

Misloquier, ère

Delvau, 1866 : s. Acteur, actrice.

Misogallisme

France, 1907 : Haine du français.

Le misogallisme, dit M. Félix Varjoux dans la Revue d’histoire contemporaine, n’est pas d’invention récente. C’est au livre d’Allieri, le Misogallo, paru à la fin du dernier siècle, qu’il doit son origine. Dans ce livre se trouvait le sonnet que les ennemis de la France ont si volontiers répandu. Inutile de le reproduire ; ceux qui le connaissent n’auraient aucune satisfaction à le lire, et il ne semble pas nécessaire de le faire connaître à ceux qui l’ignorent. Depuis cette époque, le misogallisme a toujours existé en Italie, fort ou faible, apparent ou caché ; il s’est toujours montré à certaines époques. L’affection qui unit les enfants d’une même famille est rarement toujours égale et sereine ; après les querelles revient la tendresse. La France et l’Italie sont sœurs.

Mississipi (au)

Delvau, 1866 : adv. Très loin, — dans l’argot du peuple, pour qui l’Amérique est un pays aussi éloigné de lui que la lune. C’est l’équivalent de : Au diable au vert (ou Vauvert).

France, 1907 : Très loin, au diable ; argot populaire.

Mistenflûte

France, 1907 : Sobriquet général que l’on donne encore en province, par plaisanterie, aux personnes dont on ne sait pas ou dont on ne veut pas dire le nom.

Misti

Delvau, 1866 : s. m. Apocope de Mistigri, — dans l’argot des brelandières de brasseries.

France, 1907 : Abréviation de mistigri ; argot des joueurs. Le mistigri est le valet de trèfle qui a donné son nom à un jeu où, pour gagner, il faut faire brelan avec ce valet escorté de deux autres.

Misti, mistigri

Rigaud, 1881 : Valet de trèfle.

Mistich

La Rue, 1894 : Voleur étranger. Demi-heure, demi-setier.

Mistiche

Rigaud, 1881 : Demi. — Une mistiche, une demi-heure. — Un mistiche, un demi-setier, — dans le jargon des voleurs.

France, 1907 : Demi-setier.

Mistick

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Voleur étranger.

Rigaud, 1881 : Voleur étranger. (Mémoires d’un forçat, glossaire d’argot, 1829.)

Misticker

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Voler en pays étranger.

Mistigri

Delvau, 1866 : s. m. Valet de trèfle, — dans l’argot des joueurs. Se dit aussi d’un Jeu de cartes où l’on a gagné quand on a fait brelan avec le valet de trèfle escorté de deux autres valets.

Mistigris

Delvau, 1866 : s. m. Apprenti, — dans l’argot des peintres en bâtiment. Balzac a-t-il emprunté son rapin de ce nom aux peintres en bâtiment, ou ceux-ci à l’auteur de la Comédie humaine ?

France, 1907 : Apprenti peintre en bâtiment.

Mistious

France, 1907 : Manières empruntées, embarras. Faire des mistious.

Miston

M.D., 1844 : Jeune homme.

Mistone

M.D., 1844 : Demoiselle.

Mistonne

Hayard, 1907 : Jeune fille.

France, 1907 : Fille ; corruption de fistonne.

Ma mistonne est eun’ chouett’ mènesse,
Alle est gironde et bath au pieu,
C’est c’qu’on appelle eun’ rich’ gonzesse ;
Aussi j’l’aim’ ben ! mais, nom de Dieu !
Ya pas moyen qu’a tais’ sa gueule…

(Aristide Bruant, Dans la rue)

Mistoufle

Delvau, 1866 : s. f. Farce ; méchanceté ; trahison, — dans l’argot des typographes.

Rigaud, 1881 : Mauvais procédé, taquinerie, méchanceté. — Coup de mistoufle, combinaison, coup en dessous, coquinerie.

La Rue, 1894 : Farce. Misère.

