France, 1907 : Tir aux pigeons ; anglicisme. Le même système s’affirme partout, dit Pontarmé dans le Petit Journal, on efface le mot français pour lui substituer le mot anglais. Plus de patinage, des skating-rings. Plus de tournoi au billard, des matches. Sans rire on écrit : Match de football, ce qui n’est ni anglais ni français. On dit couramment carpette pour tapis. Warrants, docks, drawback, free-trade, trade-unions sont des mots très usités dans la langue commerciale.
Cette fièvre d’emprunts réfléchis sévit surtout dans les choses du sport, comme je le remarquais en commençant ces lignes. La vieille vénerie française, qui composait son langage de termes exquis et vraiment savoureux, d’une origine française si pure, s’est transformée en shooting et hunting dont les armes sont le hammerless, le choke-bored, et où le chasseur s’accompagne de setters, de pointers, etc. Quel jargon ! Ne serait-il pas temps d’en limiter l’envahissement ? En vérité, John Bull doit bien rire de l’anglomanie de ceux qu’il dénomme avec tant de morgue les frog-eaters !
Il y a longtemps que le shooting, ce sport imbécile qui consiste à prendre pour cibles d’innocents pigeons, est acclimaté en France, et l’on prétend en ce moment même introduire le coursing, duel inégal d’un lièvre contre deux lévriers qui n’en font qu’une bouchées, — shooting et coursing, parodies de la chasse à laquelle on a enlevé son imprévu et en réalité simples prétextes à paris.
(Léon Millot, Justice)