Rossignol, 1901 : Causer des ennuis à quelqu’un ou le taquiner est lui faire des mistoufles.

Hayard, 1907 : Misère.

Mistoufle (être dans la)

Rossignol, 1901 : Être dans la misère.

Mistoufles

Virmaître, 1894 : Faire des misères, causer des désagréments à quelqu’un (Argot du peuple).

France, 1907 : Désagréments, ennuis.

Les médecins de nos jours, avec leurs théories parasitiques, ne voient plus que microbes partout, que microbes acharnés à nous faire des mistoufles, comme on dit à Montmartre.

(Armand Silvestre)

Le deuxième me fit des « pouffes »,
Le troisièm’ me fit tatouer,
L’quatrièm’ me fit des mistoufles
Et le cinquièm’ me fit suer,
Le sixième fit des manières,
L’septièm’ me fit du boniment,
Le huitièm’ me fit des misères,
Le neuvièm’ me fit un enfant.

(René D’Esse)

Employé au singulier, mistoufle signifie misère.

Et fichtre, c’est très légitime que l’appétit vienne enfin au populo : il a un ventre, c’est pour l’emplir ! Il a parfaitement raison de vouloir jouir de l’existence et de n’en plus pincer pour confire dans la mistoufle.

(Le Père Peinard)

Mistouflet

France, 1907 : Poupart, mignard, enfant gâté.

Mistouflier

France, 1907 : Malheureux, misérable.

Cette garce d’Assistance publique a été remise sur le tapis…
On lui en a envoyé de toutes les couleurs : on lui a seriné qu’en fait de secours elle n’en aboule qu’aux amis recommandés — et qui n’en ont pas besoin – et, qu’à bien voir, les seuls types réellement assistés sont les gratte-papiers et toute la kyrielle d’employés de son administration ; on lui a prouvé qu’au lieu d’empêcher les mistoufliers de crever la faim et au lieu de soigner les malades elle prend plaisir à voir pâtir et crampser les uns et les autres.

(Le Père Peinard)

Si nous sommes mistoufliers en diable, c’est que nous turbinons de trop : on s’abrutit et on n’a plus la force de foutre un pain aux salopiots de la haute qui vous manquent de respect.

(Le Père Peinard)

Mistro

La Rue, 1894 : Le vent.

France, 1907 : Le vent ; de mistral.

Mistron

Delvau, 1866 : s. m. Le jeu de mistigri, — dans l’argot de Breda-Street.

Rigaud, 1881 : Jeu de trente-et-un, nom d’un jeu de cartes. — Mistronner, jouer au trente-et-un.

France, 1907 : Le jeu de trente et un aux cartes.

Mistroneur, euse

Delvau, 1866 : s. et adj. Amateur de mistron.

Mistronneur

France, 1907 : Amateur du jeu de trente et un.

Mitaine

d’Hautel, 1808 : Des mitaines à quatre pouces. Se dit par plaisanterie d’un expédient inutile que l’on propose dans une affaire.
Cela ne se prend pas sans mitaine. Pour dire, il faut y apporter beaucoup de soin.
Onguent miton mitaine. Remède qui n’opère d’aucune façon, qui ne fait ni bien ni mal.

Fustier, 1889 : Voleuse, détourneuse à la mitaine. Femme portant des souliers très plats, sans talons et qui, dans un magasin, fait tomber des objets Qu’elle ramasse avec le pied déchaussé et cache dans son soulier. Cette sorte de voleuse ne s’attaque, en général, qu’aux dentelles de prix.

La Rue, 1894 : Variété de voleuse des magasins de nouveautés.

Mitaine (vol à la)

France, 1907 : Variété de vol à la détourne pratiquée dans les grands magasins par des femmes pour enlever des dentelles ou des objets faciles à dissimuler. Vêtue d’une robe longue, chaussée de souliers larges et de bas coupés laissant les doigts pied libres, la voleuse, en examinant des dentelles, en fait tomber à terre qu’elle ramasse avec un pied déchaussé et glisse dans le soulier. Ce vol demande une certaine dextérité.

Mitaines (prendre des)

France, 1907 : Agir on parler avec circonspection.

… Notre état,
C’est de fouetter au sang, comme Croquemitaine,
Tous les petits vauriens, sans prendre de mitaines.

« On en met trop », dit le docteur Grégoire, et il a raison. Pourquoi tant de mitaines pour parler à des fumistes !

Mitan

Delvau, 1866 : s. m. Milieu, — dans l’argot du peuple.

Hayard, 1907 : Milieu.

France, 1907 : Milieu, moitié. Provincialisme ; du latin medietas, moitié. Au mitan, au milieu, dans l’Est et la plupart des provinces. En tudesque, on écrit mittau ; en bas breton, mittain. La mer du mitan, la Méditerranée.

Le boufon qui vist cela dit : Et moi je voudrois estre au beau mitan.

(Brantôme)

Ai fai tremblai les quatre quarres
Et le mitan de l’univers.

(Noël bourguignons)

Jadis on disait mer du mitan, pour mer Méditerranée.

D’autre part, il voyait monter de la Bretagne
Grand nombre de vaisseaux sur l’ondeuse campagne,
Aux armes des François, et la mer du mitan
Ses galères conduire ès eaux de l’Océan.

(Jacques Corbin, La Sainte Franciade)

Mitar

Rossignol, 1901 : C’est le cachot ; mais c’est aussi le violon, comme on dit lamigo à Bruxelles.

Mitard

Virmaître, 1894 : Cachot (Argot des voleurs).

Hayard, 1907 : Cellule.

France, 1907 : Cachot. Prisonnier insubordonné que l’on met en cellule ; argot policier.

Mite

Delvau, 1866 : s. f. Chassie des yeux.

Rigaud, 1881 : Violon, prison, — dans l’argot des voleurs. Soufflé et au mite, arrêté et au violon, Mitonner. Embêter. Ça mitonne le pauvre monde, — dans le jargon des voyous.

Mite, mite-au-logis

Rigaud, 1881 : Sécrétion des yeux ; déplorable jeu de mots sur mythologie.

Mite, mitis, mitou, mitoux

France, 1907 : Chat ; du latin mitis, doux, à cause du poil soyeux de l’animal.

Il prophétisait vrai, notre maitre Mitis.

(La Fontaine)

Miterne

France, 1907 : Jonchère ; argot des pêcheurs.

Miteux

d’Hautel, 1808 : Il a les yeux tout miteux. Se dit d’un homme qui a les yeux tout humides de pleurs ; remplis de chassie ou d’humeur.

Delvau, 1866 : adj. Qui a les yeux chassieux.

France, 1907 : Pauvre, misérablement vêtu.

Quand nous arrivâmes à la posada, on ne voulut pas nous recevoir ; l’aubergiste nous trouvait, comme disait La Martinière, mon compagnon de route, trop miteux.

(Hector France, Sac au dos à travers l’Espagne)

Se dit aussi pour chassieux :

En rentrant, cet après-midi, à mon hôtel, par un des faubourgs de la ville, j’ai aperçu, assis sur une borne de pierre, à l’angle d’une rue, un très vieux juif. Le nez crochu, la barbe en fourche, l’œil miteux, couvert de guenilles puantes, il chauffait, au soleil, sa carcasse décriée.

(Jacques Celte, Du Nord au Sud)

Quand il s’adressait à sa fiancée et lui souriait, son œil miteux demeurait immobile, sans flamme et sans chaleur. On eût dit qu’il lui faisait la cour en chiffres.

(Louis Daryl, 14, rue Magloire)

Miton-mitaine

Delvau, 1866 : s. m. Remède inoffensif, expédient inutile, secours inefficace. On dit aussi : Onguent miton-mitaine.

Miton-mitaine (onguent)

France, 1907 : Objet sans valeur ; expédient inutile.

Mitonner

d’Hautel, 1808 : Ménager adroitement ; conserver.
Mitonner quelqu’un. S’emparer de son esprit.
Mitonner une affaire. La disposer de manière à la faire réussir.

Delvau, 1866 : v. a. Préparer de longue main.

La Rue, 1894 : Embêter. Préparer de longue main.

Mitou

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Malade.

Mitraille

d’Hautel, 1808 : Terme de mépris ; nom que l’on donne généralement à des choses de peu de valeur, et dont on ne fait aucun cas ; basse monnoie.

Larchey, 1865 : Monnaie de cuivre. — On disait autrefois mitaille. V. Roquefort.

Delvau, 1866 : s. f. Monnaie, gros sous, — dans l’argot des faubouriens, qui disent cela depuis longtemps.

Rigaud, 1881 : Une certaine quantité de sous s’appelle de la mitraille.

France, 1907 : Nom que l’on donnait autrefois à la monnaie de billon.

Mitrailleuse (étouffer une)

Fustier, 1889 : Boire un verre de vin.

France, 1907 : Boire un verre de vin.

Mitre

Larchey, 1865 : Cachot (Vidocq). — Au moyen âge le mitre était le bourreau.

Delvau, 1866 : s. f. Cachot, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Prison. — Mitré, prisonnier.

La Rue, 1894 : Prison.

Virmaître, 1894 : Cachot. Allusion à la mitre de l’évêque, qui est un signe de dignité. Être au cachot, pour un voleur, est un titre à la considération de ses pareils.
— Où donc est Barbe-à-Poux ?
— Il est mitré pour huit jornes (Argot des voleurs).

France, 1907 : Cachot ; argot des voleurs.

Allusion à la mitre de l’évêque, qui est un signe de dignité. Être au cachot pour un voleur est un titre à la considération de ses pareils.

(Ch. Virmaître)

Être mitré, être mis au cachot.

Mitron

d’Hautel, 1808 : Sobriquet que l’on donne à un garçon boulanger.

Halbert, 1849 : Boulanger.

Delvau, 1866 : s. m. Ouvrier boulanger, — dans l’argot du peuple. Le petit mitron. Le Dauphin, fils de Louis XVI, — du boulanger, comme l’appelaient les Parisiens en 1792.

France, 1907 : Mitre, coiffe en papier.

France, 1907 : Garçon boulanger, surnommé ainsi à cause du bonnet pointu ou mitre qu’ils portaient autrefois.

Croyez-vous que les bons bougres qui, en 1789, foutirent à sac l’usine Réveillon, incendièrent les octrois, défoncèrent le couvent Saint-Lazare, firent la chasse aux accapareurs, prirent la Bastille et, en octobre, allèrent à Versailles chercher « le boulanger, la boulangère et le petit mitron ! » étaient ferrés à glace sur les théories et étaient des républicains sans tare ?
Camille Desmoulins disait plus tard : « En 89, nous n’étions pas deux républicains en France ! »
Ce qui n’a pas empêché de raccourcir Louis Capet en 1793.
La Révolution, en germe en 1789, avait donc mis cinq ans à s’épanouir.

(Le Père Peinard)

Quand l’mitron dans les pains gémit,
Dans le lointain je crois entendre
Un peuple affamé qui frémit ;
Mon âme tressaille à ce bruit ;
Je n’ai jamais pu m’en défendre !

(Jules Jouy)

Mixte

Fustier, 1889 : Argot des gens à la mode pour qui cet adjectif, détourné de son vrai sens, a remplacé le mot épicier qu’on prit en 1830 et longtemps après cette époque pour désigner toute chose commune, de mauvais goût, toute personne ayant un genre vulgaire. L’expression être mixte couramment employée en 1886 est aujourd’hui abandonnée.

Quant au rire, n’en parlons pas ; rire n’est plus seulement canaille, c’est mixte.

(Gazette de France, janvier 1886.)


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique